La Ville veut confier les réfectoires des écoles à des prestataires privés
Lors du prochain conseil municipal, la Ville présentera le nouveau marché de délégation de service public des cantines scolaires de 2018 à 2025. La municipalité prévoit de confier la rénovation de certains réfectoires au futur prestataire privé. Et maintient un certain flou sur l'organisation du service à la cantine.
L'école Delphes (6e arrondissement), qui a bénéficié de 230 000 euros de travaux en 2015.
Il s’agit pour l’heure d’une option mais la Ville a pour projet de confier les réfectoires des écoles marseillaises aux prestataires privés qui ont la lourde charge de nourrir les écoliers marseillais. “Il est envisagé d’étendre le périmètre délégué aux réfectoires”. Le prochain conseil municipal, le 5 décembre prochain doit examiner un rapport qui présente le renouvellement de la délégation de service public de la restauration scolaire de 2018 à 2025. L’instance paritaire qui réunit les représentants de l’administration et ceux des syndicats doit se prononcer ce jeudi sur ce projet dont nous avons pu consulter les grandes lignes.
Dans sa philosophie, le rapport poursuit la politique adoptée en 1993 sous la mandature de Robert Vigouroux et reconduite depuis à chaque échéance : c’est un prestataire privé qui a la charge de confectionner les repas. Seul vrai changement envisagé, le retour d’une délégation en deux lots, l’un “centre-Est” (1er au 12e arrondissement), l’autre au Nord (13e au 16e). Mais la véritable nouveauté se glisse dans les moyens mis à disposition du ou des délégataires par la Ville de Marseille.
“Élargir le périmètre aux locaux affectés au service du repas”
En plus de la cuisine centrale de Pont-de-Vivaux, des 37 “satellites, offices, annexes et réserves” qui permettent les derniers préparatifs et le “réchauffement des barquettes”, on trouve dans cette liste de moyens à déléguer “les réfectoires affectés au service de restauration”. Et le rapport précise : “Cette gestion déléguée des réfectoires constituerait une nouveauté par rapport au contrat en cours, si cette option est retenue” par les candidats.
Plus loin cette option est détaillée. Il s’agit bien “d’élargir ce périmètre aux locaux affectés au service du repas”. La justification d’un tel élargissement est de “maîtriser certaines difficultés” liées au “contexte actuel de saturation d’un certain nombre de réfectoires”. En effet, les 444 écoles marseillaises n’ont pas toutes, loin s’en faut, un réfectoire adapté. “Dans les maternelles notamment, il est fréquent que le personnel municipal soit obligé de faire plusieurs services et les enfants retournent parfois en classe directement après manger, note-t-on à la SNUTER-FSU. Sans compter que dans les maternelles notamment, le bruit peut monter jusqu’à 85 décibels ce qui n’est pas supportable pour les enfants, ni pour les agents.”
Travaux de réhabilitation
Les cantines sont saturées. La Ville constate ainsi des pics réguliers de consommation à “52 000 repas” qu’elle explique par “la diversification de l’offre alimentaire proposée chaque jour aux convives”. Le futur prestataire pourrait donc, s’il choisit d’ajouter cette option dans son offre, se voir transférer “la question des travaux de réhabilitation des réfectoires saturés”.
“Un planning ferme de réalisation des travaux proposés, et validés par la collectivité, lors de la réponse à l’appel d’offres permettra, si cette option est retenue, une bonne visibilité de la résolution de ce problème”.
Extrait de la présentation du projet de DSP
Depuis la longue polémique concernant l’état des écoles marseillaises, il est de notoriété publique que la Ville a du mal à gérer l’entretien et le renouvellement du parc parfois très ancien des écoles. Elle envisage d’ailleurs de recourir à une forme nouvelle de partenariat public-privé pour rénover les 52 écoles dites GEEP, bâtiment à structure métallique, dont la démolition s’impose.
Dans le cas présent, le recours au privé doit permettre de réaliser de véritables travaux d’agrandissement des réfectoires les plus exigus. Pour les autres, l’intervention du futur délégataire se limitera à “la maintenance et l’entretien courant”. Les gros travaux ou le coup de pinceau rafraîchissant pourrait donc être donné par Elior, Avenance ou Sodexo, actuel titulaire du contrat.
Quelle impact pour les agents de la Ville ?
Où s’arrêtera cette extension du privé dans les cantines ? Le projet est flou. Au titre des avantages qui doivent permettre “une amélioration du service”, on peut lire : “Rendre cohérent le périmètre de la gestion des cantines en établissant un ensemble homogène qui irait de la réception des repas, dans le satellite, au service de ce repas, dans le réfectoire”. Or, aujourd’hui, le service du repas fait partie des missions des agents publics dont il est bien précisé plus loin que “les conditions de travail (…) ne seront pas impactées”.
À plusieurs reprises, le texte soumis à la sagacité des représentants syndicaux réaffirme que cette option offerte aux candidats à la délégation de service public ne modifie en rien les missions confiées aux agents municipaux : “Les différentes interventions dans les réfectoires (service, surveillance, nettoyage, etc) seront toujours assurées par le personnel municipal”.
“Nous voterons contre par principe, parce que nous sommes opposés à la délégation de service public, affirme Jean-Pierre Zanlucca, secrétaire général de la SDU-FSU. Concernant l’option proposée, nous n’avons pas d’opposition à condition que cela ne remette pas en cause les attributions des agents. Au contraire, cela peut permettre de faciliter leurs missions surtout pour celles qui sont obligées de faire plusieurs services.” Cette position sera suivie par l’ensemble de l’intersyndicale FSU-CGT-UNSA.
“Ce n’est plus possible de continuer comme ça”
Même son de cloche du côté de Force ouvrière qui refuse également le principe de la délégation de service public. “Très sincèrement, le rapport est flou concernant cette option, constate Patrick Rué, secrétaire général du syndicat des territoriaux. D’un côté, les réfectoires ne sont plus adaptées au nombre d’élèves qui y mangent et ce n’est plus possible de continuer comme ça, de l’autre, on ne comprend pas très bien comment ça va se passer avec les agents.” Le document précise que la Ville se réserve la possibilité de ne pas donner suite à cette option si elle n’est pas satisfaite par les réponses des candidats sur le plan “financier, budgétaire, juridique, technique et opérationnel”.
D’après nos informations, lors de ce comité technique, la majorité des représentants syndicaux qui siègent dans le collège des salariés voteront contre cette nouvelle DSP. Seule inconnue, une possible abstention de l’élu de la liste CFE-CGC-CFTC, qui permettrait une validation par l’instance paritaire. “S’il vote contre, alors la Ville est tenue d’organiser une nouvelle réunion du comité dans les huit jours”, explique Patrick Rué. Joint par nos soins, Ludovic Bedrossian qui siège pour la CFTC, refuse de donner sa position avant le vote.
Quant à l’opposition municipale, elle a eu vent du projet lors de la dernière séance de la commission consultative des services publics locaux, saisie pour avis sur cette question. “Le débat a duré 30 secondes, constate Stéphane Mari qui y siège pour le parti socialiste. Nous avons évoqué le recours à la délégation de service public mais il n’y a pas eu de débat sur cette option concernant les réfectoires.” Quant à la Ville, elle ne souhaite pas communiquer à ce sujet avant le traditionnel repas de presse précédant le conseil municipal.
Commentaires
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Les ėlus devraient bénéficier eux aussi d’une délégation de service public. Ils sont acculés et sans argent ni politique sociale, ils ne connaissent plus que la DSP. Pourquoi ailleurs dans les grandes villes, ça ne se passe pas comme ça et ici on ne sait rien faire !
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On se demande parfois : mais jusqu’où vont-ils aller ????
Oui je serais assez OK pour une DSP afin que nos élus (jeunes dynamiques et compétents) se reposent un peu.
Et pourquoi pas un PPP -ca fonctionne si bien !- pour les réunions municipales, les décisions à prendre…la vie en général ??? Nos “vieux élus” devraient y penser.
Que les employés municipaux se méfient un peu quand même….Fillon cherche 500 000 fonctionnaires à supprimer…..
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Une petite PPP pour rénover les élus ? J’ai aussi eu cette idée saugrenue à la lecture de cet article…
Comme quoi le désespoir est un mauvais conseiller.
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C’est un cas d’école de verrouillage de marché public.
Seules les plus grosses entreprises de restauration collective (dont Sodexo, Avenance, Elior que vous mentionnez) proposent la construction et l’entretien de locaux.
L’élargissement du périmètre de la délégation aurait donc pour effet collatéral de limiter le nombre des entreprises capables de répondre à l’appel d’offres, et une fois que ce sera fait, il sera très difficile de revenir en arrière.
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Vous avez deux mois pour dénoncer la déliberation qui, je ne sais plus, fait l’objet du contrôle de légalité.
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Je confirme que les cantines scolaires sont saturées : tous les jours il y a entre 5 et 6 services pour les enfants de l’élémentaire, soit 8minutes pour “déjeuner”. Ils sont 240 inscrits pour 50 places assises.
L’école actuelle déjà largement saturée jouxte 3 programmes immobiliers d’appartements neufs, soit à minima 100 familles dans les 2 ans.
À ce jour aucune projet d’aménagement scolaire n’est prévu…
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Bah, on n’à qu’à faire une DSP ou un PPP pour confier la scolarité de nos mômes aux promoteurs immobiliers, afin d’en faire de la main d’oeuvre docile…
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Mais çà coûterait beaucoup plus cher pour des prestations médiocres. Pourquoi ne pa faire comme à Bordeaux où il y a une cuisine municipale centrale pour toutes les écoles ? Celà pour plus de 26000 écoliers ! Quand on veut, on peut.
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PPP et DSP s’accumulent et on finit par se demander s’il s’agit de déléguer pour mieux faire ou pour pouvoir rejeter publiquement la faute sur le vilain prestataire tout en lui versant son dû ?
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