Dialogue de sourds entre le gouvernement et les collectivités sur les efforts budgétaires

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le 22 Oct 2024
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À l'occasion de la convention annuelle des maires de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, la nouvelle ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation, Catherine Vautrin, a tenté de rassurer les représentants des maires et élus du territoire sur l'effort budgétaire demandé par le gouvernement dans un contexte d'austérité. Sans forcément convaincre.

Renaud Muselier et Catherine Vautrin à la convention 2024 des maires de la région Paca. (Photo : ML)
Renaud Muselier et Catherine Vautrin à la convention 2024 des maires de la région Paca. (Photo : ML)

Renaud Muselier et Catherine Vautrin à la convention 2024 des maires de la région Paca. (Photo : ML)

Tout le monde va devoir se serrer la ceinture dans les prochains mois. Et, surtout, les collectivités territoriales. Mais la pilule a du mal à passer pour leurs représentants. Pour preuve, la convention annuelle des maires de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca), qui s’est tenue ce lundi 21 octobre à Aix-en-Provence, a tourné au débat sur l’effort budgétaire important demandé par l’État aux collectivités dans un contexte d’austérité. Et la nouvelle ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation, Catherine Vautrin (Les Républicains), a tenté avec difficulté de répondre aux inquiétudes des institutions pour son premier déplacement officiel sur le territoire.

“Je suis dans une situation de colère, de difficulté financière, d’incompréhension. Je ne comprends pas très bien ce qu’il s’est passé”, lance Renaud Muselier (Renaissance), le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, lors de son discours d’ouverture. Ses services évaluent à 120 millions d’euros l’effort financier pour la région, selon les éléments actuels du projet de loi de finances (PLF) 2025, présenté par le gouvernement il y a quelques jours, puis discuté au Parlement à partir de cette semaine. “Il va y avoir des arbitrages très difficiles, mais il y a un vrai combat pour diminuer l’effort, commente-t-on dans l’entourage de Renaud Muselier. On prendra notre part, mais il faut réduire la facture. Il y a une pondération à trouver.” “De toute façon, on n’a pas le choix”, concède le président à la tribune.

120 millions pour la région, 70 pour le département, 50 pour la Ville de Marseille

Quelques jours plus tôt, Martine Vassal (divers droite), la présidente du département des Bouches-du-Rhône et d’Aix Marseille Provence métropole, a, elle aussi, dénoncé cette situation et les 70 millions d’euros par an en moins que cela représenterait pour le département. “Cela fait dix ans que nous sommes aux côtés de l’État sans jamais rechigner. Et aujourd’hui, Paris nous annonce qu’ils vont nous faire les poches. Pour moi, c’est insupportable, déclarait-elle en marge du conseil départemental le 18 octobre. Il y en a assez que nous subissions les décisions déficitaires systématiquement prises par l’État.” Le maire de Marseille, Benoît Payan (divers gauche), est sur la même ligne. Pendant le conseil municipal le 18 octobre, il a regretté une mesure perçue comme une injustice : “Il ne va pas nous manquer 25 millions d’euros dans les caisses, il va nous manquer beaucoup plus que ça, 50 millions d’euros.” 

Alors, à Aix-en-Provence ce lundi 21 octobre, la ministre Catherine Vautrin est attendue de pied ferme par les acteurs du territoire, même si Martine Vassal et Benoît Payan sont les grands absents de cette rencontre. Après un rituel accueil républicain et un entretien privé avec Renaud Muselier et le maire de Nice Christian Estrosi (Horizons), la représentante de l’État monte sur scène pour un discours officiel qui doit venir clôturer cette rencontre avec des maires et des élus de toute la région. La membre du gouvernement commence de manière très pédagogique, en faisant le service après-vente du projet de loi de finances. “On demande aux collectivités de participer à l’effort de l’État, reconnaît Catherine Vautrin. C’est un effort d’économie important qui est demandé à chacun, mais ça serait encore plus grave si on avait une crise financière globale au national.”

Une réforme du statut de maire avant les municipales

La ministre ne s’engage donc pas à diminuer la facture pour les collectivités, mais joue plutôt la carte de la discussion. “Je suis preneuse de vos idées d’économies. Ma mission, c’est de travailler avec vous à livre ouvert. Les bonnes idées viennent de partout, surtout du terrain”, dit Catherine Vautrin, cherchant à cajoler les élus locaux. Elle sort également de son chapeau une mesure pour brosser l’hémicycle dans le sens du poil en proposant de revoir le statut de maire. “Vous devez être mieux protégés”, s’exclame la membre du gouvernement, sous les applaudissements d’une partie de l’hémicycle. À ce sujet, elle précise à la presse, à l’issue de son discours, vouloir agir vite : “Avant les municipales, c’est un sujet qu’on doit revoir.”

On est dans une situation ubuesque, mais on est prêts à participer à l’effort national.

Georges Cristiani, président de l’union des maires des Bouches-du-Rhône

Aux côtés de la ministre lors de ce point presse, Renaud Muselier fait part d’un demi-scepticisme : “Je suis toujours inquiet, mais en même temps, je suis toujours positif. Je vois toujours le verre d’eau à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. La situation financière est complexe pour le pays et, par solidarité, pour la région aussi.” Du côté des édiles, les réactions semblent mitigées face au discours de Catherine Vautrin. “C’est une maire, donc elle comprend parfaitement nos difficultés. Après, je ne sais pas si le gouvernement va la suivre, commente Georges Cristiani (sans étiquette), maire de Mimet et président de l’union des maires des Bouches-du-Rhône. On est dans une situation ubuesque, mais on est prêts à participer à l’effort national.”

Face à ce constat, du côté des collectivités, on s’interroge sur les origines de cette situation. “Bruno Le Maire n’est pas la superstar de cette convention !”, s’amuse ainsi un des participants, alors que certains questionnent la responsabilité de l’ancien ministre de l’Économie, en poste pendant sept ans, dans le déficit public actuel. “C’est drôle de voir des maires de droite se plaindre des mesures d’un gouvernement de droite”, pique de son côté un élu de gauche, qui souligne le double discours de Renaud Muselier (Renaissance) ou encore de Martine Vassal — ex-Les Républicains tous deux — vis-à-vis de leur ancienne famille politique ou de leurs alliés actuels. En attendant, si tout le monde y va de son estimation sur le serrage de vis à venir, il est encore difficile de mesurer les conséquences réelles des efforts financiers demandés par l’État pour les budgets des collectivités. Il faudra attendre que le projet de loi de finances passe la barrière du Parlement, ou par un passage en force du gouvernement via un 49.3, et que les budgets soient finalisés. Réponse dans les prochaines semaines.

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Commentaires

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  1. Manipulite Manipulite

    Du bluff de la part des potentats locaux qui font des estimations catastrophistes au doigt mouillé.
    J’ai lu ailleurs que Muselier a vendu aux maires et à la ministre son projet écocide de 2 milliards (?) pour les JO2030 à la neige carbonique.
    La ministre a applaudi.
    Attal avait refusé de signer la garantie de l’Etat, Barnier a cédé…

    Quelle cohérence ? Sérieux ?

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