Unilever veut tourner la page Gémenos
"I'm walking away…", la chanson de Craig David a été choisie par Unilever comme musique d'attente téléphonique et elle résume bien l'état d'esprit de la multinationale de l'agro-alimentaire. Pour elle, il faut quitter Gémenos et absolument mettre fin à 650 jours de conflit avec les salariés de Fralib vent debout contre la fermeture de leur usine. Contrainte par le ministre du redressement productif Arnaud Montebourg à se mettre autour de la table (ronde), l'entreprise a mis ce mercredi un point qui se veut final à la discussion.
Le volontarisme ministériel ayant encore plus braqué les projecteurs sur la bourgade provençale, c'est Paris que les dirigeants avaient choisi pour s'exprimer une dernière fois. Un rendez-vous solennel pour faire état des "propositions finales du groupe pour contribuer à la recréation d’emplois" mené par le président de la branche française, Bruno Witvoët, qui avait ces derniers mois plutôt envoyé au front son DRH, Frédéric Faure.
Pas de grosse évolution
Dans sa bouche, une seule proposition nouvelle, née de la concertation et déjà annoncée : les machines dont la valeur est estimée à 7 millions d'euros seront cédées pour un euro symbolique à la communauté urbaine de Marseille, future propriétaire du terrain suite à sa décision de préemption.
Pour le reste, Unilever campe sur ses positions. Elle ne sous-traitera aucun volume à une entreprise qui naîtrait sur le site et se refuse à libérer la marque Eléphant, pourtant peu développée ces dernières années.
On touche là à la limite de l'action gouvernementale. La position de l'entreprise n'a évolué qu'à la marge même si les communiquants avaient concocté un bel élément de langage à leur président. Il se résume à une somme, 12 millions d'euros, présentée comme devant servir au lancement de la Scop portée par la majorité des 102 salariés encore employés par Fralib.
Pas de coup de pouce à la Scop
Derrière celui-ci se cachent en fait les machines et les indemnités "supra-légales" versées aux 82 salariés ayant indiqué leur souhait de fonder la coopérative soit 65 000 euros par tête de pipe. Un montant rondelet mais qui est le même que celui obtenu par les ouvriers déjà licenciés il y a quelques mois.
Pas de coup de pouce supplémentaire donc car fondamentalement, l'entreprise ne croit pas au projet coopératif que le cabinet du ministre a pourtant regardé avec attention, reprenant un constat dressé sur notre plateau par le président de la chambre de commerce et d'industrie Marseille Provence, Jacques Pfister. Magnéto Esther.
"Il faut regarder la réalité du marché. En 2011, ont été produit 38 millions de sachets double chambre de moins qu'en 2010, renchérit Sophie Jayet, la porte-parole du groupe. A côté, on a Sibell qui veut investir 13 millions d'euros." Cette entreprise de fabrication de chips, déjà ciblée par le plan de revitalisation d'Unilever veut produire avec 55 salariés – pas forcément issus de Fralib – des tuiles apéritives.
Cette hypothèse n'est pourtant pas la seule mise dans la balance. Ces dernières semaines, des projets de reprises ou de soutiens à la Scop ont fleuri émanant de professionnels de l'agro-alimentaire français ou d'investisseurs chinois dénichés par les équipes de Montebourg.
Le détail de ces plans tarde pourtant à être présenté. Le ministre un temps pressenti pour s'exprimer cette semaine est accaparé par les annonces de PSA et le compte-rendu de la table ronde n'a toujours pas été dévoilé officiellement. En prenant les devants aujourd'hui, la multinationale a voulu montrer qu'elle ne saurait être contrainte par l'Etat dans ses décisions. Malgré le volontarisme du ministre et la lutte acharnée des salariés, Unilever is walking (far) away mais il n'est pas exclu qu'elle doive se retourner.
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Redressement productif ou délabrement progressif ? À vous de jouer Monsieur Montebourg !..
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