Le spectre du PPP des écoles fait faire une volte-face à la majorité
La Ville a modifié à la dernière minute une délibération portant sur la réhabilitation d'écoles des quartiers Nord. En cause, le type de marché choisi qui ressemblerait trop à une sorte de partenariat public privé.
L'école Saint-André la Castellane. (Image LC)
Bouh ! Le revoilà ! L’affreux PPP des écoles a fait un retour éclair au sein des délibérations du conseil municipal. Il apparaissait sous la forme d’un de ses semblables : le marché global de performance. Apparenté au partenariat public-privé (PPP), ce dispositif de marchés publics permet de confier à une seule entreprise la construction et l’entretien d’un équipement. Avec le risque de faire la part belle, selon ses détracteurs, aux grands groupes du BTP.
Mardi 30 mars, lors d’une conférence de presse, l’un des adjoints aux écoles, Pierre-Marie Ganozzi défendait le choix de ce dispositif : “Il s’agit du premier étage de la fusée du plan école d’avenir. Il nous fallait parvenir à aller très vite avec un choix des entreprises pendant l’année 2021, pour démarrer les travaux fin 2022 et une réhabilitation achevée fin 2024 ou tout début 2025″. Le lendemain, il n’était plus à l’ordre du jour.
Onze écoles dans le viseurLes cinq groupes scolaires choisis (11 écoles) comme premier étape du “plan école d’avenir” sont des écoles dites GEEP, la marque associée au procédé de construction en charpentes métalliques, resté tristement dans les mémoires après l’incendie du collège Pailleron à Paris. Ces écoles connues pour leurs piètres qualités d’isolation et de résistance au feu étaient au cœur du projet de PPP porté par la précédente majorité. Situées dans le périmètre de projets de rénovation urbaine, elles peuvent bénéficier de financement de l’agence nationale chargée de ces questions.
Une nouvelle version de la même délibération apparaît désormais avec la mention “rectificatif valant substitution”, débarrassée des références au type de marché qui sera mis en œuvre. Entretemps, quelques cloches ont sonné aux alentours de l’hôtel de ville, déclenchant une certaine alarme politique. La lutte contre le PPP est un des combats fondateurs de la dynamique d’union de la gauche qui a porté au pouvoir l’actuelle majorité. Il y a un peu plus d’un an en effet, les opposants au PPP des écoles fêtaient leur victoire judiciaire définitive. Après un âpre combat, politiques, syndicalistes, parents d’élèves et professionnels du bâtiment obtenaient que le projet soit enterré.
La colère des alliés d’hier
Parmi les contempteurs du PPP figuraient à l’époque Pierre-Marie Ganozzi, alors syndicaliste FSU, Benoît Payan, président du groupe socialiste et Jean-Marc Coppola, pour les communistes. À leur côté, Maxime Repaux, le président du syndicat des architectes, portait la parole des professionnels du bâtiment locaux qui estimaient être exclus de fait de ce type de procédure.
Depuis ses bureaux de la rue de la Guirlande à quelques mètres à peine du château municipal, il a été saisi de stupeur quand il a appris le recours à un marché global de performance par la mairie. Il s’oppose régulièrement à ce mécanisme. En octobre dernier, il signait un courrier commun adressé au maire d’Eyguières, Henri Pons pour lui demander de renoncer à un marché global de performance pour la construction d’une maison de santé. “Une véritable catastrophe pour les entreprises locales”, écrivent alors les représentants des mêmes organisations professionnelles qui luttaient contre le PPP marseillais. Cette fois, il est donc encore plus catastrophé de voir ses anciens camarades de lutte pencher pour ce cousin du PPP, même raccourci à cinq ans contre trente pour l’époque Gaudin.
Vitesse et précipitation
Cette accélération subite a également beaucoup à voir avec le carburant que le Printemps marseillais veut mettre dans son moteur. Il s’agit de sauter dans le train du plan de relance gouvernemental expressément fléché sur les quartiers prioritaires de la politique de la ville, avec une liste de courses attendue pour la fin avril. Ces financements extérieurs correspondent à 90 % des 85 millions que vont coûter ces réhabilitations. “En ratant le plan de relance, nous n’aurions pu espérer que 33% de subventions”, défend Pierre-Marie Ganozzi.
L’argumentaire n’a pas l’heur de satisfaire Maxime Repaux qui y voit une dépense inutile d’argent public. “Avec ces 85 millions on nous annonce une construction à 8500 euros le mètre carré, alors que nous sommes persuadés qu’on peut faire des écoles durables pour 2500 euros le mètre carré, soit 35 millions en tout pour ces cinq groupes scolaires”, assure-t-il.
Quant à la vitesse de traitement, l’architecte est persuadé qu’elle serait la même en optant pour une maîtrise d’ouvrage publique “avec l’avantage de laisser leur chance aux professionnels locaux, ce que ne permet pas le marché global de performance”, affirme-t-il encore avant d’ajouter, perfide : “Au final, ce qui prend souvent le plus de temps, c’est le “bon pour accord” des élus.”
Lettre au maire et coup de fil à la maire adjointe
Maxime Repaux s’est donc fendu d’un courrier à Benoît Payan et a également appelé dans la soirée de mercredi, Samia Ghali. Nul ne sait quel canal s’est révélé le plus efficace, mais il a donc obtenu gain de cause. Par ailleurs, une sixième école a fait son apparition dans la nouvelle délibération. Il s’agit de l’école Kalliste. Avec les écoles Bouge et Vayssière, elles avaient déjà été sorties du PPP en 2019, alors que celui-ci s’acheminait déjà vers un abandon. “Il n’était pas question que cette école sur laquelle je me suis engagée publiquement ne fasse pas partie des premières écoles rénovées”, explique Samia Ghali, qui cosigne la délibération avec Audrey Gatian et Pierre-Marie Ganozzi.
Elle affirme que sur ce point comme sur le type de marché choisi, elle est sur la même ligne que le maire. Une ligne que l’opposition considère comme passablement brouillée. Pour le groupe LR, Pierre Robin résume ce revirement d’une figure leste : “On ne sort pas un sixième groupe scolaire la veille et sans en mettre le coût… C’est du foutage de gueule !” Le temps du débat permettra de voir comment le maire et sa majorité défendent leur volte-face.
Commentaires
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Surpris de voir que c’est le president des architectes qui oriente les élus, qui passent (un peu) pour des pieds nickelés.
Sans compter le changement de décision par pure idéologie, pour que ça ne ressemble pas trop au ppp de l’ancienne majorité.
On constate d’ailleurs que hors entretien, le coût de rénovation (rénovation lourde pour ne pas faire comme la précédente majorité – démolition, reconstruction) est similaire au ppp.
Nos enfants auront donc perdu 2/3 ans par pure opposition idéologique, avec des nouvelles écoles qui comme les précédentes seront mal entretenues.
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Pierre 12 , quel est votre avis sur l’état des écoles et des colléges marseillais hérités de cette gaudinie qui vous est si chère ?
Je ne vous parle pas bien sûr des écoles jésuites ou bien dominicaines qui ont obtenues les subventions nécéssaires et plus que largement suffisantes.
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Pour info les collèges dépendent du conseil général et lycées de la region
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Le PPP remplacé par le MGP…
Miracle du verbe !
Passer de la reconstruction au simple ripolinage … des dénominations !
Quelle tristesse.
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Hde de mars, bien sûr, mais les résultats sont les mêmes sauf pour les lycées.
Les collèges des quartiers défavorisés sont défavorisés.
Merci Martine qui fait son tri sélectif là aussi.
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