Fusion métropole-département : l’option d’un référendum local prend de l’ampleur

Décryptage
le 15 Mai 2019
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Depuis que le président de la République a ouvert la voie à des consultations locales, les opposants à un nouveau chamboulement dans l'organisation des collectivités territoriales poussent l'idée d'un référendum. Alors que la décision de l'exécutif se fait attendre, l'option est prise au sérieux par le gouvernement.

Photo JML
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Le sort du pays d’Arles, à savoir son intégration dans la métropole, doit-il être réglé par les urnes ? Alors que le mouvement des gilets jaunes a remis à l’ordre du jour des mesures de démocratie directe, le projet prend de l’ampleur et vient contredire les efforts du gouvernement pour déminer le sujet. La question suscite “des débats passionnés, voire passionnels” constatait déjà le préfet des Bouches-du-Rhône, Pierre Dartout, dans son rapport remis au premier ministre le 13 avril dernier. Il concluait toutefois en faveur d’une fusion intégrale de la métropole et du département des Bouches-du-Rhône, pays d’Arles compris.

Mais neuf des vingt-neuf maires du pays d’Arles refusent toujours de rentrer dans la métropole Aix-Marseille-Provence. Dans ce contexte tendu, l’idée de référendum local pour trancher la question prend corps au-delà du cercle des élus arlésiens. Le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Renaud Muselier (LR) s’y est montré favorable, tout comme bon nombre de parlementaires des Bouches-du-Rhône tels Anne-Marie Bertrand (LR), Monica Michel et Michel Amiel (LREM). Outre ces opposants au projet, le député LREM des quartiers Nord de Marseille Saïd Ahamada, favorable à la fusion, se déclare lui aussi “pour un referendum” auprès de Marsactu.

Une option prise en compte par le ministère

C’est une demande qui a été bien notée et très bien exprimée par un certain nombre de parties prenantes” assure-t-on dans l’entourage de la ministre des collectivités, sans pour autant encore exprimer “une position définitive” sur le sujet. D’autant plus que cette demande entre en résonance avec la volonté présidentielle de “donner plus de place à la voie référendaire dans notre démocratie” affirmée le 25 avril. Une possibilité que le chef de l’Etat envisage explicitement au niveau local.

Dans la balance, on notera que le référendum local est loin d’être au goût de tous les élus, y compris au sein du pays d’Arles. “C’est un coup de publicité qu’ont voulu se faire ceux qui défendent l’autonomie d’Arles”, balaye Jean Mangion, maire divers-droite de Saint-Étienne-du-Grès qui a fait ses calculs : “La question est réglée. Il y a 300 élus qui se sont prononcés pour la fusion. Cela veut dire que c’est la majorité”, objecte celui qui est aussi vice-président de la communauté de communes Vallée des Baux-Alpilles.

Le référendum compte d’ailleurs une opposante de poids. De sources concordantes, Martine Vassal n’est pas du tout encline à laisser cette porte ouverte aux opposants à la métropole. Et la présidente de la métropole et du département pèse de tout son poids pour éviter que se mette en place ce scrutin. Martine Vassal, qui n’a pas donné suite à notre demande d’interview, est d’ailleurs officiellement candidate à présider une institution issue de la fusion.

Quel périmètre pour un référendum ?

“C’est un déni de démocratie !“, tempête à l’inverse Jean-Marc Martin-Teissère (LR), président de la communauté d’agglomération Terre de Provence. L’élu fait partie des opposants historiques au rattachement de ces 29 communes à la métropole Aix-Marseille-Provence. “Quand on a été élus en 2014, le sujet n’était pas à l’ordre du jour. Donc il faut le mettre sur la table et demander l’avis aux citoyens“, explique-t-il. Une demande d’autant plus forte que les Arlésiens tendraient vers un refus de l’intégration à la métropole. Un sondage BVA, publié le 10 avril 2019 et commandé par l’intercommunalité Terre de Provence, basé sur un échantillon de 804 habitants indique que seulement “19 % des habitants du pays d’Arles se déclarent favorables à l’intégration des communes du pays d’Arles dans la métropole Aix-Marseille-Provence” quand 62 % des personnes interrogées disent être au courant du projet.

Mais seraient-ils les seuls consultés ? Le périmètre géographique d’un éventuel scrutin fait en effet partie des questions en suspens. Doit-on demander aux seuls électeurs arlésiens leurs avis ou étendre le vote à tout le département ? La question fait écho à un précédent controversé : le référendum de Notre-Dame-des-Landes. Organisé sous la présidence de François Hollande en juin 2016 pour trancher la création d’un nouvel aéroport, il avait été limité au seul département de Loire-Atlantique quand les opposants réclamaient une zone plus large s’étendant notamment en Ille-et-Vilaine.

Sur 29 communes ou sur tout le département ?

Les plus ardents promoteurs d’un pays d’Arles indépendant de la métropole penchent pour un référendum sur les 29 communes qui le composent. “Il suffit d’un décret du gouvernement, affirme Hervé Chérubini, président socialiste de la communauté de communes Vallée des Baux-Alpilles. Mais cela reviendrait sans doute à enterrer le projet de fusion, tant la métropole de Marseille est déconsidérée par les habitants.” La sénatrice Anne-Marie Bertrand dit avoir sollicité l’avis du préfet, Pierre Dartout, sur la faisabilité de ce référendum à l’échelle du Pays d’Arles. “Si on fait un référendum, il faut le faire sur tout le département“, lui aurait-il répondu. Contactée par Marsactu, la préfecture n’a pas pu confirmer cette échange téléphonique étant entrée dans une période de “réserve à l’approche des élections européennes“.

Je ne vois pas quelle question on poserait aux habitants du département en entier. Ce ne sont pas les citoyens, qui sont déjà dans la métropole aujourd’hui qui vont être impactés par la fusion avec le pays d’Arles”, rétorque la députée Monica Michel (LREM), contre la fusion.

Les anti-métropole s’engouffrent dans la brèche

Chez les anti-métropole, d’autes voient pourtant l’intérêt d’une consultation plus large. Ils s’appuient à la fois sur cette fronde locale et les récents propos d’Emmanuel Macron pour tenter de stopper le développement de l’intercommunalité créée en 2016. La sénatrice centriste Sophie Joissains, dans une lettre envoyée le 29 avril, exhorte le Premier ministre à “intégrer les habitants au processus décisionnel“. Dans cette même lettre, elle élargit le projet de référendum à tous les territoires métropolitains “annexés contre leur gré à la ville de Marseille“, à commencer par le pays d’Aix.

Une position qui fait réagir Saïd Ahamada (LREM) “Je dissocie complètement le référendum d’Arles de celui d’Aix, là on est sur de la politique politicienne. Elle fait un procès aux Marseillais : Marseille hégémonique, Marseille ville pauvre pour laquelle on va payer tous les équipements.” 

Après la venue du Premier ministre Édouard Philippe à Marseille le 12 avril promettant une décision rapide, le choix de l’éxécutif se fait attendre : “Nous n’avons aucune nouvelle depuis le 12”, note-t-on dans l’entourage du président de région Renaud Muselier. La ministre des relations avec les collectivités territoriales Jacqueline Gourault est toujours chargée de tâter le pouls des élus locaux. “Il n’est d’ailleurs pas impossible que la ministre revienne sur le terrain“, esquisse-t-on dans son entourage. Mais suite aux mesures voulues par Emmanuel Macron le 25 avril, les équipes de la ministre ont d’autres priorités dans l’immédiat. “Au niveau national, où il y a eu un discours du président de la République, donc on est aussi un peu chahuté par ces annonces gouvernementales“, concède-t-on dans l’entourage de Jacqueline Gourault, “mais évidemment le sujet de Marseille est prioritaire“.

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