La Ville met en scène le chantier de sa lutte contre l’habitat indigne dans un taudis
À une semaine de la commémoration des effondrements de la rue d'Aubagne, la Ville a choisi de communiquer sur sa politique de lutte contre l'habitat indigne depuis un taudis du 3e arrondissement. Malgré 48 millions d'euros votés pour mettre en œuvre des travaux, 800 immeubles sont en péril et 1400 personnes toujours délogées.
Patrick Amico, adjoint au logement et Jean-Michel Wagner, patron de la DPGR. Photo : B.G.
Quand tombent les premières feuilles et volent les étourneaux en nuée, arrive le temps de l’habitat indigne. La commémoration des morts du 5 novembre offre une fenêtre médiatique pour évoquer cet énorme chantier devenu depuis 2018 une priorité des pouvoirs publics. Au moins sur le papier. En bordure de cette fenêtre, ce jeudi, la Ville invitait la presse à une “présentation des mesures municipales contre l’habitat indigne”. Le maire est annoncé pour cette première : le Printemps marseillais s’est fait élire en présentant la lutte contre l’habitat indigne comme l’une de ses absolues priorités. Un an et demi plus tard, la Ville n’a pas encore présenté sa stratégie en la matière.
À neuf heures tapantes, Benoît Payan n’est pas au rendez-vous de la rue François-Barbini, sur les pentes de la colline Bellevue (3e). “Un imprévu à l’agenda”, indique-t-on, dans son équipe quelques heures avant que tombe le montant du premier chèque de l’État pour les écoles. L’adjoint au logement chargé de la lutte contre l’habitat indigne, Patrick Amico, Anthony Krehmeier, le maire de secteur et Aïcha Guedjali, conseillère municipale déléguée à l’insalubrité et aux nuisibles sont donc seuls à porter la parole.
Opération de com’ sur la butte Bellevue
Pour l’occasion, le service de presse a décidé de planter le décor de l’opé de com’ dans deux petits immeubles contigus de la rue du jet d’eau. Au coin de la rue, le réseau de narco-trafic dont les travailleurs ne sont pas encore levés ont inscrits le menu – shit, beuh et coke – avec les prix correspondants. Les journalistes sont invités à pénétrer par petits groupes dans ces deux immeubles qui portent les stigmates habituels de l’habitat indigne : balcons qui s’épanchent, plafonds éclatés, toits fuyards… La petite courée ouvrière est typique de l’habitat marseillais du tournant du siècle dernier. Typique de sa décrépitude aussi.
En dehors de ce décor inhabituel, il ne faudra pas attendre beaucoup de nouveauté de l’opération de communication : la Ville est là pour tirer un bilan de son action pas pour annoncer une révolution. En attendant une nouvelle répartition de compétences qui verrait le logement redescendre de la métropole à la Ville, celle-ci se concentre sur ses compétences propres, les écoles en tête de gondole.
48 millions pour les travaux d’office
“48 millions ont été mis à disposition du service pour les quatre prochaines années pour réaliser des travaux d’office, explique Patrick Amico. Cette somme doit nous permettre de réaliser les travaux de mise en sécurité de manière pérenne pour qu’ensuite les propriétaires puissent réhabiliter et, à terme, les locataires revenir y habiter”. Sur ce budget, cinq millions ont déjà été dépensés pour 20 immeubles traités et 20 millions engagés, énumère l’élu. La somme peut paraître conséquente. Elle l’est en comparaison de l’inaction de l’ancienne municipalité.
Mais ces 48 millions sont bien modestes en regard de l’immensité du chantier. Patrick Amico le reconnaît volontiers quand il fait les comptes du stock : “800 immeubles sont toujours en péril dont 200 en péril grave et imminent”. Et le flux n’est pas plus rassurant : “nous prenons environ 30 arrêtés par mois, péril simple ou imminent”. Bien entendu, sur le stock comme sur le flux, une grande majorité des copropriétaires vont mettre en œuvre des travaux sans que la Ville ait besoin de se substituer à eux.
Ces chiffres témoignent de ce que les politiques mises en œuvre depuis trois ans dans le cadre des différents dispositifs, concessions, opérations programmées… n’ont pas permis de faire régresser. Un phénomène que le rapport Nicol évaluait en 2015 à 40 000 logementd potentiellement indignes. Six ans plus tard, le potentiel est toujours là et le chiffre ne varie pas.
1400 personnes toujours délogées
Tout comme les habitants délogés de force de leur lieu de vie. Trois ans après la rue d’Aubagne, le patron de la direction de gestion et de prévention des risques, Jean-Michel Wagner énonce des chiffres glaçants : “20 familles sont toujours à l’hôtel. 120 ménages vivent dans des appart’hôtels, ce qui représente environ 250 personnes. Enfin 400 familles soit 1000 personnes habitent dans des logements temporaires en attendant leur retour chez eux. 40 familles sont dans des foyers Adoma”. En tout ce sont 1400 personnes qui vivent encore loin de leur logement, indiquent donc les services de la Ville. Et comme le dit bien Patrick Amico, “l’habitat indigne est d’abord une problématique sociale”. La nouvelle mouture de la charte du relogement que la Ville a votée en début de mois doit permettre d’accompagner les personnes frappées par cette violence.
Mais le chantier de l’habitat indigne n’est pas qu’externe. La Ville doit aussi œuvrer en son sein. Depuis 2018, la compétence logement est entièrement remontée à la métropole. “En arrivant dans ma délégation, en 2020, j’ai découvert une direction sans agents”, poursuit l’élu. 25 personnes ont donc été recrutées pour reconstituer un service.
Travaux en cours en interne
La direction de gestion et de prévention des risques est elle-même en chantier. La Ville a lancé une longue série de recrutements pour encore l’étoffer. À terme, elle doit être coupée en deux, entre la partie dévolue à la sécurité civile sous l’autorité de Jean-Pierre Cochet et la partie logement qui reste dans le giron d’Amico. 25 agents doivent également venir renforcer le service insalubrité. L’État a demandé à la Ville de renforcer ses contrôles et de prendre en charge les travaux d’office en cas d’arrêté d’insalubrité.
Alors que l’opération de presse se finit, nos pas nous mènent jusqu’à l’immeuble voisin, à la porte entre-baillée. Il n’y a pas d’électricité dans l’escalier de cette maison de ville à deux étages, visiblement fréquentée par le réseau. Une main anonyme a écrit “la frappe” au noir de fumée sur le plafond. Au bout d’un escalier branlant et sombre, on tombe sur des habits d’enfants qui pendent à un fil de fer tendu dans la cage d’escalier. On toque à la porte. Une voix répond qu’elle ne veut pas être dérangée, couverte par des cris de jeunes enfants. Tout ici respire l’insalubrité.
On profite de la présence de Patrick Amico pour l’alerter sur cet immeuble qui mérite bien une visite de ses équipes. “Ah mais vous savez, il y a 4000 immeubles potentiellement indignes à Marseille, se défend-il. Si on les visite tous, on n’a pas fini. On sait bien qu’on est face à une montagne et qu’il y en a pour des décennies…“
Commentaires
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Marsactu pourrait s’intéresser au sort réservé à :
– Sandrine Dujardin, ex-Directrice de la Prévention et de le Gestion des Risques;
– Dominique Dias, ex-Chef du Service Sécurité des Immeubles.
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S’ils ont été remerciés, il y doit bien y avoir des raisons, non?
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La quelle ?
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L’insinuation est la pire des chose
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Je n’insinue rien mais je me pose des questions légitimes. Si le directeur général des services, qui venait d’arriver à Marseille a souhaité se séparer de ces personnes dans un contexte encore de crise, ce n’est pas, .j’imagine, pas sans raison. On peut aussi s’interroger sur le départ de plusieurs architectes nouvellement recrutés et très investis qui étaient placés sous l’autorité de ces personnes. Mais je ne veux pas faire de procès personnel, c’est vous qui avez cité des noms.
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Je suis désolé de constater que Marsactu reprend sans les vérifier les éléments d’un discours politique forcément à l’avantage de l’équipe actuelle. En effet, le service de la sécurité des immeubles était, en 2008, un service indigent, 6 ou 7 personnes pour tout Marseille! Cela en dit long de l’intérêt de l’ancienne municipalité envers ce sujet et sur le niveau de préoccupation de certains hauts fonctionnaires qui d’ailleurs sont toujours, bizarrement, en place.
Cependant, devant l’urgence et contrainte et forcée, l’ancienne équipe municipale avait lancé une vague de recrutements. Si l’équipe actuelle les poursuit, c’est bien mais elle n’a pas initié cette démarche. Le service comportait déjà 25 personnes début 2020. Il est aussi utile de rappeler qu’un certain nombre d’architectes recrutés en 2019 a, depuis fin 2020, préféré démissionner en raison des conditions de travail et d’encadrement qu’on avait décidé de faire régner dans ce service depuis quelques mois.
Enfin, le service en question n’est toujours pas doté d’un responsable direct. Ces agents compétents fonctionnent donc en “autogestion” ce qui, d’ailleurs, n’est pas pire que de subir un encadrement déficient.
Le sentiment est quand même que malgré les discours et les bonnes intentions que je ne discute pas, la nouvelle municipalité a beaucoup de mal à faire fonctionner la machine et que la plupart des domaines restent en jachère, depuis maintenant presque un an et demi. On peut d’ailleurs s’interroger sur le départ précipité de l’ancien directeur général des services dont la compétence n’était pas contestée mais qui manifestait, peut-être, trop de volonté de changement.
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Je n’insinue rien mais je me pose des questions légitimes. Si le directeur général des services, qui venait d’arriver à Marseille a souhaité se séparer de ces personnes dans un contexte encore de crise, ce n’est pas, .j’imagine, pas sans raison. On peut aussi s’interroger sur le départ de plusieurs architectes nouvellement recrutés et très investis qui étaient placés sous l’autorité de ces personnes. Mais je ne veux pas faire de procès personnel, c’est vous qui avez cité des noms.
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Insinuation. La pire des chose comme le dit très justement monsieur Ramondou.
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Le rapport Nicole évoquait également 6 000 copropriété en voie de dégradation….plus les 4 000 bâtiments cités, c’est vertigineux….
Bien évidemment il faut des moyens et de l’ingénierie.
Mais vu la volumétrie à traiter, et la prégnance de cette problématique sur la Ville, il serait temps de “depolitisser” cette politique publique indispensable et vertueuse en faisant travailler de concert les différents acteurs relevant de collectivités différentes, et d’institutions afin d’articuler davantage leurs actions respectives dans une optimisation d’efficience et agir autant que possible à l’îlot plutôt qu’au logement mais sans cesser non plus cette intervention. Les services opérationnels échangent entre eux et les personnels impliqués , sensibles aux opportunité pragmatiques d’intervention de chacun.
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Il serait temps de « dépolitiser » tout court la gestion des politiques publiques . Les élus sont politiques, l’administration ne doit pas l’être . 18 mois que tous les licenciements ou recrutements sont faits par un biais politique , ce qui n’a aucun sens ! Si on y rajoute un refus catégorique de élus locaux de travailler ensemble …. Et bien on se retrouve avec une ville qui ressemble plus à un parti politique ( moribond) qu’à une administration en état de marche et d’exécuter .
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Pourquoi s’étonner ? Les nouveaux élus sont plus présent sur les réseaux sociaux que dans leurs bureaux. Cette nouvelle équipe n’est là que pour la communication. Il arrivera peut-être un jour où ils se mettront vraiement au travail et pas seulement pour faire des conférences de presses, ou des happenings journalistiques pour se faire mousser. Ils pensent déjà à leur future campagne pour être réélus, mais il faudra qu’ils présentent un vrai bilan. Parce que si c’est pour avoir les mêmes bras cassés qu’avant ce n’était pas vraiment la peine de changer… sauf à ce que la gamelle soit partagée avec de nouveaux convives !
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Alors que Vassal, Royer-Perreaut, Rivoallan, Boyer, Ravier, et j’en passe, sont absents des réseaux sociaux…
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Marseille est passé d’une génération d’élus clientélistes ( de droite) à une nouvelle génération d’élus ( de gauche) plus sympathique sur le papier mais qui dans les faits n’ont pas de grande présence ni d’efficacité sur le terrain. Se faire élire, c’est pas mal, mais pour faire quoi ? Quelle volonté, quel projet ? Quel propos ?
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Bon, André et Vincent Furno, vous avez honte d’avoir évacué des immeubles que vous n’avez eu peur de contrôler. C’est ça votre problème. Vous êtes des architectes qui ont peur de s’engager pour controler des risques, qui choisissent de faire venir l’expert du tribunal administratif pour éviter de s’exposer, c’est ça qui a créé la crise des delogements de milliers de marseillais.
Honte à vous.
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Plutôt que répondre à des mises en cause complètement déplacées dans ces colonnes, il est préférable de faire un petit rappel historique. Il y a eu plusieurs phases dans la gestion des risques consécutivement à la catastrophe de 2018. Une première phase de panique pendant laquelle la hiérarchie municipale a donné pour instruction à des équipes, nouvellement recrutées et inexpérimentés, d’évacuer les immeubles signalés et de ne prendre aucun risque, en s’en remettant totalement à l’avis des experts officiels. Beaucoup d’experts désignés par le Tribunal administratif s’étaient d’ailleurs placés dans cette logique excessive. Il faut, pour comprendre, rappeler que l’expert chargé de l’immeuble de la rue d’Aubagne avant l’effondrement était un des plus réputés d’entre eux.
Ensuite, après quelques mois de pratique et grâce au retour d’expérience d’une équipe qui commençait à se stabiliser, le traitement des périls est revenu progressivement à une approche beaucoup plus raisonnable, en ayant recours aux expertises quand cela apparaissait indispensable (sachant toutefois que ce n’est pas une science exacte et qu’il y a une part d’appréciation). Une commission ad hoc avait été mise en place au sein du service pour arbitrer les cas litigieux et le dialogue avec les experts s’était développé.
Il est important de préciser qu’une évacuation n’est jamais décidée à la légère mais lorsqu’on considère que les personnes sont vraiment en danger. Hormis les excès du début, si un nombre non négligeable a continué à être opéré, c’est bien parceque que les immeubles de certains quartiers, sans entretien depuis plus de 50 ans, sont devenus vraiment dangereux.
Mais la méthode mise en place n’était pas suffisante. Il fallait éviter au maximum toute évacuation. On a donc décidé de se passer des experts pour engager une démarche que l’on peut juger hasardeuse avec le risque de mettre la population en danger.
Il faut rappeler que le recours aux experts, s’il ne devait pas être systématique, faisait partie de la procédure légale encadrée par des textes de loi. Ces experts ne sont pas désignés par les collectivités mais par le Tribunal administratif.
Cette approche nouvelle a déstabilisé une équipe qui commençait pourtant à parvenir à un minimum de maturité. Plusieurs agents dont l’implication était irréprochable ont préféré partir et, à ce que j’en sais , ce service pourtant indispensable, est resté dans une situation flottante.
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Le phase de panique décrite par André avec ce traitement radical des signalements de péril qui a provoqué tant d’évacuations n’a pas duré “quelques mois” mais a bien été prolongée 18 mois jusqu’en avril 2020. Et par les agents eux-mêmes, contre la Direction de la DPGR qui demandait un retour à un traitement normal, avec des visites de contrôles par les architectes avant le recours à l’expert du TA au moindre risque. Cela a été explicitement revendiqué par une bonne part des agents des périls et l’encadrement du Service de la Sécurité des Immeubles dans leur courrier qui a été publié par le Ravi.
Cf : https://www.leravi.org/social/logement/habitat-indigne/les-architectes-et-ingenieurs-en-charge-de-la-gestion-des-risques-a-marseille-lancent-lalerte-sur-les-immeubles-en-peril/
J’ai ensuite assumé en juin 2020 la reprise en main d’un service qui était en grande souffrance, et nous avons alors limité les recours aux procédures d’urgence uniquement pour les vraies urgences, et surtout en faisant pression sur les propriétaires pour qu’ils réparent !
Pour André ce retour à un traitement normal aurait été “une démarche que l’on peut juger hasardeuse avec le risque de mettre la population en danger.” C’est une mise en cause mensongère. Et je la retourne à André et Vincent : en perpétuant le traitement de crise des périls qui a provoqué le délogement de 5000 Marseillaises et Marseillais vous avez mis cette population en danger. Et ceci principalement pour éviter d’exposer votre responsabilité. C’est explicite dans le courrier d’avril 2020.
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Bonjour, à la demande de Vincent Furno, nous avons supprimé les commentaires signés de son nom et qu’il avait postés en lien avec cet article.
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