Le patron des thoniers marseillais Mourad Kahoul quitte le navire régional
Le patron des thoniers marseillais Mourad Kahoul quitte le navire régional
Sale temps pour les gros poissons. Après Claude Argy le boss des territoriaux FO, « Lolo » Gilardenghi le taxi, c’est au tour – avec des raisons et une perte d’influence associée différentes – de Mourad Kahoul de céder sa place de président du comité régional des pêches. Les élections se déroulent jeudi, le président étant lui élu en avril, mais « je ne suis plus candidat, j’ai donné », nous annonce-t-il. « J’ai réuni mes collègues, certains disaient « tu nous lâches », ça a été chaud… Mais au bout de 4 heures et demie, les gars m’ont compris et beaucoup me soutiennent. »
Franc-parler ou grande gueule, c’est selon
Le comité local de Marseille, qu’il présidait également, a lui disparu depuis le 1er janvier comme tous ses homologues. « Il est possible de recréer des comités au niveau départemental mais on ne l’a pas fait », précise-t-il. Celui qui s’est retrouvé propulsé en première ligne sur le dossier du thon rouge – et a été élu conseiller municipal en 2001 puis communautaire en 2008 sur les listes Gaudin – compte donc « reprendre [son] bâton de syndicaliste », au niveau local avec les thoniers de la côte méditerranéenne française, mais aussi via Medisamak, l’association euro-méditerranéenne de marins-pêcheurs qu’il préside. « Je serai libre de faire du lobbying, de garder mon franc-parler », explique-t-il.
Un franc-parler ou plutôt pour certains critiques – y compris au sein de la profession – « une grande gueule ». Ceux qui ont vu le classique de Strip Tease « La guerre du thon » ou lu son portrait dans Libé comprendront. Mourad Kahoul ne le cache pas : en interne, on souhaitait mettre le holà à certaines prises de positions. Le départ se ferait donc en partie sous la pression… Lui dénonce la politique communautaire de la pêche à l’image du permis à points ou les accumulations de mesures touchant les petits métiers, comme « les ordinateurs de bord pour les bateaux de moins de 10 mètres ou les radeaux de survie pour les barquettes ».
« Pas assez constructif »
Tout cela étant passé, même si pas forcément de bonne grâce, devant le comité des pêches – organisation très officielle qui représente tous les professionnels du secteur, ostréiculteurs comme pêcheurs de haute mer – lors des négociations avec les ministres, le commissaire et les fonctionnaires européens. « Jouer le jeu, cautionner, il ne faut pas me demander ça alors qu’on assiste à la mort subite de la profession », lâche-t-il. « Mourad est quelqu’un que j’apprécie personnellement, commente Didier Reault, conseiller municipal marseillais délégué à la Mer (UMP). Il a rendu service à la profession des pêcheurs mais, à un moment donné, il a été trop dans la revendication et pas assez constructif ».
Et pas que sur des dossiers bruxellois où Kahoul aurait été partisan d’une attitude plus ferme. « Je le regrette sur le parc national des Calanques (PNC) », cite Didier Reault. « Alors qu’on a pu discuter avec les prud’homies de Cassis et La Ciotat, avec Marseille cela a été beaucoup plus difficile d’avoir des relations durables, avec une présence aléatoire aux réunions et des changements d’interlocuteurs ». Mourad Kahoul rétorque que « les récifs Prado, le parc marin de Carry-le-Rouet, c’était nous. On est pour une gestion durable mais pas pour faire plaisir à un électorat écologiste ». Un travail « de partenariat » sur les récifs que Didier Reault ne manque pas de saluer tout en persistant à regretter « qu’on n’a pas pu travailler aussi sérieusement » sur le parc.
Quid de la succession ?
Sans comité local, qui pour reprendre les discussions avec l’Etat et les collectivités sur la pêche en général et sur le PNC en particulier ? Reste la prud’homie, organisation multicentenaire à Marseille et moins marquée par une organisation hiérarchique. On a parfois vu aux réunions Michel Meacci, premier prud’homme et autre figure qui n’a plutôt pas sa langue dans sa poche. Mais à la commission parc mercredi dernier, c’est Hubert Baty, pêcheur au tempérament plus mesuré ayant lui aussi abondamment navigué entre le comité local et la prud’homie, qui représentait les pêcheurs de la ville.
Mais l’enjeu est aussi le comité régional, dont la présidence pourrait sortir du Lacydon après un peu moins de dix ans de règne Kahoul. Interrogé sur qui pourrait lui succéder, ce dernier dit « ne pas avoir d’idée, et ça ne m’intéresse même pas, même si je ne ferme pas la porte pour échanger des informations. En tout cas je lui souhaite bien du courage ». Dans la lignée de Kahoul, Michel Meacci dit « ne pas avoir besoin d’étiquette » pour défendre des dossiers comme le parc ou la restructuration du Vieux-Port.
« La plupart sur les listes sont du Var ou des Alpes-Maritimes, je le regrette », lâche-t-il cependant – ce que les listes confirment (voir ci-dessous) hormis la présence en bonne place de Martégaux. 06 et 83 : deux départements où un comité a été recréé, contrairement rappelons-le au 13. « Je demande simplement aux nouveaux arrivants d’être au niveau : il faut savoir de quoi on parle, suivre les dossiers depuis un certain temps et ne pas faire le toutou devant l’administration », lance Meacci. Un job qu’à les écouter les poids lourds marseillais feront. Mais à part.
« Entre Astérix, capitaine Haddock et Gros Dégueulasse », l’« équivalent de la poissonnière du Vieux-Port, avec des couilles et du poil autour » : un truculent portrait de 2006 dans Libération.
Les listes pour jeudi (divisées en collèges, où les candidats sont en fait proposés par les fédérations sectorielles)
Bon débarras…
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Photo de Mourad Kahoul qui illustre l’article. Julien, il faut rendre à César ce qui appartient à César… ou alors on s’affranchit des règles de la déontologie du métier de journaliste. La photo n’émane pas de “Médisamak” mais a été prise par l’auteur de la contribution dont la signature figure sur le site du Comité Européen Marseille. Au minimum, il fallait indiquer : “Photo Comité Européen Marseille”.
http://www.comiteeuropeen.com/articles/kahoul1.html
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En tout, on sait ce que l’on perd, on ne sait pas ce que l’on gagne….
Mourad Kahoul était sans doute une grande gueule, sympathique, retorse, directe, mais il avait été élu par ses pairs et était responsable. Il défendait les pêcheurs, parfois de manière excessive (blocage du port de Marseille pour manifester contre le parc national des calanques), mais savait rester dans les négociations et le respect de l’autre.
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Espérons, pour l’image des (trop) rares pêcheurs professionnels qui subsistent dans la rade de Marseille (nous parlons bien de la petite pêche artisanale et pas des gros chaluts et des gros thoniers) , que son successeur soit plus mesuré, plus constructif, moins arc-bouté sur une vision protectionniste plutôt que protectrice pour les professionnels de la branche et bienveillante pour la ressource, pas vulgaire, ni gueulard, moins assis sur ses convictions personnelles au point d’en édicter unilatéralement une pseudo-unanimité de vision, posé, réfléchi, tourné vers l’avenir, un brin conciliant, pas nombriliste au point d’en oublier, au moins le plus souvent possible, ses intérêts personnels, et aussi ne retournant pas sa veste au gré des sympathies politiques du moment, sachant aussi se taire quand il le faut. Bref, sans rechercher l’homme (ou la femme ?) parfait(e), une vraie carrure de Président(e), tout simplement à l’écoute, charismatique et respectueux de tous, ne confondant pas systématiquement divergences de vues et guerre déclarée à grands coups de tromblon. Cela permettra peut-être à la profession marseillaise d’aborder (enfin !) sans crainte, sans cris, sans certitudes mais avec ouverture d’esprit et esprit conciliant certains sujets comme le Parc des Calanques, le Pescatourisme, le “fermo biologico”, la piétonnisation du Vieux-Port (qui appartient à tous), l’évolution des techniques et des métiers, afin que les “petits métiers” ne risquent pas de mourir étouffés par les idées étriquées et obsolètes de quelques-uns, plus vite que par la volonté des politiques locaux ou de ceux de Bruxelles…
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