Gari Grèu, le camarade du Massilia lézarde en solo

Gari Grèu, le camarade du Massilia lézarde en solo

Sur la place Paul Cézanne, le bar El ache de Cuba ne désemplit pas. Un public déjà conquis dans son fief du Plateau se marche joyeusement dessus, joue des coudes pour sauver son pré carré, usant ses talons pour apercevoir au-dessus de la mêlée remuante Gari Grèu présenter son nouvel album, Camarade Lézard.

Avec ce nouveau disque, le chanteur tchatcheur de Massilia Sound System et de Oaï star, offre une ode ensoleillée à la vie quotidienne, teintée de sa gouaille populaire. Réalisé en solo, l’album n’a rien d’une quelconque prise de distance avec le groupe Massilia sound system. Au contraire, estime Gari Grèu, « nos albums en solo sont une façon de rajouter des cordes à notre arc commun. Et puis ainsi, le même soir, les chanteurs de Massilia Sound System irriguent tout le territoire ! »

Et ça fonctionne. Les paroles de Camarade lézard sonnent juste. Tantôt crue, tantôt empreinte de poésie, la verve de Gari Grèu ne glisse jamais dans l’excès de lyrisme. Il magnifie le flegmatisme, la capacité à oublier les « enboucans » de la vie, « le lâché prise ». Et pour cause, le chanteur possède sa définition toute personnelle du métier d’artiste : «Je suis quelqu’un d’engageant avec d’être engagé, au sens où mon boulot consiste à faire danser les gens pendant deux heures, à leur créer un moment où ils vont s’oublier ». Jamais moralisateur, Gari Grèu sait rester astucieux à travers un sens de la formule désarmant, comme la chanson Si on était : « Si on était un peu moins cons, on voterait pour des poètes, tout le monde serait trilingue, les conversations seraient dingues ».

L’album, imprégné de sonorités africaines et caribéennes n’est pas le fruit d’un voyage. L’inspiration, le chanteur la puise inlassablement dans les quartiers de sa ville: « Mon tour du monde, c’est un tour du 3^e arrondissement, mon Amérique du sud, je l’ai rencontré à la Porte d’Aix, mon Mali au cours Belsunce et mon Italie à la Belle de Mai. »

Camarde lézard loue un brin nostalgique, un Marseille coloré, le Massilia rêvé qu’il souhaiterait éternel : « Mon Marseille à moi n’est pas obligatoirement celui qui existe réellement, c’est plutôt celui que j’idéalise, où il y a encore ce côté populaire, vivace, toutes ces choses qui nous ont donné envie de le chanter il y a vingt ans déjà avec Massilia. C’est aussi cette identité plurielle, cosmopolite, toutes ces odeurs, ces couleurs, cette espèce d’intensité, cette grande gueule.»

Si la ville sert de terreau à son art, Gari Greu vante une démarche plus universelle : « Je fais des disques comme si j’étais un photographe qui prenait des petits polaroïds, qui les attrapait ça et là. Quand je parle de Marseille, cela peut être transposable ailleurs. » Dans le même esprit, l’artiste glorifie une langue française plurielle, passeport sur le monde, telle la chanson : « Que j’aime le français quand il est accentué par tous les endroits de la terre, quand il n’a rien à voir avec les ministères, quand il est malmené, quand il fait voyager ».

Marseille-Provence 2013 paraît encore loin à cet artiste du cru provençal qui devrait logiquement s’inscrire dans la programmation. Pourtant, rien n’est moins sûr : « J’attends de voir. J’essaie d’être positif, j’espère qu’il y aura des choses pérennes, que ça va boulinguer dans la rue. Après, comme dit IAM, on n’est pas très sollicités. »

>> En attendant, un apéro-concert sera donné ce soir au Central, au 4 Quai François Mitterrand, à la Ciotat et le vendredi 17 de 18 à 20h au Bailli, 11 place Gambetta, à Saint-Cannat. L’album est en vente dans les bacs.