Un futur politique pour Marseille

Un futur politique pour Marseille

On retiendra quatre thèmes qui nous semblent devoir orienter une politique urbaine propre à la ville de Marseille, à laquelle les citoyens de cette ville pourraient adhérer.

Une véritable politique de l’environnement

C’est d’abord l’espace qui donne sa forme à une ville qui fonde la politique urbaine. Ce que l’on appelle pompeusement l’environnement, par une sorte de dénégation de l’idée même d’espace, c’est l’aménagement de l’espace – en l’occurrence l’espace urbain. L’aménagement de Marseille devrait faire partie des éléments prioritaires d’un projet politique pour cette ville. Un tel projet, pour que cette ville redevienne une ville dans laquelle on ait envie d’habiter et dans laquelle on ait plaisir à vivre, devrait se fonder sur la recherche de la fin des pollutions et des nuisances – à commencer par la fin des pollutions sonores et atmosphériques causés par l’excès de la présence de la voiture dans cette ville. Une politique de l’environnement devrait se fonder, d’abord, sur une politique de développement des transports en commun et d’incitation à leur usage.

Mais une politique de l’environnement s’inscrit aussi dans l’aménagement d’espaces verts, de parcs, de jardins, qui, à la fois, permettent aux habitants de la ville de la redécouvrir en y marchant avec plaisir et lui donnent des sortes de poumons urbains lui permettant de s’aérer pour pouvoir respirer. Le centre de cette ville, en particulier, ne peut plus respirer, tellement il est pollué par les circulations sans ordre ni logique, par les bruits et les odeurs qui empêchent qu’on puisse y respirer, par l’absence d’espaces ouverts et aérés. Retrouvons donc une politique de l’environnement qui façonne l’espace urbain, à Marseille.

Une politique de l’urbanisme et du logement

Une telle politique de l’environnement passe par le retour d’une politique rationnelle de la construction et du logement. Sans doute les pouvoirs urbains devraient-ils retrouver un peu d’autorité en particulier vis-à-vis des promoteurs et des acteurs du marché de l’immobilier, de façon que les projets de construction soient enfin pensés en lien avec une véritable raison de l’espace au lieu d’être livrés, comme ils le sont trop souvent, à la folie du marché immobilier.

C’est aussi de cette manière que la politique du logement et du l’urbanisme peut parvenir à décloisonner l’espace marseillais, à faire en sorte que les quartiers périphériques – car, à Marseille, ce que l’on appelle, ailleurs, les banlieues sont dans l’espace politique de la ville – soient pleinement intégrés à l’espace urbain, cessent d’être ce qu’ils sont devenus : de véritables ghettos, où, encore récemment,  un collège a été frappé par des actes de violence, absurdes comme tous les actes de violence.

Enfin, une politique de l’urbanisme devrait fonder un projet rationnel pour le développement futur de la ville et de la métropole pour les années à venir. Une véritable politique urbaine ne s’imagine pas pour le court terme, mais se fonde sur une vision à long terme de l’avenir de l’espace. Dans ces conditions, sans doute serait-il utile d’imaginer, autour de l’activité de l’Agence d’urbanisme, un retour du débat public sur la prévision de l’avenir de la métropole associant au débat public les habitats, les acteurs politiques, les associations, l’ensemble de ceux qui sont une parole à tenir pour un projet urbain pleinement démocratique.

Une politique de la culture

C’est par la culture que la ville s’exprime, qu’elle est pleinement habitée par ceux qui y vivent. Le rôle de la politique culturelle de la ville n saurait donc se limiter à l’offre des spectacles et des manifestations culturelles, encore qu’elle est importante et qu’elle est réellement insuffisante pour une ville qui fut « ville européenne de la culture ». Et ne nous leurrons pas : devenir une ville européenne du sport ne saurait faire revenir à la culture dans cette ville et constitue encore un déni de l’importance de la vie culturelle dans une ville de cette importance. Le retour d’une politique de la culture devrait, en particulier, devrait se marquer par quatre axes majeurs. Le premier est le développement d’une politique du live dans toute la ville : dans une ville comme Lyon, par exemple, il y a une bibliothèque municipale par arrondissement, alors qu’à Marseille, il n’y a qu’une bibliothèque municipale, celle de l’Alcazar, belle et importante, certes, mais insuffisante et, surtout, trop éloignée des quartiers périphériques de cette ville. Le second est une politique du cinéma : comment se fait-il qu’il n’y ait qu’une offre aussi réduite de salles de cinéma de qualité dans cette ville, et, par conséquent, une offre aussi réduite de films, et, notamment, de films contemporains ? Un troisième axe de la culture urbaine devrait être l’encouragement à une politique de la présence de l’art dans la ville – qu’il s’agisse d’encourager l’installation de galeries ou d’expositions d’œuvres aux regards de tous, ou de l’incitation au développement des nouvelles formes de l’art urbain, en particulier de « l’art de la rue », du street art. Enfin, un quatrième axe de la politique culturelle de cette ville pourrait être une politique de la mer. Nous avions évoqué, dans une précédente chronique, le fait que cette ville tourne le dos à la mer, alors qu’au contraire, sous de multiples formes, la culture urbaine devrait, au contraire, profiter de son site exceptionnel pour faire de nouveau parler la mer dans sa culture et la donner à voir sous toutes les formes qu’elle peut trouver.