Jean-Brice Garella, le Poulidor de la politique gardannaise, roule pour Jean-Marc La Piana

Portrait
le 26 Juin 2020
0

Opposant du maire historique Roger Meï depuis 2012, Jean-Brice Garella a conclu une alliance de deuxième tour avec Jean-Marc La Piana, l'héritier choisi par le maire PCF. Deuxième de peu de voix en 2014 et à l'élection partielle de 2015, il ne brigue donc plus le poste de maire. Considéré comme opportuniste par ses opposants, lui veut participer au changement du bastion communiste, tout en assurant en partager l'héritage humaniste.

Jean-Brice Garella, le Poulidor de la politique gardannaise, roule pour Jean-Marc La Piana
Jean-Brice Garella, le Poulidor de la politique gardannaise, roule pour Jean-Marc La Piana

Jean-Brice Garella, le Poulidor de la politique gardannaise, roule pour Jean-Marc La Piana

Il navigue du centre-gauche au centre-droit de la politique gardannaise depuis 2008 et il pourrait bien être le barycentre du deuxième tour cette année. Jean-Brice Garella, 49 ans, est un opposant affirmé au maire Roger Meï depuis 2012, après avoir fait partie de sa majorité. En 2014, il avait perdu de 69 voix d’écart contre le maire PCF, à la tête d’une liste PS-EELV-UDI. Ce dimanche 28 juin, l’ancienne cité minière de 20 000 habitants va tourner une page importante : après 43 ans de règne, Roger Meï laisse la main. Cette fois-ci,  Jean-Brice Garella pourrait rentrer dans la peau d’un vainqueur à la mairie, mais toujours pas en première ligne. Le 15 mars, il a pris de son propre aveu une nouvelle “gifle”, quatrième malgré ses 17,97 %. Dans l’entre-deux tours, il a rallié Jean-Marc La Piana, le candidat sans étiquette choisi comme successeur par Roger Meï.

Lire notre article révélant l’alliance entre Jean-Marc La Piana et Roger Meï.

Ce choix en a surpris beaucoup. D’autant plus que Jean-Brice Garella était à l’origine d’un recours qui a fait annuler le scrutin de 2014. Six ans plus tard, l’élément qui a décidé la justice administrative fait sourire. Il pointait le fait que Jean-Marc La Piana, médecin très implanté à Gardanne et colistier de Roger Meï, ne résidait pas dans la commune et ne pouvait donc pas se présenter. “J’avais reçu des menaces de mort, ma permanence avait été détruite. J’aurais préféré que l’élection soit annulée sur les menaces mais le juge a retenu la résidence de Jean-Marc. D’un point de vue technique, c’était plus facile”, raconte-t-il aujourd’hui. Depuis, le sujet ne semble n’avoir pas pollué les relations entre les anciens adversaires.

Jean-Brice Garella nous reçoit dans son bureau de l’entreprise de prêt-à-porter féminin créée par son père en 1970. Le site du groupe Garella mode et design se situe à flanc de colline, au milieu des champs de blé dans un paysage écrasé par l’imposante masse de béton de la centrale thermique. Même s’il est à la tête d’un groupe au chiffre d’affaires de plusieurs dizaines de millions d’euros, Jean-Brice Garella se montre sous un jour humble. “J’ai arrêté l’école à 14 ans, parce que je n’étais pas formaté pour. L’usine je connais, j’étais ici aux cartons”, pose l’entrepreneur comme témoignage de sa compréhension du monde ouvrier.

Il dit s’engager en politique pour être “au service des autres”. Élu PS dans la majorité Meï, il a occupé la délégation à la solidarité. “On partage les mêmes valeurs humanistes avec Roger Meï”, dit-il. Alors s’il a quitté la majorité en 2012, “c’est à cause d’un fonctionnement municipal très verrouillé par les très proches du maire, qui ne sont plus candidats aujourd’hui”. Un constat qui résonne avec les raisons du départ de la majorité du militant PCF et conseiller départemental Claude Jorda. “Je suis habitué à faire des projets. Je veux faire des projets pour tous. Je souhaitais être le maire de tous”, affirme-t-il. Et non au service d’une vision dogmatique telle que défendue selon lui par les anciens proches de Roger Meï.

“En 2014 c’était son jour, il a raté le virage”

D’une même voix, Jean-Brice Garella et Jean-Marc La Piana disent avoir mûri une nécessité de faire alliance durant le confinement. “Pendant deux mois et demi la situation était extrêmement particulière”, explique Jean-Marc La Piana, joint au téléphone. En accord avec le maire, on a réfléchi à une alliance. L’intérêt, c’est le développement économique de la ville.” Cette version des faits, post-covid, évacue du même coup le risque électoral d’un second tour à cinq listes.

Jean-Marc La Piana et Jean-Brice Garella reconnaissent l’un et l’autre leur “proximité des programmes” et assument une “réconciliation nécessaire” pour faire face à la crise. Il veulent “développer les emplois”, tout en “respectant l’environnement”. Un enjeu de taille dans cette commune où les dernières industries, l’usine d’alumine Alteo et la centrale thermique, sont soumises à des avenirs incertains. De ce fait, les deux nouveaux alliés ne veulent pas “se retrouver avec un maire sans expérience”. Une critique à peine dissimulée d’Hervé Granier, candidat pour la première fois. “Ce qui prime c’est l’avenir de la ville et la synergie de nos compétences”, assure Jean-Brice Garella, qui a pourtant démarché Hervé Granier avant le premier tour et dans l’entre deux tours. “Il m’a toujours dit non”, précise-t-il.

Une vision pour Gardanne

Les opposants de Garella critiquent un choix opportuniste. “Trouver un point d’accord sur le développement de Gardanne c’est facile, il y a tellement de choses qui ne fonctionnent pas. C’est ni plus ni moins qu’une alliance d’opportunité, affirme Bruno Priouret, le candidat RN. C’est triste. En 2014 c’était son jour, il a raté le virage, c’est dommage.”. “Il s’est battu pendant 10 ans contre la municipalité Meï. Il ne respecte pas ses engagements, juge Hervé Granier. “Il a fait un mauvais choix avec monsieur La Piana, ça le discrédite, estime Claude Jorda, pour qui les deux alliés “confondent mathématiques et politique. Mathématiquement ils ont gagné. Mais il faut tenir compte du contexte qui fait des électeurs de la liste Garella des déçus.”

Claude Jorda, qui revendique mener la seule liste de gauche, reconnait néanmoins une valeur d’“honnêteté” au conseiller municipal qu’il a côtoyé… Du moins jusqu’à ce ralliement. “Jean-Brice a enfin compris qu’il fallait aller vers les plus proches politiquement, plutôt que dans la haine cuite et recuite”, confie le député François-Michel Lambert, candidat en 2015. Celui-ci ne s’est pas toujours montré tendre envers Jean-Brice Garella, lui reprochant d’avoir fait monter la haine anti-Roms lors de la campagne de 2014, alors que Roger Meï avait accompagné l’accueil sur un campement, de familles rejetées par les communes voisines.

Jean-Brice Garella dit avoir manifesté son désaccord sur la méthode et non sur le fond. “L’accueil en lui-même était précaire. J’aurais trouvé plus intéressant, si l’on avait été ouvert sur le pays d’Aix, de mettre les communes voisines autour de la table pour que chacune accueille une famille. Mais j’étais l’opposant, alors j’étais forcément contre.” Brigitte Apothéloz, militante EELV et colistière de l’époque, se souvient d’un meeting de campagne sur le thème de la sécurité qui avait servi de défouloir contre les Roms à des personnes du public. “C’était une erreur de faire un premier meeting sur ce thème”, commente-t-elle.

En cas de victoire de sa liste dimanche, Jean-Brice Garella pourrait prendre la délégation de l’économie pour, selon ses termes, “changer le quotidien des gens qui ont le sentiment de voir leur ville déclassée”. Il rêve d’un équilibre entre industrie, agriculture “à conserver et à favoriser” et tourisme “à développer”. “Des millions de touristes font le trajet entre Marseille et Aix. On pourrait mettre trois places de bus et proposer un circuit des panoramas de Cézanne. Ça ne coûte rien, un peu d’aménagement”, plaide-t-il.

Le peintre aixois de renommé mondiale a en effet peint une vingtaine de tableaux à Gardanne. “Quand vous repartirez d’ici, vous verrez le hameau de Payannet peint par Cézanne. Il est aujourd’hui dans la collection du bureau ovale de la Maison Blanche, s’enthousiasme le riverain. Mais à l’époque de Cézanne, la vue sur la Sainte-Victoire n’était pas entravée par de massives industries. Grand défi que de vouloir favoriser trois piliers d’un nouvel essor économique, en apparence incompatibles.

Cet article vous est offert par Marsactu
Marsactu est un journal local d'investigation indépendant. Nous n'avons pas de propriétaire milliardaire, pas de publicité ni subvention des collectivités locales. Ce sont nos abonné.e.s qui nous financent.

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire