Les piscines dans le grand bassin de la métropole
La métropole est à la recherche d'un cabinet de conseil pour l'accompagner dans la création d'un réseau de piscines. Dans un premier temps, elle devrait en gérer 18 sur les 64 du territoire et se fixe comme objectif que 100 % des élèves entrant en sixième sachent nager. Impossible, selon l'adjoint aux sports de la ville de Marseille.
Le plongeoir de la piscine de Gardanne. (LC)
Un Marseillais dans un bassin du pays d’Aix : la scène se déroulait en septembre dernier, à l’occasion de l’inauguration de la piscine de Venelles. Le nageur-conseiller métropolitain Frédérik Bousquet plongeait pour l’occasion dans l’équipement flambant neuf de la métropole. L’un des premiers rubans de la toute jeune institution. Le vice-président aux finances Roland Blum avait peu goûté ces éclaboussures chlorées pour un investissement de 22 millions d’euros de travaux qui demandera 1,4 million d’euros de fonctionnement annuel. “Je trouve ça tout à fait démesuré. Ce n’est pas le job de la métropole ni de construire ni de gérer ce genre d’équipement”, avait-il lâché à Marsactu.
En est-on bien sûr ? Quelques mois plus tard, son institution lançait un appel d’offres pour se jeter dans le grand bassin des piscines, avec dans le rôle du maître-nageur un cabinet de conseil. Concrètement, il s’agit d’accompagner Aix Marseille Provence dans “la création d’un réseau métropolitain d’équipements aquatiques”. Le cabinet retenu – l’appel d’offres a été clôturé ce mercredi – devra commencer par “établir un état des lieux et un diagnostic”, avant d’aider la métropole à “l’élaboration et la rédaction d’un projet de création d’un réseau cohérent et pertinent des piscines métropolitaines au regard notamment d’une politique métropolitaine d’apprentissage de la natation”.
64 piscines dans la métropole
Contactée par Marsactu, la métropole et son vice-président aux sports Éric Le Dissès préfèrent attendre les résultats de l’étude pour s’exprimer en détail. Elle précise toutefois l’enjeu : “Il existe aujourd’hui plus d’une soixantaine de piscines publiques à entrée payante dans le territoire métropolitain”, dont 46 sont propriétés des communes et sous la responsabilité de ces dernières. Les 18 autres étaient, comme la piscine de Venelles, “gérées par des intercommunalités qui ont été fusionnées à la création de la métropole au 1er janvier 2016”. Elles sont désormais propriétés de la métropole.
Au fur et à mesure du travail d’un groupe d’élus chargés de définir “les équipements d’intérêt métropolitain”, d’autres piscines pourraient remonter vers la métropole sans qu’il y ait de transfert massif. “La mise en réseau peut être une bonne chose, à condition que la métropole ait les reins assez solides financièrement”, prévient Georges Cristiani qui pilote ce groupe de travail au titre de sa vice-présidence.
Objectif 100 % d’élèves sachant nager en sixième
En lisant entre les lignes, l’affaire ne se limite pas à savoir quel logo sera sur la fiche de paie des agents ou qui passera les commandes de perches et de chlore. “Les recommandations de l’Éducation Nationale préconisent que chaque établissement scolaire
élémentaire ne doit pas se trouver à plus de 20 minutes de bus d’un établissement dispensant l’apprentissage de la natation”, rappelle le document avant de poser le socle de la mission du prestataire :
La politique aquatique de la Métropole souhaite placer au cœur de son dispositif le « savoir nager » notamment pour les élèves de la dernière section de maternelle jusqu’au CM2 soit la classe d’âge des 5/10 ans avec l’objectif que tous les enfants entrant en 6ème sachent nager.
Cet objectif fait écho à celui de la piscine de Venelles, comme le présentait son maire Arnaud Mercier (LR) : “Il s’agissait d’un choix politique, celui de développer l’apprentissage de la nage pour que tous les enfants du pays d’Aix sachent nager”. Ainsi, outre les poloïstes du pays d’Aix natation, l’équipement doit accueillir les premières brasses des écoliers des communes alentours.
“Très fortes inégalités”
À lire cet objectif, difficile de ne pas penser au cas marseillais. En 2013, La Provence puis Le Monde avaient relayé une étude menée par la direction départementale de l’académie Aix-Marseille selon laquelle 55 % des élèves marseillais de sixième échouaient au test du « savoir nager » (avancer dans l’eau sur une quinzaine de mètres). “On monte à 75 % de non-nageurs dans les quartiers nord, au centre-ville et dans la vallée de l’Huveaune, les zones les plus populaires de Marseille. Avec des pointes à 90 % dans certaines cités”, précisait Christine Quenette, conseillère pédagogique chargée du dossier.
L’appel d’offres se fait plus vague mais précise que “le territoire métropolitain recèle de très fortes inégalités. (…) Certaines zones du territoire métropolitain présentent même des taux d’habitants sachant nager inférieurs à la moyenne nationale qui indique déjà qu’un Français sur 5 ne sait pas nager (source : InVeS et InPES 2012). Ces zones n’ont pas vraiment accès aux équipements aquatiques.”
Inatteignable pour l’adjoint aux sports marseillais
Contacté par nos soins, l’adjoint aux sports de la ville de Marseille Richard Miron se montre sceptique, pour ne pas dire ironique, sur l’idée d’amener l’intégralité des élèves de 6e à savoir nager :
C’est un objectif noble et ambitieux. Mais moi on m’a toujours expliqué qu’un objectif devait être lisible, compréhensible… et atteignable. À Marseille, on a 75 000 gamins scolarisés. Si déjà il fallait qu’ils sachent tous nager, compte tenu du nombre de semaines qu’il faudrait entre le CP et le CM2, il faudrait 45 piscines à Marseille.
Malgré tous nos efforts, nous n’avons pas réussi à ce résoudre ce problème arithmétique du nombre de semaines et de bassins nécessaires à la formation des petits Marseillais. Mais d’où part-on ? C’est-à-dire où en sont les élèves de CM2 prêts à passer en sixième ? “Je n’en sais rien car j’ai entendu tous les chiffres les plus fantasmagoriques”, élude-t-il.
Démêler les responsabilités (bassins insuffisants, manque de maîtres-nageurs, créneaux non attribués par l’éducation nationale…) s’avère compliqué, surtout en l’absence de réponse de l’académie Aix-Marseille à nos sollicitations.
Réaffirmant sa position sur le nombre suffisant de piscines dans le nord de Marseille (lire notre article), l’adjoint aux sports préfère se placer sur le plan des choix individuels : “Malheureusement, tout le monde ne saura pas nager, car tout le monde n’en a pas envie ! Aujourd’hui, c’est aussi de la responsabilité des parents qui doivent s’investir dans l’apprentissage de leurs enfants. On ne peut pas demander à l’institution au sens large de remplir tous les rôles.” La métropole semble pourtant décidée à remplir celui-là.
Commentaires
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Ce désopilant Monsieur Miron est vraiment au développement du sport ce que le moteur diesel est à la lutte contre la pollution de l’air…
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Il est en effet essentiel que tous les enfants apprennent à nager à un âge où la faculté d’apprendre est immense.
En outre, le développement d’un réseau de piscines et de salles de sport, si possible jumelés, devrait être un axe de développement majeur pour des élus qui se préoccuperaient réellement du bienêtre et de la santé de la population. Cela qui ne semble pas le cas de M. Miron et de M. Gaudin qui préfèrent laisser le champ libre au privé dans un secteur qui génère donc des profits (avec des délégations de service public financés par l’impôt) tout en accroissant les inégalités.
Enfin j’ajoute que compte tenu des modes de vie, de travail, de circulation, de consommation et d’habitation les frontières communales sont aujourd’hui périmées et ne servent qu’à justifier l’existence d’instances communales complétement périmées. Vivement le suffrage universel pour la métropole et la mise en place d’instances participatives !
Les impôts locaux, très élevés dans le secteur, doivent-il essentiellementservir à financer les indemnités et le train de vie des élus (communication comprise) ?
Pour le sport santé, voir : http://www.lemonde.fr/sante/article/2017/02/28/du-sport-sur-ordonnance-mais-pas-rembourse_5086911_1651302.html
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45 piscines à Marseille cela nous fait une piscine pour 19 000 habitants. Il me semble bien que TOUTES les villes de 19 000 habitants sont dotées d’une piscine. Donc cela n’aurait rien de scandaleux.
Ce qui l’est davantage : une seule petite (et vieille) piscine dans le 15e (80 000 hab selon Wikipédia). Il me semble qu’il s’y trouve quelques écoles. Pas vraiment besoin de l’académie pour les trouver. C’est la mairie qui est propriétaire des écoles et elle en connait parfaitement les effectifs.
De plus, dans le 15e (idem pour le 2e -25 000 hab- qui est riverain et sans piscine) il n’y a pas de plage !
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Ce triste sire de Miron semble découvrir le monde, effectivement le rapport habitants/piscine (45 pour Marseille) ne semble pas incongru eu égard à ce qui se pratique par ailleurs. Même certaines petites villes de moins de 20 000 habitants ont une piscine. Et puis ces réponses “je n’en sais rien…”, “…c’est la responsabilité des parents…” ; tout cela pour masquer des années de gestion erratique des deniers publics. “Eluder” est bien le verbe majeur de cette classe politique locale. A la longue ce type d’arguments utilisés par tous les élus dans quasiment tous les domaines qui sont de leur responsabilité deviennent insupportables. Quel ramassis d’incompétents il faut bien le dire.
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Dans cette note émanant du ministère des sports (http://www.sports.gouv.fr/IMG/pdf/ff_nat_cahier_1.pdf), on peut lire page 13 que les EPCI regroupant plus de 100 000 habitants disposent de 1785 bassins aquatiques, pour une population totale de 24,5 millions d’habitants. Ce qui doit correspondre à un bassin pour 13 750 habitants.
Ben oui, M. Miron, faire du sport, ce n’est pas seulement une question de responsabilité des parents : c’est aussi une question de disponibilité des infrastructures. Et de responsabilité des élus, cette responsabilité que vous fuyez depuis que vous êtes adjoint à la destruction du sport à Marseille.
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Une copie du cahier des charges pompée à la métropole de Montpellier qui a su, elle, mettre en place cette politique bien avant la 2ème ville de France…M. Miron ,quant à lui, se montre comme un poisson qui brasse dans les eaux arrogantes des certitudes….
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On m’a toujours expliqué qu’il fallait surtout chercher à résoudre des problèmes importants.
Richard Miron préfère les éviter consciencieusement, ici avec un chiffre bidon sorti du chapeau et une tirade renvoyant à la responsabilité individuelle.
Je suis en colère.
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Pauvre miron, on ose lui poser des questions sur un sujet qui le dépasse….pour lequel depuis des années nous avons tous les preuves de son incompétence crasse. C’est quasiment un cas d’école qui illustre la gestion globale de la ville de Marseille.
Il a cependant été réélu avec cette équipe de cadors qui siège à la mairie.
Ce qui me met en colère, c’est ce mépris (d’élu qui a le pouvoir) affiché, ce rappel ignoble à une “responsabilité des parents”…. c’est caricatural ? ben non c’est la réalité, le trait n’est pas forcé, il est comme ça miron !!
Les progénitures diverses des élus de la ville ont du tous apprendre à nager au cercle des nageurs…..mais le commun des mortels, contribuable et citoyen n’y a pas forcément accès facilement !!
C’est un ELU DE LA REPUBLIQUE ! Bon sang ça veut dire quoi pour lui ??
Il a des comptes à rendre ! qu’il se taise au moins.
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Bravo Julien Vinzent pour ce bel article, comme toujours.
Et bravo aussi à M. Miron pour cette belle formule ô combien polyvalente et réutilisable. Non, tout le monde ne saura pas nager, car tout le monde n’en a pas envie; tout le monde ne trouvera pas du travail, car tout le monde n’en a pas envie, etc. etc. Et bien sûr, tout le monde n’aura pas des élus compétents, car malheureusement tout le monde n’en a pas envie.
Enfin… tant mieux si la métropole se décide à prendre progressivement les choses en main, elle ne pourra de toute façon pas mettre plus de mauvaise volonté que la mairie dans ce dossier.
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Voilà qui est bien dit.
Je suis globalement en phase avec cette vision . Cependant vu hors de Marseille la prise en main de ce dossier peut faire craindre une généralisation de la gestion phocéenne des piscines à l’ensemble du territoire.
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