Sabrina Hout, première élue condamnée pour discrimination lors d’un mariage gay
Mardi 29 septembre, Sabrina Hout, ex adjointe à la mairie PS du 8e secteur a été condamnée pour discrimination après avoir entaché de nullité un mariage entre deux femmes le 16 août 2014. Elle écope notamment de cinq mois de prison avec sursis.
Sabrina Hout, première élue condamnée pour discrimination lors d’un mariage gay
Ancienne adjointe de la mairie socialiste des 15/16, Sabrina Hout est la première élue condamnée pour discrimination en raison de l’orientation sexuelle. Elle écope de cinq mois de prison avec sursis et 1200 euros de dommages et intérêts à verser à chaque conjointe. En août 2014, elle avait refusé de marier ces deux femmes et mis en place un subterfuge pour éviter de le faire. Sa manœuvre avait conduit à l’annulation du mariage par le tribunal de grande instance de Marseille.
C’est bien cette discrimination que le tribunal condamne en allant plus loin que les réquisitions de la procureure, lors du procès le 1er septembre dernier. Plus encore, c’est pour n’avoir pas su mettre ses opinions de côté face à ses obligations d’élue de la République qu’elle est aujourd’hui condamnée, non pour l’homophobie que certains y ont vu. Ce que la procureure Marie-Ange Régnier appellera lors de son réquisitoire “un conflit interne de loyauté envers elle-même”.
Pour les deux victimes, ce devait être le plus beau jour de leur vie. Il restera assurément l’un des plus marquants. Le 16 août 2014, deux femmes, l’une fonctionnaire de police, l’autre agent à la Ville de Marseille viennent célébrer leur union, après douze ans de vie commune. Ce jour là, Sabrina Hout, ex adjointe à la mairie PS du 15/16e fera tout pour éviter de jouer son rôle d’officier d’État civil. Prétextant un malaise, l’élue demande à un conseiller d’arrondissement non habilité d’officier à sa place, dispose le chevalet avec le nom d’un autre élu absent ce jour-là et falsifie le registre de mariage. Les deux victimes, soutenues par les associations SOS homophobie et Mousse assignent directement Sabrina Hout devant le tribunal correctionnel pour discrimination en raison de leur orientation sexuelle.
Première entorse à la loi
L’affaire, aux dires de la procureur, présente une valeur symbolique qui justifie une importante couverture médiatique : elle est la première entorse à la loi promulguée le 17 mai 2013 sur les 17 500 mariages gays prononcés. Lors de l’audience, le président Fabrice Castoldi donnait le ton. Pour lui, cette affaire “vient poser la question de l’égalité du service publique mais surtout de la neutralité au centre de la conception de l’état républicain”. Cela est réaffirmé par le tribunal ce mardi, jour du délibéré : ” Il est impératif qu’aucun citoyen, quel que soit notamment son âge, son handicap, sa race, ses opinions politiques et naturellement son orientation et identité sexuelle, ne doute ou n’ait à douter de la neutralité du service public et de la loyauté républicaine des élus et des fonctionnaires”.
La défense de la prévenue qui a consisté a invoquer “un mauvais concours de circonstances” n’a pas convaincu. Dans une argumentation maladroite, faite de revirements constants, elle réfutait à la barre avoir agi par “convictions religieuses” ou sous pression familiale, en dépit du témoignage de Samia Ghali, maire de secteur. Tantôt donc Sabrina Hout taxait les témoins de menteurs, tantôt elle présentait ses excuses, expliquant piteusement qu’elle regrettait et n’avait pas “d’aversion particulière pour les personnes de la communauté homosexuelle”. Après avoir admis une réticence à marier des couples du même sexe.
Cette même ambiguïté flottait sur le tribunal tandis que ses témoins de moralité défilaient à la barre. Parmi eux, Hervé Jourdan, chef d’entreprise qui se dit lui-même homosexuel et ami de Sabrina Hout. Or il s’avère que cet homme est un militant engagé contre le mariage pour tous que Marsactu avait rencontré lors d’un reportage sur les militants de la Manif pour tous… Curieuse façon de se défendre de toute opposition de principe au mariage homosexuel.
“Posture de victimisation”
Les avocats des parties civiles, tel Me Chaudon pour SOS homophobie lui ont reproché d’être “fluctuante”. Ce dernier a estimé que “ceux qui vous ont traitée de djihadiste et d’homophobe sont des imbéciles. Mais ce que vous avez fait là est gravissime pour l’État civil. Mes clientes ont été victimes de discrimination et ça, c’est irréductible”. La procureure Marie-Ange Regnier a poursuivi son réquisitoire sur le même ton, ajoutant que la prévenue “n’assume pas ses responsabilités car elle ne reconnaît pas les stratagèmes mis en place. Des décisions qui ne manquent pas de surprendre venant de quelqu’un qui a accepté d’exercer la fonction d’élue de la République”. Rendant son délibéré dans le sens des réquisitions, le tribunal a estimé que Sabrina Hout adoptait une “posture de victimisation” et “un positionnement intellectuel fuyant”, éléments qui ont entaché de doutes sa bonne foi.
Face à l’accusation, le ténor du barreau Me Lhote s’est excusé à la place de sa cliente, qui, l’assurait-il, “n’est pas une grenouille de bénitier des mosquées », mais « une honnête femme” prise “dans un dossier fait de maladresses et d’ignorance ». Le fait qu’il rappelle la confusion de François Hollande avec sa fameuse “clause de conscience” avec possibilité de retrait des élus puis son revirement sur la question n’a pas suffit à disculper Sabrina Hout. Après l’audience, elle était venue en personne dire aux deux victimes combien elle était “sincèrement désolée”. Saisissant la main tendue, l’une d’elle lui avait lancé : “On n’a toujours pas compris pourquoi vous avez fait ça.”
Vous avez un compte ?
Mot de passe oublié ?Ajouter un compte Facebook ?
Nouveau sur Marsactu ?
S'inscrire
Commentaires
0 commentaire(s)
L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.