"J'essaye de construire mon cinéma avec des accidents"

"J'essaye de construire mon cinéma avec des accidents"

"C'est bien une suite des 4 saisons d'Espigoule, mais en Afrique", précise d'emblée Christian Philibert, le réalisateur d'Afrik'aïoli. "On a trouvé intéressant, 14 ans après, de faire revivre les personnages. Par contre j'avais la volonté d'exporter Jean-Marc Ravera, le pilier de tous les personnages d'Espigoule." L'occasion s'est alors présentée au Sénégal, loin du Var où se situait le premier film, primé en 1999 au festival du cinéma de Marseille (FID).

Le titre, Afrik'aïoli, est porteur de sens : "l'aïoli, c'est le mélange, c'est un peu le plat du pauvre. Nous, on est un peu un film fauché", décrit avec humour le réalisateur varois qui rappelle que le film, sur place, a été tourné en seulement deux semaines à cause de son petit budget.

"Fautes de langage"

L'une des particularités de Christian Philibert est de faire travailler des acteurs non professionnels, comme Modou Cissé, chauffeur de taxi. Même si aujourd'hui Jean-Marc Ravera et Mohamed Métina, qui tous deux ont déjà joué dans plusieurs films, ont désormais quitté la sphère des amateurs. "J'ai un peu de mal avec les acteurs qui se contenteraient de répéter les dialogues. J'aime les fautes de langage. J'ai une grosse expérience dans le documentaire et ce que je trouve fascinant, c'est quand les choses nous échappent, quand il se passe quelque chose qu'on avait pas prévu, quand ça se met à vivre. J'aime les accidents et j'essaye de construire mon cinéma avec ces accidents."

Pour garder cette spontanéité et laisser la part belle à l'improvisation, le réalisateur a limité les rencontres entre les trois acteurs avant le tournage. "Dans les premiers jours, il s'agissait de créer un peu des tensions entre eux. J'ai essayé de séparer les acteurs en dehors des scènes de tournage pour éviter qu'ils se côtoient trop vite". Dans Afrik'aïoli, "on joue beaucoup avec les clichés que les acteurs trimballent sur leur propre culture. Mais aussi sur tous les clichés qu'ils peuvent avoir de l'autre."

Et, comme dans tous ses films, le rire est omniprésent. Bref, c'est "une aventure humaine et artistique extraordinaire que l'on retrouve à l'écran." Y aura t-il (encore) une suite ? "Pourquoi pas" se contente de répondre Christian Philibert. "J'aimerais faire venir Modou Cissé en France pour comparer le sens de l'hospitalité des Français avec celui des Sénégalais qui n'a pas de limite".