Logiques urbaines et logiques de pouvoir
QU’EST-CE QU’UNE MÉTROPOLE ?
Capitale d’une région, Marseille se voit reconnaître un statut administratif de métropole. Mais s’agit-il réellement d’une métropole au sens plein de ce terme ?
Villes et métropoles
Sans doute faut-il distinguer les villes et les métropoles – c’est-à-dire reconnaître aux métropoles une place particulière dans le champ des villes. Si, dans l’Antiquité, les métropoles (le mot signifie étymologiquement « ville mère ») désignaient des villes un peu plus importantes que les autres car elles disposaient d’une sorte d’audience, car elles avaient de l’influence dans un certain espace sur lequel elles se voyaient reconnaître un certain pouvoir, les métropoles se sont vues reconnaître, aujourd’hui, en France, un statut particulier avec la naissance de ce que l’on a appelé les « communautés urbaines » depuis 1966. Il s’agit de villes qui, au-delà de leur simple existence d’espaces urbains, sont considérées comme des sortes de chefs-lieux d’espaces regroupant un certain nombre de villes. Les métropoles sont des villes qui, au-delà de leur existence urbaine, ont une certaine autorité, un certain pouvoir, sur un ensemble de villes dont, en quelque sorte, elles représentent une identité partagée. Marseille, en ce sens, constitue une métropole car il s’agit d’une ville qui a un certain nombre de banlieues, d’une ville qui représente une identité commune à un certain nombre de villes situées autour d’elles et appartenant à un réseau. Une métropole est une ville qui domine un réseau urbain.
Le caractère métropolitain de Marseille
Même s’il est vrai que, sur le plan culturel, sur le plan économique, sur le plan politique, Marseille est une ville qui est plus importante que l’ensemble des villes qui sont situées autour d’elles, son caractère métropolitain a mis du temps à s’imposer. Pour commencer parce qu’en 1966, quand sont nées les communautés urbaines, G. Defferre, qui était alors le maire de Marseille, s’était opposé à l’institution d’une communauté urbaine dans laquelle il n’aurait pas eu le pouvoir. Sans doute le retard de la constitution de la communauté urbaine de Marseille, si on la compare à celle de Lyon ou à celle de Lille, est-il dû à des questions de pouvoir – comme beaucoup de décisions politiques ou d’absences de décisions. Toujours est-il qu’aujourd’hui, il existe une communauté urbaine de Marseille qui vient reconnaître dans les institutions l’existence d’une métropole à Marseille. Symboliquement, il est, d’ailleurs, intéressant de noter que le siège de la métropole est au Pharo, face à l’Hôtel de Ville, de l’autre côté du Vieux Port, comme si les deux institutions se faisaient face et s’opposaient l’une à l’autre. Ce caractère métropolitain de Marseille vient reconnaître dans les institutions politiques ce qui était déjà reconnu dans le domaine économique, avec l’existence de la Chambre de commerce et dans le domaine universitaire avec l’existence d’une université partagée entre Aix et Marseille.
L’avenir d’une métropole
C’est plutôt sur la question de l’avenir métropolitain qu’il convient de s’interroger, car sans doute l’identité métropolitaine de Marseille n’est plus en question. On peut poser la question de l’avenir de la métropole sur trois plans. La première question est politique : il s’agit de la désignation des acteurs du pouvoir de la métropole. Sans doute la dimension politique du fait métropolitain ne sera-t-elle pleinement reconnue que quand les institutions seront désignées au suffrage universel direct. Tant que les institutions de la métropole dépendront des voix des municipalités qui la composent, elle n’aura pas d’existence pleinement politique – ne serait-ce que parce que ce n’est que quand ils seront appelés à en choisir les acteurs que les habitants de la métropole prendront pleinement conscience de son existence politique. La seconde dimension de l’avenir de la métropole est économique. Même si, sans la métropole, l’avenir économique de Marseille ne serait pas pleinement reconnu, encore faut-il, pour que l’avenir économique de la métropole le soit réellement, qu’elle exerce la réalité de pouvoirs sur le plan économique. Pour exister, la métropole doit jouer un rôle dans l’économie de l’espace marseillais, à la fois un rôle d’incitation et d’ouverture de nouvelles activités appelées à offrir de nouveaux emplois et un rôle de régulation de l’économie de l’espace métropolitain et de ses entreprises. Enfin, pour avoir un avenir, la métropole doit s’exprimer et avoir une mémoire : c’est le rôle des médias. Marsactu a un rôle essentiel à jouer dans ce domaine, mais aux côtés d’autres journaux et d’autres médias. À cet égard, tant la réduction du nombre de quotidiens paraissant à Marseille que les menaces qui pèsent sur La Marseillaise sont autant de menaces qui pèsent sur la dimension symbolique et culturelle de la métropole et de son avenir. Une autre menace plane en ce moment : la confusion entre la métropole de Marseille et le département des Bouches-du-Rhône. Si la fusion de la métropole et du département était, à la rigueur, pensable dans le cas de Lyon, car le département du Rhône se confond presque avec l’agglomération de Lyon, en revanche, elle n’est pas acceptable dans le cas de Marseille, car le département des Bouches-du-Rhône est trop étendu pour se confonde avec la métropole de Marseille et fait apparaître une multiplicité de problèmes économiques, politiques et sociaux qui ne sont pas tous, loin de là, des questionnements urbains relevant d’une politique de la ville. La confusion serait un coup de force contre les logiques de la représentation démocratique.
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