Chez En Marche, c’est un peu le bazar mais tout le monde est content… pour l’instant
Pour les comités locaux En marche, la campagne a repris avec le même enthousiasme teinté d'amateurisme tandis que dans toutes les têtes, les législatives se profilent. Pour l'heure, les investitures restent au secret de la commission nationale. Mais en coulisses, les ambitions s'agitent.
Les macronistes au QG marseillais au soir du premier tour. Photo : B.G.
Des petits points rouges sur une carte interactive. Après la fièvre du dimanche soir, les militants d’En marche ont repris leur travail de fourmi. Comité local par comité local, la campagne est repartie. Tractages, réunions de marcheurs, rencontres chez l’habitant… “Avec beaucoup d’enthousiasme mais beaucoup d’amateurisme”, reprochent certains, transfuges d’autres formations politiques, sans se dévoiler. “Il n’y a pas de raison de changer de méthode puisque ça a fonctionné jusque-là”, disent d’autres. “C’est bien, on s’envoie des messages via Telegram, mais j’ai connu des campagnes où il y avait un tableau, chacun s’inscrivait et ça roulait comme ça”, râle un dernier.
Tous le reconnaissent : faute de coordination centralisée, cela part un peu dans tous les sens. Pourtant, avec une troisième place sur Marseille et une quatrième sur le département, Emmanuel Macron n’a pas réussi à s’implanter localement. Mais ce travail des territoires à conquérir pour le deuxième tour et, au-delà, pour les législatives n’a pas encore été fait. En tout cas, d’après les marcheurs que nous avons interrogés. Du coup, l’enthousiasme prend le pas sur l’analyse.
Double inquiétude
Derrière cet enthousiasme, une double inquiétude point : celle de ne pas arriver à séduire les électeurs “républicains”, notamment de gauche, à faire front pour l’emporter face à Marine Le Pen. “Franchement, je ne comprends pas l’attitude de Mélenchon vis-à-vis du second tour, constate Saïd Ahamada, élu de secteur et candidat déclaré dans la 7e circonscription (14/15/16e arrondissements). On ne peut pas renvoyer Macron et Le Pen dos à dos [La France insoumise a depuis notre entretien déclaré “pas une voix pour Le Pen, ndlr]. Les frontistes ont du sang sur les mains et, dans nos quartiers, on ne peut pas l’oublier. Dans notre kit de campagne, nous avons prévu une communication en ce sens.”
Mais, même en cas de victoire, l’inquiétude ne s’efface pas tout à fait. Pour gouverner, il faut une dynamique qui débouche sur une majorité à l’assemblée. Une victoire étriquée serait de mauvaise augure pour les législatives de juin. “Il faut transformer un vote de refus en vote d’adhésion, analyse Patrick Thévenin, Modem, déjà en campagne dans la 5e circonscription (4e, 5e et 6e arrondissements)et qui espère l’investiture En Marche. Sinon, cela sera très difficile pour les législatives”. Les résultats du premier tour, tant à Marseille que dans le département, ne laissent pas espérer une vague de députés issus du cru.
L’attente des investitures
Les législatives, tout le monde en parle dans son coin mais, officiellement personne ne s’y prépare. En tout cas collectivement. Les investitures tomberont d’en haut, de la commission présidée par Jean-Paul Delevoye. Lors de son meeting marseillais, le candidat d’En marche annonçait la liste des candidats “pour les prochaines semaines” sans aller plus loin. Lors de la soirée du premier tour, certains espéraient voir tomber cette liste avant le second “pour créer une nouvelle dynamique de campagne et mettre les militants en ordre de bataille”. Mais les jours passent et la liste ne tombe pas. Du côté du Modem, la boîte noire est tout aussi opaque. Personne ne connait les “circos” – une centaine au niveau national selon l’accord conclu – qui pourraient être réservées aux soutiens de Bayrou. La rumeur table sur deux circonscriptions orange dans le département dont une à Marseille, sans que l’on sache lesquelles.
“Je pense qu’on ne l’aura pas avant le 7 mai, glisse Philippe Sanmartin, élu Modem à Salon et candidat déclaré dans la 8e circonscription. La raison en est très simple : sur cette circonscription, au comité En marche de Salon, il y a pas moins de 10 candidats. S’ils annoncent maintenant que la circo va au Modem – je dis ça au hasard – ils vont forcément se démobiliser. Partir dans une campagne aussi courte, ce n’est pas forcément simple mais nous ne sommes pas à quelques jours près.”
Pléthore de candidats
Effectivement, selon les secteurs, les candidatures ont fleuri. Selon la rumeur, active au sein des marcheurs, l’ancienne circonscription de Sylvie Andrieux aurait plus de 40 postulants en parallèle. Avec un CV déposé en quelques clics, la carotte était tentante.
Le plus proche candidat officiel, dans la 5e circonscription du Vaucluse entre Apt, Carpentras et Pertuis, est le sociologue Jean Viard, ancien élu marseillais. “Je suis le mouvement depuis un an, je suis assez proche des analyses que défend Macron et j’ai fait acte de candidature le jour de la clôture. J’ai su après qu’ils étaient 16 ou 17 à avoir fait de même dans la circo.” Il reconnaît également que son profil n’y est pas étranger. “Forcément, Jean-Paul Delevoye me connaît, explique-t-il. Je n’ai pas eu besoin de l’appeler. Je pense que mon profil a séduit. À la fois, de par mes travaux sur les campagnes et les mutations de la société française que pour mon engagement contre le FN.” Il fait donc partie du premier panel très markété de premiers candidats.
Coup de fil de Paris
Dans le département, d’autres ont reçu un appel de la commission d’investiture pour mieux connaître leur parcours et leur adéquation aux critères de renouvellement, de probité, de parité et de non cumul. “Cela a duré trois-quarts d’heure sous la forme d’une présélection. Ils voulaient savoir comment j’appréhendais la circo, explique Saïd Ahamada. Sur quelles propositions du programme j’allais faire campagne, quelles étaient les autres qui ne passaient pas.” Lui espère fortement être le candidat choisi dans quelques semaines : jeune, diplômé, issu des quartiers populaires et centriste.
Il a donc constitué autour de lui une équipe mixte, constituée de marcheurs mais aussi de militants qui adhèrent à sa volonté de renouvellement. Et il sème quelques petites pierres blanches en attendant. Attendu samedi pour une visite de terrain et un meeting, Christophe Castaner commence par une visite à la rencontre d’associations à la Busserine, une cité du 14e, située dans la circonscription que l’élu des arrondissements voisins convoite.
Le cordon anti-guérinistes
Un autre voisin, le conseiller départemental Christophe Masse, pourrait venir s’y montrer. “Tous les adhérents auront l’info”, constate Ahamada. Après tout, Château-Gombert, son fief est un des rares territoires du nord de la ville où Macron a percé. Mais, comme d’autres réputés trop proches des guérinistes, il pourrait être victime de la volonté de renouvellement qui, dans le département, pourrait passer de 50 à 100 %. Sans le défendre officiellement, Corinne Versini espère “une bonne surprise” de ce côté-là.
Élu sur la liste de Jean-Noël Guérini aux municipales 2008, Jean Viard est beaucoup plus indulgent : “La politique est une affaire de compromis. Il faut réussir à construire une majorité sans tomber dans la compromission. Les socialistes locaux se sont toujours construits sur l’opposition aux communistes, analyse l’ancien élu marseillais. Mais, au final, il y a une forme de pré-macronisme dans ce socialisme proche de l’entreprise, notamment familiale. Après cela a versé dans un système clientéliste, multi-générationnel. Il faut faire le tri. Mais une élection, c’est fait pour avoir une majorité.”
À Marseille, beaucoup réclament un véritable cordon sanitaire pour éloigner les anciens amis de Jean-Noël Guérini. Ceuxi-ci ont su se montrer très présents lors du premier déplacement du candidat mais n’ont pas forcément réussi à mettre En Marche en tête dans leur commune (Grans – 20 %, les Pennes-Mirabeau – 16 %, Velaux – 23 %). C’est là où la boîte noire parisienne a son avantage : pour l’heure, Emmanuel Macron n’a contrarié aucune ambition. Jusqu’au second tour, tout le monde tire dans le même sens.
En l’absence des grands partis, la première urgence est de réussir à tenir les bureaux de vote. Les élus implantés ont aussi leurs militants chevronnés. “Pour le premier tour, nous avons réussi à réunir 900 assesseurs pour 1300 bureaux dans le département. C’est déjà pas mal, constate Philippe Sanmartin, en charge des bureaux dans le cadre de l’alliance Modem/En marche. Les présidences des bureaux, cela incombe au maire. Mais c’est certain que pour le deuxième tour, il faut arriver à mettre des assesseurs partout. C’est un des enjeux, notamment pour Marseille.”
Et, dans ce cas-là, tous les militants sont les bienvenus. Certains sondent même les sections socialistes pour trouver des volontaires pour le 7 mai. Une fois Macron élu, il sera toujours temps de faire le tri.
Commentaires
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Si En Marche veut réussir ses législatives, il faudra que ce partie se débarrasse des élus clientélistes ou Guérniste! Exit Lisette Narducci, Jibrayel et autres Masse! Ils ont fait leur temps, place à de la nouveauté et de la probité!
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Mais justement, En Marche (vers quoi d’ailleurs) n’est là QUE pour recycler toutes ces vieilles badernes…
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C’est possible, mais il faut attendre de connaître le nom des candidats avant d’affirmer cela. Pour l’instant, la liste des 13 premiers candidats investis montre un réel renouvellement. J’attends avec impatience de connaître la sélection effectuée pour les Bouches-du-Rhône. Renouvellement mixte ou reconstitution d’un PS bis ? Suspense !
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En ce temps où le “dégagisme” a le vent en poupe, le mouvement macroniste gagnerait certainement, lors du choix de ses candidat.e.s, à se garder des mots en “-age” et en “-isme” : parachutage, recyclage, copinage, népotisme, favoritisme, opportunisme et cynisme. Ca en fait beaucoup, je sais, mais on a déjà bien assez donné à Marseille et dans le département.
Ce n’est pas seulement son intérêt électoral, c’est aussi une question de respect de l’électeur : proposer un projeeeeeet hors partis, supposé novateur, pour la présidentielle et le faire porter ensuite par les vieux appareils et leur personnel politique professionnel, il y aurait comme tromperie sur la marchandise…
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Il y a plus de candidats pour les législatives que de volontaire pour être assesseur !
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C’est le rêve américain: tout un chacun peut devenir député , embaucher fictivement sa famille, et invoquer un cabinet noir quand la justice les inquiète ! Alors être assesseur, ça ne fait pas assez “marcheur” .
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