À Marseille, des dizaines de milliers d’électeurs ne savent plus où ils habitent
À la veille des élections de 2017, le service des listes électorales s’est retrouvé avec un trou énorme : 85 000 électeurs au moins n’habitaient pas à l’adresse indiquée. La mission commando lancée pour y remédier et la cheffe recrutée pour boucher les trous ont fait des dégâts en interne.
À Marseille, des dizaines de milliers d’électeurs ne savent plus où ils habitent
Cet hiver, Gaudin a eu chaud. À l’orée d’une année électorale cruciale, le service municipal chargé des listes électorales, directement rattaché à son cabinet s’est retrouvé sans chef, miné par une guerre des clans. Au coeur de cette tension, le nombre alarmant d’électeurs n’habitant pas à l’adresse indiquée, les NPAI pour reprendre l’acronyme que la Poste tamponne sur le courrier en souffrance. Combien sont-ils ? Les estimations les plus alarmantes ont fait état de 100 000 électeurs perdus dans la nature à la veille des élections. Un chiffre impossible à recouper, la Poste ne tenant pas de statistique de ces retours de courrier.
Plusieurs sources, recoupée par la Ville, évoquent le chiffre de 85 000 NPAI courant 2016, retombés à 45 000 en fin d’année, avant de remonter encore avec les retours de la Poste. Un chiffre jugé crédible par la Ville, qui reconnaît qu’il y a bien eu urgence. Or, 85 000 électeurs absents représentent tout de même 17% des 500 000 inscrits marseillais. Il y avait bien péril en la demeure.
“Peu de plaintes”
Un péril aujourd’hui minimisé puisque, “il y a eu peu de plaintes de gens qui n’auraient pas pu voter faute d’inscription”, explique-t-on à la Ville. Mais que s’est-il passé au sein d’un service pourtant surveillé comme le lait qui chauffe par le directeur du cabinet du maire, Claude Bertrand ? Entre 2015 et 2016, 80% de l’encadrement a été renouvelé, à commencer par la cheffe de service, arrivée sans expérience.
Début 2016, les cadres de la direction Accueil et vie citoyenne, Patrick Soudais et Alain Vollaro alertent donc le cabinet sur cet état de flottement à la veille des élections. Cadres à la Ville, ils le sont aussi au sein du syndicat Force ouvrière, qui revendique une position dominante dans l’appareil municipal. Et une proximité assumée avec le maire.
Dans un premier temps, la direction du service est renforcée pour tenter de réduire le nombre de NPAI. Le chantier démarre. À Marseille, cela veut dire se livrer à une véritable enquête : recoupement avec l’état civil, les impôts fonciers, un coup de fil aux ascendants. Mais le temps presse et ce travail de fourmi entame à peine la montagne avant les réunions de commissions administratives de révision des listes fin septembre puis début décembre.
Claire T, le retour
L’administration sort alors sa botte secrète : Claire T. Cadre A+, elle a dirigé le service pendant des années avant de rejoindre la communauté urbaine puis de partir en retraite. Énergique, elle est réputée efficace et débarque en novembre 2016. Mais cette efficacité a son revers de médaille, certains craignant le retour d’une dérive autoritaire qu’ils ont déjà connue.
Sur le papier, sa mission est claire : former la cheffe de service et l’aider à tout remettre d’aplomb. Le “coaching” se transforme très vite en court-circuit de la hiérarchie officielle et la guerre des clans commence.
La tension culmine fin décembre 2016. Les dernières commissions sont passées, il ne reste plus que quelques jours avant la date butoir du 31 décembre alors que le taux tutoie toujours les 65 000.
“Il faut sauver le maire”
Selon plusieurs témoins, Claire T. réunit l’ensemble des agents du service au dernier étage de la direction. Sans un mot pour la cheffe de service officiel, elle annonce une “mission commando” confiée par le cabinet. Le mot d’ordre est énoncé clairement : “il faut sauver le maire !” Des lettres avec accusé de réception partent donc dans les tous derniers jours de décembre, radiant des électeurs a priori sans passage par la commission. Combien et pour quel résultat ? Personne ne sait. Radiation ou changement d’adresse doivent intervenir avant le dernier jour ouvrable de 2016. Les listes elles-mêmes sont arrêtées fin février une fois connus les électeurs partis s’inscrire dans d’autres communes ou décédés. La marge de manoeuvre est donc faible. Pourquoi un tel zèle ?
Officiellement, il s’agit d’arriver aux jours de scrutin avec des listes à peu près réalistes. Officieusement, il peut y avoir un intérêt à radier certains électeurs introuvables, quand la barre pour atteindre le second tour des législatives est fixée à 12,5% des inscrits. Le seuil est atteint plus aisément et facilite des triangulaires. Une hypothèse difficile à valider a posteriori, au vue du bouleversement politique qui a accompagné la dernière séquence électorale.
Soupçon de harcèlement moral
Du côté de la Ville, on se satisfait de la bonne tenue des scrutins malgré la hauteur des piles de cartes d’électeurs qui attendaient leur propriétaires dans les bureaux de vote. En ce moment même, des courriers partent pour inciter les NPAI qui ont participé au vote malgré leur changement d’adresse à régulariser leur situation. Reste un service décrit par certains comme traumatisé par l’opération commando. Au point que la CFE-CGC et la CFTC se sont fendus d’un courrier dénonçant un risque de “harcèlement moral” est arrivé sur le bureau du maire pile poil entre les deux tours.
À la Ville donc, on reconnaît que la mission de coaching confiée à Claire T. s’est effectivement doublée de “tâches exécutives”. Pour le reste, les tensions en cours y sont surtout vues à l’aune de la concurrence syndicale entre Force ouvrière et de nouvelles formations.
La pige de Claire T. devrait se terminer avec l’année et ne pas se prolonger jusqu’en 2020 comme certains le craignaient. La Ville cherche donc deux cadres pour diriger le service. Une annonce de mobilité est parue en interne. Mais une solution externe semble être privilégiée. Heureusement les prochaines élections sont loin. Le temps de retrouver la paix.
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Commentaires
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c’est les “responsables” municipaux qui ne savent plus où ils habitent!!!
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FO va le trouver le cadre “compétent” pour diriger le service !!!!
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Certainement. Marre de ce m..dier.
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Ravi d’apprendre que M Gontrand se ravitaille direct en lait de la ferme… Désolé, bien que conforté dans mon opinion, qu’il ne surveille pas bien son bouillonnement ! Mais il en est des déménagements d’électeurs comme des embauches familiales au centre d’hébergement des sans abri, comme des plannings du personnel des maraudes du samu social, comme des … (je m’arrête, ça va être encore trop long!)
On peut pas être au four et au moulin et surveiller le lait en plus. Tout ça doit être rangé dans les effets collatéraux d’une année fort lourde, entre la métropole et sa naissance aux forceps, avec quelques séquelles semble t il, hélas, la préparation de la Mère des batailles, électorale bien sur, qui a tourné à la déconfiture et la gestion en parallèle de FO qu’il s’agit de faire en priorité, bien sur. Le mieux serait de le décharger, et fissa, de ses responsabilités métropolitaines. Et là, même si ça ne produit pas rapidement d’effets positifs sur le lait, ça produirait, de toute façon, comme qui dirait un cordon sanitaire, ça éviterait que le m..dier se propage à l’échelle de la métropole, par un effet de contagion bien prévisible, et sur lequel j’avais déjà alerté. Nos voisins ne savent pas vraiment, à quels dangers ils sont exposés… Les clans, les missions “commando”, les piges…!!!
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Une sorte de petit atelier clandestin au cabinet du maire, avec une tôlière sévère ?
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