Logement, orientations budgétaires et dépollution : les dossiers chauds du conseil municipal
Conviés à un conseil municipal dont l'ordre du jour est particulièrement riche, les élus marseillais débattront notamment de questions de logement, mais aussi d'enjeux économiques et environnementaux. Mais c'est sans doute une mesure qui ne figure pas dans l'ordre du jour qui pourrait enflammer les débats.
Le conseil municipal de Marseille. (Photo : Emilio Guzman)
Ce vendredi 20 octobre, les élus marseillais sont conviés à un conseil municipal qui s’annonce long et riche. Quelque 180 rapports sont inscrits à l’ordre du jour. Un menu bien dodu qui s’explique en partie, note Joël Canicave adjoint au maire (PS) chargé des finances, par le fait qu’il s’agit de “l’avant-dernière séance de l’année et la dernière lors de laquelle on peut voter des subventions”. En dehors des subsides municipaux nécessaires à la vie associative, de nombreux autres points seront discutés.
Et, même si elle ne figure pas parmi les délibérations du jour, la création d’une halte soin addiction ou salle de consommation de drogue à moindre risque sur le boulevard de la Libération, viendra nécessairement s’inviter dans les discussions. Débat notamment alimenté par la droite qui – oublieuse du fait que l’équipe Gaudin a par le passé ambitionné d’ouvrir une telle salle – se montre désormais opposée à cette initiative.
D’autres dossiers promettent aussi de voir les élus de la majorité Printemps marseillais, de l’opposition divers droite et de l’extrême-droite, croiser le fer. Les orientations budgétaires seront l’occasion d’un désormais rituel et zélé décorticage des lignes budgétaires par Pierre Robin (LR). La construction d’une piscine à Félix-Pyat, l’élaboration d’un plan guide pour le littoral sud, l’aménagement d’un véritable espace de baignade au Mucem ou encore le vaste volet consacré au logement – la construction de logements sociaux mais pas seulement – vont aussi occuper une grande part des argumentations durant la séance.
Panne informatique à la Ville : pas de direct du conseil sur MarsactuLa Ville de Marseille a annoncé jeudi soir que ses services font l’objet d’un important “incident informatique” touchant tous ses services, y compris les mairies de secteurs. La diffusion vidéo en direct du conseil municipal ne sera pas possible, mais une captation sera mise en ligne a posteriori. En revanche, en l’absence de vidéo et de connexion wifi dans l’hémicycle, l’équipe de Marsactu sera dans l’impossibilité de réaliser son traditionnel direct du conseil ce vendredi.
Un “paquet logement” en ouverture
Un an après les états généraux du logement, la majorité municipale inscrit en tête de séance neuf délibérations, pour afficher une politique globale sur le sujet. Entre temps, la faiblesse du bilan de construction de logements sociaux a fait planer le doute sur une sanction de l’État (lire notre décryptage).
Mais avant de dérouler l’ordre du jour, le maire devra passer par la présentation du rapport de la chambre régionale des comptes sur la gestion de Marseille habitat, son bailleur social, entre 2016 et 2021. Une période à cheval entre deux mandatures, avec au milieu une mise en examen dans le drame de la rue d’Aubagne, qui n’invitera peut-être pas la droite à la polémique.
Locations touristiques : un observatoire et des contrôles
Accusées de saper l’effort de construction en retirant des logements du marché, les locations touristiques, comme Airbnb ou Abritel, constituent un des volets du paquet. Après les évolutions réglementaires des dernières années – numéro d’enregistrement unique et durcissement des conversions en location à l’année -, les mesures sont cependant plus floues. Un “observatoire” est annoncé, sans plus de détail, ainsi qu’une “brigade de contrôle”, sans mention d’effectifs. Concrètement, il s’agit de suivre et d’amplifier les premières démarches évoquées cet été par l’adjoint au logement. Près de 1500 annonces illégales avaient été repérées, sur 11 800, et leur suppression a été demandée. De son côté les alliés écologistes et pluriels signalent qu’aucune affectation de personnel n’est associée à la brigade qui devrait contrôler les locations.
Habitat indigne : les inspecteurs de la Ville pourront évaluer la décence d’un logement
Lourdement critiqué par l’État il y a quelques années, le service communal d’hygiène et de santé (SCHS) regagne des galons. Chargé de veiller à la salubrité des logements, il se voit confier une mission supplémentaire par la CAF. Les inspecteurs de la Ville pourront désormais évaluer la “décence” des lieux. En cas de non-respect, ils transmettront à la CAF qui suspendra le versement des allocations au propriétaire, le temps que les travaux soient réalisés. Un peu plus loin dans le conseil, la Ville attribue 200 000 euros de subventions à cinq associations d’accès aux droits qui accompagneront les locataires, notamment vers cette procédure, rapide et souvent efficace pour faire réagir les propriétaires.
Des orientations budgétaires inchangées
Une formalité, mais qui doit être faite dans les formes. Face à des “orientations inchangées”, l’adjoint aux finances Joël Canicave minimise l’enjeu du rapport présenté ce vendredi, renvoyant “le vrai débat” au vote du budget 2024, en décembre. En avril, la justice a pourtant rappelé l’importance de ce document de quelques dizaines de pages pour éclairer les élus et les citoyens sur les grandes lignes de l’année à venir. Jugé incomplet, en l’absence notamment de la mention de la hausse substantielle de la taxe foncière, le budget 2022 avait été annulé. À la lecture du millésime 2024, il manque encore quelques éléments clés exigés par la loi, tels que le programme des investissements à venir.
On y trouve cependant quelques éléments saillants politiquement, tels qu’une hausse des effectifs (+290 par rapport à décembre 2022) après des années de stagnation. À défaut de détails sur les dépenses d’investissement, on y constate aussi l’extinction presque consommée du plan d’aide du conseil départemental, qui n’a apporté que 14 millions d’euros en 2023. “Ce constat apporte une acuité certaine et renforcée à la demande répétée de la Ville de s’engager vers la signature d’une nouvelle convention”, commente l’équipe municipale. Idem pour la région, dont le président Renaud Muselier avait promis, en 2020, un “contrat de centralité” à 42 millions. Entre temps, Aix a décroché 20 millions d’euros à ce titre et c’est au tour de la métropole Aix-Marseille Provence de négocier. Un problème d’orientations budgétaires, sûrement.
Une feuille de route économique pour que… “Marseille accélère”
L’adjoint à l’économie Laurent Lhardit l’espère : “C’est un sujet sur lequel on devrait pouvoir éviter les batailles politiciennes, on peut partager les mêmes objectifs.” La preuve, la feuille de route économique 2023-2030 qu’il présente fait même sienne un mantra de l’ère Gaudin : “Marseille accélère”. Rappelant que “pour atteindre ce qu’on appelle le plein emploi, il faudrait 60 000 emplois en plus” à Marseille, l’élu liste les axes prioritaires où la métropole et la région ont les principaux leviers : foncier économique, économie maritime et portuaire, cinéma, tourisme durable, BTP-génie civil…
Câbles, data centers et paradoxes
La délibération 27 a trait aux data centers, sites de stockage de données numériques, et aux câbles sous-marins qui transportent ces données. À Marseille, le nombre de data centers devrait passer de cinq à dix sur la zone portuaire dans les années à venir et l’installation des câbles afférents augmenter dans les mêmes proportions. Le rapport en question vise donc à encadrer et planifier ces implantations. À ce sujet, la majorité municipale nuance son enthousiasme. Si les data centers peuvent “renforcer la connectivité et la souveraineté des territoires qui les accueillent, et contribuer ainsi à l’essor de services et de domaines d’activités liés aux transformations numériques”, ils ont aussi un impact environnemental “très lourd” et génèrent peu d’emplois localement, note le rapport. De surcroît les data centers locaux sont très gourmands en eau, pour refroidir les circuits, mais la chaleur qu’ils produisent à Marseille n’est pas valorisée, “contrairement à d’autres territoires en France”.
Autant de paradoxes pour lesquels, la Ville a demandé par écrit à la métropole “d’engager une démarche concertée de planification” sur ces installations. Le courrier étant, dit la municipalité, resté lettre morte, elle, choisit donc de se doter elle-même d’un dispositif de planification et de régulation.
Des scories et des millions
Au printemps, Marsactu avait révélé le triplement du budget de la dépollution du littoral sud, miné par l’héritage des usines du XIXe siècle, notamment des fonderies de plomb. Le temps est désormais venu pour la Ville de Marseille, comme ses autres partenaires, d’éponger la hausse pour concrétiser ce dossier marqué par les cahots administratifs et politiques. De Saména à Callelongue, il en coûtera 14 millions d’euros, dont deux financés par la commune, pour traiter les vingt sites les plus problématiques. Les travaux pourraient démarrer à la rentrée 2024.
Bientôt un bassin de baignade au Mucem…
L’annonce avait un temps été faite pour l’été 2023, mais n’avait pu voir le jour pour des raisons de sécurité. Mais cette fois-ci le projet d’offrir à la baignade, pendant les trois mois d’été, le bassin sis dans la darse Est de l’esplanade du J4 – soit au pied du Mucem – devient concret. Ce projet “destiné à tous les usagers consiste à aménager et équiper cette darse, ainsi que ses terre-pleins attenants, pour l’ouvrir gratuitement à la baignade durant les trois mois d’été dans le respect des réglementations en vigueur. Il s’agira notamment de mettre en place un dispositif de surveillance de baignade, des équipements de sécurisation et d’accessibilité pour tout public, ainsi que les services publics permettant d’accueillir les usagers dans des conditions de confort optimales”, décrit la délibération numéro 51.
La métropole, propriétaire de l’emprise foncière a donné son accord. Cette expérimentation, testée dans un premier temps durant les trois prochaines saisons balnéaires, nécessite toutefois des travaux. D’ici à 2026, la municipalité devrait dépenser 1,8 million d’euros pour notamment sécuriser le site, aménager et acquérir du mobilier pour les espaces en question, s’assurer de la bonne qualité des eaux des baignades…
… et une future piscine à Félix-Pyat
Nage, toujours, mais en eau chlorée cette fois. Le 2e secteur est chroniquement sous-doté en équipements sportifs en général et en piscine en particulier, puisqu’il n’en compte aucune. Pour y implanter un nouvel équipement doté de deux bassins, la ville qui hésitait entre deux implantations choisit finalement Félix-Pyat pour sa construction, comme Marsactu vous l’explique ici.
littoral : cap au sud !
Après avoir lancé des études pour une amélioration de l’accessibilité sur le littoral nord, la Ville regarde du côté sud, de la future marina olympique au port de la Pointe rouge. Cette délibération qui cadre l’élaboration d’un “plan guide d’aménagement et de développement durable” du littoral Sud, note qu’à cet endroit de la ville : “l’aménagement urbain [s’est] organisé à échelles variées, au fil du temps et des besoins, de façon hétéroclite et disparate donnant lieu aujourd’hui à un espace hétérogène”.
Surfréquentation, congestion automobile et faiblesse des transports en commun, offre de services plus adaptée à l’accueil de tous les publics et situation environnementale préoccupante appellent donc à “élaborer sans attendre un projet pour le site dans son ensemble”. Ce plan aura pour ambition de donner une cohérence et une identité à cette portion littorale, tout en cherchant à renforcer sa dynamique économique, à adapter le trait de côte aux effets du changement climatique et à préserver la présence de la nature en ville. Pas une équation facile en somme.
Avec Jean-Marie Leforestier
Encore des dossiers fondamentaux. Nos élus de tout bords seront-ils à la hauteur des enjeux ? Peut-on compter sur eux ?
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“Après avoir lancé des études pour une amélioration de l’accessibilité sur le littoral nord, la Ville regarde du côté sud”. Et elles ont donné quoi, ces études sur le littoral nord ?
Quand on veut faire de la participation citoyenne, ça se publie, ce genre de choses … Je crains que le résultat soit dans la ligne “on change rien puisque ça marche”. Alors que ça marche, certes, mais ça pourrait marcher beaucoup mieux.
On verra ce que ça va donner au Sud.
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