Des navires français "libyannisés" aux manips des ONG : plongée dans la filière du thon rouge

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le 4 Mai 2011
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Des navires français "libyannisés" aux manips des ONG : plongée dans la filière du thon rouge
Des navires français "libyannisés" aux manips des ONG : plongée dans la filière du thon rouge

Des navires français "libyannisés" aux manips des ONG : plongée dans la filière du thon rouge

34 millions d’euros. C’est la valeur des thons rouges qui, en 2010, tournaient en rond dans les cages de Charles Azzopardi, un « fermier » maltais qui récupère la pêche des thoniers français avant de les engraisser puis les revendre à Mitsubishi et aux grands consortiums industriels japonais, qui écument la Méditerranée avec leurs gigantesque navires-congélateurs. De quoi justifier amplement le titre du livre que signe Julien Pfyffer, journaliste et fondateur de l’agence de presse Ocean 71 : Trésor rouge.

Une enquête, publiée ce jeudi, qui se lit comme un récit de la découverte d’une filière aux ramifications et à la complexité peu commune. Et une activité qui est désormais au coeur de l’attention des médias, et de la communication des grandes ONG, comme le montrent les premières pages du livre, qui raconte la bataille navale entre Greenpeace et les thoniers français en juin 2010. Et son envers, à savoir la version des pêcheurs, un peu moins héroïque que ne l’ont laissé entendre les passagers du Rainbow Warrior.

Prédateur en danger

Mais le trésor, c’est peut-être aussi ce prédateur redoutable dont la biologie est encore peu comprise, qui peut peser jusqu’à 800 kilos, capable de nager à 30 km/h sur de longues distances, équipé d’un  »échangeur thermique », et que seuls les orques et les requins mako s’aventurent à attaquer.

Une espèce dont on suivra la controverse autour de l’évaluation du stock, et donc du danger d’une disparition, mais aussi l’évolution des techniques de pêche, de la madrague (sorte de labyrinthe où viennent se perdre les thons) importée par les Phocéens à Marseille (Montredon ça vous dit quelque chose ?) jusqu’aux thoniers senneurs à 4 millions d’euros, dont les filets traînent sur des kilomètres et peuvent ramener en une prise 250 tonnes.

Un projet de ferme au Cap Canaille

On découvre d’ailleurs un projet de ferme d’engraissement entre Cassis et La Ciotat, porté en 2004 par Advanced Tuna Ranching Technologies,  »avec un dossier basé sur l’expérience des Espagnols, qui a été présenté au conseil général des Bouches-du-Rhône mais qui n’a pas dépassé ce stade », nous raconte l’auteur, qui explique l’absence totale de ferme de thon rouge sur les côtes françaises, principal pays pêcheur, que « l’élevage de poisson est assez mal perçu ici et que pour le thon rouge il y a beaucoup plus d’impact en terme de taille et de quantité de nourriture. Il y a aussi des préoccupations pour le tourisme, avec des odeurs ».

Mais, en parallèle de toute la filière industrielle – notamment les très lucratives fermes d’engraissement et les Sogo Shosha, ces conglomérats japonais qui détiennent dans leurs frigos l’équivalent de 5 ans de pêche – Julien Pfyffer remonte aussi le fil des multiples fraudes, failles et autres astuces autour du thon. Ainsi ces navires français « libyannisés » pour pouvoir accéder aux eaux territoriales étendues par Kadhafi. Ou ces BCD (bluefin tuna catch document), des bouts de papiers censés mettre un terme à la fraude en identifiant chaque prise.

N’épargnant aucun aspect, ni aucun acteur, il prend également le Thalys pour mettre l’Europe face à ses contradictions, elle qui a subventionné la construction d’une flotte démesurée (le Marcas III, basé à Marseille, a ainsi touché 857 000 euros en 2004) sans même poser des critères, ni savoir quel type de poisson était pêché…

Un lien Retrouvez l’interview de l’auteur, sur Marsactu

Un lien Un collectif international de journalistes a enquêté sur le thon rouge, sur Marsactu

Un lienBataille navale entre Greenpeace et les thoniers, sur Marsactu

Un lien L’émission de Strip Tease où l’on voit Mourad Kahoul dans ses oeuvres

Un lien Trésor rouge, la fiche sur le site des Editions Dialogues

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