L’État lance une expertise de grande ampleur sur les bâtiments à risque à Marseille
Le préfet annonce une expertise de grande ampleur des bâtiments à risque à Marseille. Celle-ci devrait prendre plusieurs semaines. En attendant cet audit, il s'agit d'analyser la sécurité des immeubles restant rue d'Aubagne pour permettre la poursuite des secours et envisager le retour des habitants évacués.
Le 65, rue d'Aubagne, la veille de son effondrement. (Photo : DR)
“Je n’ai pas connaissance d’expertise d’une telle ampleur dans l’histoire”. Le directeur de la DDTM (direction départementale des territoires et de la mer ) Jean-Philippe d’Issernio réfléchit un instant. “Peut-être dans le cadre du grand Paris, où on projette de construire de nombreux tunnels, ce qui peut fragiliser les immeubles…” C’est donc inédit. Ce vendredi, l’État a annoncé lors d’une conférence de presse lancer un audit des immeubles présentant des risques de sécurité à Marseille. “Le périmètre n’est pas encore connu. C’est la première étape de l’expertise” explique Marie-Emmanuelle Assidon, préfète déléguée pour l’égalité des chances qui prend le temps de détailler les mesures qui viennent d’être annoncées en conférence de presse par le préfet Pierre Dartout.
Cette expertise devrait prendre plusieurs semaines. Elle devra également prendre en compte la nature des sols selon les quartiers de la ville. Lors d’une conférence de presse tenue à la même heure, le géologue Michel Villeneuve souligne qu’à “Marseille, nous n’avons aucune idée de ce que l’on peut trouver sous 30 mètres, pratiquement aucun forage n’a été fait en dessous”. Or, la Ville est découpée en deux bassins, explique-t-il, l’un au Nord offre des strates horizontales régulières tandis que le second au sud “sur lequel repose Noailles, est beaucoup plus complexe, avec des strates parfois obliques. D’une rue à l’autre, la teneur du sol peut changer”, ajoute l’expert.
Identification d’îlots fragiles comme celui rue d’Aubagne
Cette difficulté ajoute une dose de complexité au travail des experts qui devront d’abord évaluer les zones prioritaires. “Elle se fera sur la base de l’identification d’îlots fragiles, peut-être comparables à celui de la rue d’Aubagne, reprend la préfète. Mais aussi sur la base de signalements et d’arrêtés de péril déjà pris.”
Cela fait bien entendu écho au chiffre que le maire a annoncé quelques minutes auparavant. “Depuis lundi, nous avons reçu 130 signalements qui ont donné lieu à 21 arrêtés de péril”, détaille Jean-Claude Gaudin qui évoque une “psychose”. Le maire ne commente pas le fait que sa ville nécessite un “audit de sécurité bâtimentaire” d’une ampleur inédite en France.
En revanche, sans discours écrit, il répète “la solidarité”, “la tristesse” qui accompagne la douleur des familles. Il dit aussi sa gratitude envers les services qui ont permis d’accueillir 359 personnes dans des hôtels depuis le début de ce “désastre”. Les derniers habitants évacués viennent de la rue d’Aubagne dont les deux côtés sont concernés par le périmètre de sécurité, tout comme la rue Jean Roque, où les premiers bâtiments ont également fait l’objet d’une évacuation préventive.
Consolider ou détruire
“Des experts du centre scientifique et technique du bâtiment doivent rejoindre ceux que nous avons sollicités depuis le début de la semaine. Ensemble, ils formeront un collège d’experts”, précise Pierre Dartout. Celui-ci devra évaluer la sécurité des immeubles restant de l’îlot pour voir ensuite comment ils peuvent être confortés, pour permettre l’éventuel retour des habitants. “Il s’agit de voir s’il y a un risque que l’effet domino se poursuive”, résume Jean-Philippe d’Issernio. Comme cela été décrit, les bâtiments de ce tronçon de la rue s’appuyaient les uns sur les autres.
“Nous sommes dans une construction en îlots, si l’on enlève un bâtiment dans de cette configuration, il se produira un phénomène de décompression qui peut entraîner l’effondrement des autres bâtiments de l’îlot”, analyse pour sa part l’architecte André Jollivet, par ailleurs élu d’opposition dans les 6e et 8e arrondissements. Quelle que soit la nature des conclusions des experts et le mode de confortement ou de démolition des bâtiments restant, le visage de Noailles ne sera plus jamais le même.
Devant la préfecture ce vendredi, une cinquantaine de manifestants rassemblés en marge de la conférence de presse scandaient en cœur “Gaudin! Assasin!”. Le même jour, un huitième corps, celui d’une femme, a été découvert dans les gravats du n°65. Les opérations de sauvetage doivent désormais se poursuivre sur le 63. Dans le quartier comme parmi les travailleurs sociaux qui œuvrent auprès des sans-abris, on affirme que ce bâtiment était régulièrement habité. Le travail des marins-pompiers permettra de savoir si le lieu était réellement clos et vide comme l’affirme la Ville.
Commentaires
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Des audits comme cela, combien depuis les débuts de la réhabilitation, du Panier par exemple ? 10, 20, et à quoi ont-ils servi ?
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Une fois que l’on aura complété ce que l’on sait déjà, la question reste : que fait l’Etat ? Rien ne peut permettre de rétablir la situation à partir du niveau de dégradation de l’administration municipale qui existe aujourd’hui… quand à la Métropole, on comprend bien que les autres communes vont être encore plus accablées à l’idée de ses retrouver “emballées” dans le même paquet que Marseille…
On est renvoyé au 28 octobre 1938 quand face à l’incurie municipale qui avait conduit à l’incendie des Nouvelles Galeries, la Ville de Marseille avait perdu son autorité sur les Sapeurs Pompiers (imagine-t-on où on en serait aujourd’hui si le corps des Marins Pompiers était un corps de fonctionnaires municipaux aussi efficaces que ce que l’on connaît… ça fait froid dans le dos) et avait été administrée par des Préfets fonctionnant comme des gouverneurs dans un régime d’exception.
Même s’il s’agit de modalités d’exception qui exigent la production d’une législation spécifique, la prise en main de la Ville par des fonctionnaires d’Etat va finir par s’imposer comme la seule solution.
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Je n’avais jamais pensé effectivement que le corps des Pompiers de Marseille aurait pu être constitué comme à l’ordinaire de fonctionnaires municipaux. Crainte rétrospective. Ceci dit grand respect pour ces Pompiers et intervenants (militaires et municipaux), ils risquent effectivement leur vie rue d’Aubagne.
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“Depuis lundi, nous avons reçu 130 signalements qui ont donné lieu à 21 arrêtés de péril”, détaille Jean-Claude Gaudin qui évoque une “psychose”. 21 arrêtés en une semaine, et combien en un an ? “Psychose” justifiée…
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