La chambre régionale des comptes réplique à la défense de Gaudin
Trois jours après la présentation au conseil municipal des deux rapports de la chambre régionale des comptes, le président de celle-ci, Nacer Meddah tenait une conférence de presse pour répondre aux attaques du maire et de ses principaux adjoints.
Les magistrats de la chambre régionale des comptes le 27 novembre 2019. (Image BG)
L'enjeu
Durement attaquée lors du conseil municipal, la chambre régionale des comptes tenait une conférence de presse ce mercredi pour répondre point par point.
Le contexte
À quelques mois de la fin de la mandature de Jean-Claude Gaudin, les deux derniers rapports de la chambre régionale des comptes tiennent lieu de bilan de la gestion.
“Nous ne faisons pas une émission de télévision. Ce n’est pas Ardisson”. Le président de la chambre régionale des comptes, Nacer Meddah, réplique avec ses armes à la riposte mise en scène par Jean-Claude Gaudin lors du conseil municipal le plus long de ses 24 ans de règne (lire notre compte rendu de cette séance).
Ce n’est pas une émission de télé mais c’est de la communication quand même : Nacer Meddah siège au milieu d’autres magistrats dont on ne connaîtra pas les noms car “la collégialité” fait partie de la méthode qu’il souhaite mettre en avant. Il n’y a guère que “Grégory” (Semet) ou “Walid” (Ghachem) qui sont autorisés à compléter les réponses du président. Conseiller et vérificateur, ils ont directement participé aux contrôles à compter de 2012.
Posée, déterminée et implacable, la conférence de presse est une réponse cinglante aux mises en cause publiques du maire ou du président du groupe majoritaire, Yves Moraine. Elle répond point par point aux accusations d’“inexactitude, d’inéquité”, d’entorses déontologiques. Lundi, les magistrats étaient en réunion de travail lorsque le conseil municipal a débattu plus de 4 heures des deux rapports. “Nous avions prévu de suivre cela en parallèle, note Nacer Meddah. Finalement, nous avons délibéré l’après-midi”. La charge était violente, inédite.
À commencer par celles qui touchent son président nommément attaqué par Yves Moraine : “Le président de cette juridiction était rien moins que le secrétaire général de la campagne présidentielle de François Hollande en 2012”. Point par point, voici la défense de la chambre.
“Toute ma vie, j’ai servi l’état”
À deux reprises, Nacer Meddah est sorti de sa posture de porte-parole d’un collège de magistrats où sa “voix n’est pas prépondérante” quand la question de sa probité personnelle est revenue par la bouche d’un journaliste, reprenant les accusations d’Yves Moraine. Le président de la chambre s’est fait grave face à des “insinuations outrageantes”, ajoutant une note de sentiment à son ton combatif : “Je suis pupille de la Nation. Toute ma vie j’ai servi l’État”. Il rappelle qu’en tant que haut fonctionnaire, il a travaillé à l’Élysée où il a monté la cellule de renseignement “pour le président Sarkozy”, mais aussi qu’il a été préfet “pendant dix ans, sous de nombreux gouvernements”. Et quand il a choisi de s’engager auprès de François Hollande, “c’est en congé de ma mission de serviteur de l’État par convenance personnelle”. Cet “engagement citoyen” ne regarde que celui qui le prend, dit-il encore. On est là “dans le procès d’intention”. “Quand on est avocat de surcroît, on mesure ses propos”, tance-t-il en réponse à Yves Moraine.
un rapport bouclé “en urgence en plein mois d’août”
“Oui, nous travaillons l’été”, sourit Nacer Meddah, à deux doigts de verser dans la critique facile de supposées mœurs méditerranéens. Il répond ainsi à ceux qui l’ont accusé de précipiter le bouclage pour que les deux rapports soient rendus publics avant la fin du mandat. Il revient longuement sur la procédure, sa durée, deux ans et demi, “inhabituelle dans ce type de contrôle” qui demandent 18 mois en moyenne. “La chambre n’a pas travaillé dans la précipitation”, insiste-t-il.
Il décrit la longue phase contradictoire qui précède la remise du rapport définitif. “Nous veillons au droit de la défense”, insiste-t-il. Le rapport provisoire passe devant un “collège de sages”, les magistrats de la chambre, qui mêlent juges de siège et du ministère public, eux-même indépendants les uns des autres. “Nous avons un travail important pour arriver à un rapport provisoire, stabilisé” qui sera ensuite transmis à “l’ordonnateur” – ici le maire – qui a deux mois pour répondre.
Des “modifications substantielles” ont été apportées à partir de l’analyse de ces réponses. “Nous n’avançons rien sans preuve“, reprend Meddah qui rappelle que Jean-Claude Gaudin a demandé et obtenu un mois supplémentaire pour apporter sa réponse. Fin août, le rapport définitif lui a été remis en mains propres, au palais du Pharo.
“Un contrôle hors sol avec des œillères et des boules Quiès”
À plusieurs reprises, lundi, le maire et ses adjoints ont fustigé un contrôle établi sans visite sur le terrain, sans éléments probants si ce n’est des articles de presse, notamment concernant l’état des écoles. “Nous ne sommes pas hors sol, nous jugeons sur pièces et sur place”, répond tranquillement le président de chambre, assurant, que les magistrats se rendent dans tous les lieux cités et “ils font des photos qui sont examinées par la collégialité”. Il suggère même qu’à l’avenir ces images pourraient être présentées en annexe des rapports.
Quant à l’absence de pièces, notamment un rapport préfectoral sur les écoles, que la Ville aurait constaté en se rendant directement à la chambre pour vérifier les pièces en appui des rapports, elle fait hausser les sourcils du banc de magistrats. “Je ne vois pas de quoi il s’agit, répond Nacer Meddah. Nous avons effectivement une data room où sont présentes toutes les liasses de documents. Tout y est. Si le rapport préfectoral existe, il doit s’y trouver. Mais je n’en ai jamais entendu parler“.
“La Ville se bat depuis 25 ans pour enrayer son déclin”
Cette phrase de Jean-Claude Gaudin est censée répondre aux critiques sur la situation financière de la Ville. Les magistrats veulent bien l’entendre mais ils soulignent que beaucoup des faits qu’ils soulèvent ont déjà fait l’objet de recommandations par le passé. Les deux milliards de dette de la Ville ne sont pas d’aujourd’hui. “Il existe un mur de la dette qui doit intervenir dans deux ans avec le remboursement d’un gros emprunt obligataire, note-t-il. Le poids des frais financiers est tel qu’il n’y a pas de réserve d’autofinancement”. Ce sont les subventions du conseil départemental ou les emprunts qui ont permis à Gaudin de financer ces dépenses d’investissements.
Or, dans le même temps et sur la période observée, de 2012 à 2016, la masse salariale a progressé de 51 millions d’euros, notamment par l’embauche de nombreux vacataires et contractuels, jusqu’à représenter 60% des dépenses de fonctionnement. Quant au nombre exact d’employés municipaux, selon la CRC, la Ville n’est pas plus capable d’en tenir le compte exact qu’elle ne l’est de connaître son patrimoine. “Or, cela représente des sources substantielles d’économies”, note encore Nacer Meddah.
“Je demanderai rectification, y compris par des voies de droit”
En conclusion, Jean-Claude Gaudin indiquait vouloir saisir le “premier président de la cour des comptes” obtenir rectification de “tout ce qui est inexact, déformé, oublié ou diffamant”. Le droit de rectification existe bel et bien mais “il ne concerne que les erreurs matérielles”, indique le président de la chambre régionale des comptes. S’estimant lui aussi outragé, le maire d’Istres, François Bernadini avait formulé la même demande sans obtenir satisfaction.
“Tout ce que nous écrivons s’appuie sur des preuves”, dit encore Nacer Meddah. Il n’est donc pas certain que la requête du maire arrive à son terme. Et ce d’autant plus que la chambre régionale des comptes n’est pas subordonnée à la Cour des comptes “dont elle est indépendante comme les chambres régionales le sont les unes des autres”. Pas sûr que cette demande du maire ne dépasse donc le stade de l’intention.
Commentaires
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Quelle honte, cette nullicipalité qui, plutôt que d’apprendre de ses erreurs et de les corriger, préfère persister et s’en prendre à ceux qui les lui montrent.
Le seul regret qu’on puisse réellement avoir, c’est que ses errements, souvent contraires à l’intérêt de la Ville et de ses contribuables, ne soient pas passibles des tribunaux.
Et on a bien noté que Mme Vassal s’inscrit dans cette tradition, elle qui a prononcé l’éloge de Gaudin.
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C’est bien certain ? Il n’existe pas un truc du genre « abus de biens sociaux » « détournements de bien publics « ? Je me demande si un groupe de citoyens ne pourrait pas déposer plainte ?
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Je suppose que si la CRC avait trouvé des faits délictueux, elle les aurait transmis au parquet. La mauvaise gestion n’est pas un délit…
En revanche, elle est en principe sanctionnée par les urnes : ce qui est étonnant, et consternant, c’est la longévité de ce gang aussi incompétent qu’arrogant.
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Ceci dit, je lis dans La Provence qu’un avocat engage des poursuites contre l’Etat pour “carence fautive” dans le contrôle des actes de la Ville de Marseille, sur la base des manquements relevés par la CRC… : https://www.laprovence.com/article/faits-divers-justice/5781113/il-accuse-letat-de-carence-dans-la-gestion-marseillaise.html
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Un sentiment de dégoût de la politique et des élus locaux…. Et quelle manque de proactivite quant au “mur du remboursement” non ?
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Courage fuyons. gaudin et ses nuls sont devenus au fil des années, pathétiques.
laisser la ville dans cet état, devrait effectivement être passible de peines lourdes sur le plan pénal.
son héritière vassal, (porte bien son nom…) aura du mal, investie maintenant, à faire oublier les turpitudes et les choix de cette équipe d’incompétents notoires.
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Les réponses de JC Gaudin et de ses affidés ont été consternantes. Tonalité populiste dans les affirmations à la Salvini : « les juges n’ont qu’à mettre leur figure sur une affiche et se présenter aux élections »dit le chocolatier Moraine.
Toujours cette certitude de l’impunité chez les élus.
Le président de la CRC a le loisir de saisir le procureur devant l’ampleur des fautes. Le fait-il ? Une conf de presse ne suffit pas.
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Il est amusant, Moraine.
Et sa conception des élections en dit long : lui-même avait mis sa figure sur une affiche” et s’était présenté aux élections législatives il y a deux ans, résultat il s’est trouvé éliminé dès le premier tour par deux inconnus du microcosme décadent de la politique marseillaise. Précisons qu’il faut entendre littéralement sa phrase : un an et demi avant lesdites élections le quartier était envahi d’affiches avec “sa figure” et son nom, sans rien. Et si j’en juge par la tête de ses affidés en début de soirée dans le bureau de vote lors du dépouillement, ils étaient persuadés que ça suffisait pour être largement en tête des suffrages.
Et depuis il a recommencé…
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La CRC constate que la dette de la ville s’élève aujourd’hui à deux milliards.. ,en ajoutant qu’il existe un mur de la dette qui doit intervenir dans deux ans avec le remboursement d’un gros emprunt obligataire.Les montants sont donc très conséquents et le remboursement de l’emprunt en une seule fois risque de poser de gros problèmes de trésorerie le moment venu.Aussi,dans deux ans,la ville aujourd’hui sous surveillance pourra être mise sous tutelle de l’Etat,sinon la dette devra être répartie et payée par tous les contribuables marseillais aidés par les impôts départementaux,métropolitains voire bucco- rhodaniens.Alors pour se maintenir aux affaires,l’équipe actuelle joue dans le déni,en continuant avec frénésie et sans restriction,les embauches clientélistes, les nominations ubuesques, les doublons de personnels ,l’externalisation inutile de missions de service public, le délaissement de son parc immobilier,l’abandon et la fermeture de piscines et le maintien de la vétusté d’une partie des écoles. Noël arrive à point nommé pour faire oublier les soucis de gestion et cette dette abyssale.Les cadeaux, les chocolats chers à certains gourmands et les treize desserts de Provence sortiront des cartons, certains quartiers pourront peut être aussi goûter au champagne.Garnies savamment,les tables joyeusement décorées apaiseront les esprits dans une période déjà préélectorale. La citation du livre Le Guépard,de Giuseppe Tomasi,est toujours d’actualité —« Tout changer pour que tout demeure »,— allant à l’encontre des idéaux en prétendant que la révolution ne résoudra rien, sinon aggravera les choses (« Nous fûmes des guépards, les lions ; ceux qui nous remplaceront seront les petits … »).
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Bonjour
Pourrait-on avoir le lien vers le rapport de la chambre régionale des comptes ?
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Bonjour,
Nous avons publié les liens sur cette page : https://marsactu.fr/bref/la-chambre-regionale-des-comptes-publie-les-deux-rapports-sur-la-mairie-de-marseille/
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