Depuis son élection, Renaud Muselier fait payer à Arles sa brouille avec Patrick de Carolis
Le président de région n'a pas supporté que le maire lui refuse son soutien explicite lors des régionales et a bloqué les subventions régionales durant huit mois. Un élu de sa majorité promet le retour des aides sous peu. Un article de notre partenaire l'Arlésienne.
Renaud Muselier et Patrick de Carolis lors d'un événement à Arles. Au centre, l'élue Mandy Graillon. (Photo : Eric Besatti)
Le torchon brûle entre Renaud Muselier et Patrick de Carolis, le maire d’Arles. La semaine dernière, des communiqués et déclarations sortaient pour régler des comptes politiques à travers le territoire arlésien. Depuis son élection, Renaud Muselier, lâché en pleine campagne par Patrick de Carolis se venge à travers les aides financières au territoire.
Jusqu’à maintenant, la brouille restait dans les couloirs politiques et dans les conseils d’administration des associations, mais la semaine dernière, c’était l’étincelle de trop. Dans La Provence, Patrick de Carolis adresse une pique au conseiller régional Cyril Juglaret : “Qu’il fasse son travail”. L’élu renvoyait alors la balle. “Rassurez-vous, monsieur de Carolis, la région, le président Renaud Muselier et moi faisons notre travail ! Il suffit de vous tenir informé”, rappelant les investissements réalisés dernièrement pour le territoire : 2,5 millions d’euros pour l’hôpital et 900 000 euros pour le canal de la Haute-Crau.
La vengeance est une subvention qui refroidit
Néanmoins, “on ne va pas se cacher derrière notre petit doigt”, confirme Cyril Juglaret, conseiller régional arlésien sortant et réélu. Aujourd’hui, comme depuis le début du mandat, c’est compliqué pour les projets du pays d’Arles. Le pôle Culture et patrimoines, une association professionnelle, va devoir supprimer trois postes et licencier en ce début d’année. L’an passé ils n’ont pas eu les 51 000 euros promis par la région et dont le vote a été maintes fois reporté. Depuis les élections, les projets du territoire arlésien se font répondre “en attente” par les services de la région. La salle de concert du Cargo de nuit ? “En attente”.
C’est fort de café, [de Carolis] met le feu et après nous fait porter le chapeau
Cyril Juglaret, conseiller régional
Le projet de Toro-pôle est, lui aussi, à l’arrêt, pourtant présenté main dans la main par Renaud Muselier et Patrick de Carolis à la Feria du riz de septembre 2020. Muselier promettait alors un financement de ce lieu vitrine de la culture taurine pris en charge à 50% par la Région. Invité par BFM Marseille, de Carolis continue à mettre la pression sur le conseiller régional : “j’espère qu’il fera aussi son travail pour le théâtre municipal d’Arles qui était aidé par la région et qui, j’espère, continuera à l’être.” “C’est fort de café, il met le feu et après nous fait porter le chapeau. Je passe mon temps à payer les pots cassés et à plaider pour les projets arlésiens”, confie Cyril Juglaret. Au mois de janvier, les élus ont validé une nouvelle politique à la tête de l’exécutif régional. “Nous allons faire le distinguo entre les projets des acteurs du territoire et les projets plus personnels de l’homme politique”, éclaircit le conseiller régional.
Retourner sa veste du mauvais côté
L’origine de la brouille ? “Un véritable acte de lâcheté politique”, dénonce l’entourage de Renaud Muselier, qui a quitté le parti LR en novembre dernier. “Dès qu’il a vu le vent tourner et que Mariani (RN) était donné vainqueur, il a préféré ne plus soutenir”, accuse-t-on autour du président de région. Au printemps 2021, pendant la campagne des régionales, celui qui était fraîchement élu maire voulait obtenir une bonne place sur la liste de Muselier pour son premier adjoint, Jean-Michel Jalabert.
Après quelques négociations sur l’ordre des noms entre son poulain et Cyril Juglaret, ancien adversaire aux élections municipales, l’affaire semble honorablement conclue selon l’entourage de Muselier. “Jean-Michel Jalabert était numéro 19 et Cyril Juglaret 29”, se souvient-on précisément. Le 11 mai au matin, le “deal politique était passé“, considère le négociateur de ce camp, “et nous devions envoyer une confirmation formelle”. Mais pendant la soirée, “nous recevons un coup de téléphone de l’équipe de Carolis, qui nous annonce qu’ils ne veulent plus être sur la liste. Nous aurions mis trop de temps à répondre. Un sommet d’hypocrisie et de politique amateur”, poursuit cette source. De Carolis a d’autres souvenirs. “Je voulais que mon premier adjoint soit dans les 20 premiers”, a-t-il déclaré à La Provence avant de couper court : “c’est tout. Je n’ai pas d’autres commentaires à faire”.
Il faut se remettre dans le contexte pour tenter de comprendre. À ce moment de la campagne, Renaud Muselier s’effondrait dans les sondages donnant le RN en tête au premier tour et gagnant au second. La gauche avait promis de ne pas se retirer au second tour. La campagne du président sortant patinait. Il venait d’annoncer la fusion de sa liste dès le premier tour avec LREM, en se fâchant avec les cadres Les Républicains. Déjà la tourmente médiatique menée par ses amis de droite le pointait comme faisant le jeu de Macron.
Pas sur la photo à la Feria
L’homme de confiance du président charge encore et parle de “lâcheté immédiate pour être du bon côté. Ils se sont dits qu’il était préférable de ne pas aller se coller aux futurs perdants.” Dès le 11 mai, plus d’un mois avant le premier tour, le président de région ne reçoit plus aucune invitation de la part du protocole de la Ville d’Arles. Un événement demeure néanmoins inévitable : la Feria de Pâques. Là aussi, l’équipe de Renaud Muselier n’a rien oublié : “Le président est placé le plus loin possible de Patrick de Carolis, ignoré superbement comme jamais un président de région ne l’a été. Ça veut dire : on ne veut surtout pas être sur la même photo.” Le 16 juin, un rassemblement des maires de droite derrière Muselier est organisé sur la place du Forum en centre-ville d’Arles. Aucun élu de la majorité de Carolis ne s’y déplace.
À la même époque, la deuxième adjointe arlésienne affrontait le RN aux départementales et ne souhaitait pas heurter l’électorat de son adversaire.
Comment expliquer cette prise de distance ? Ne pas soutenir Muselier, l’homme de droite qui se rapproche des marcheurs tiendrait de la stratégie pour “ne pas faire perdre des voix à Mandy Graillon [deuxième adjointe à la ville d’Arles], qui se présentait aux départementales face au RN”, analyse le proche de Muselier. Pour être élue, sa tactique a consisté à ne pas contrarier les électeurs d’extrême-droite, plutôt que de draguer les électeurs de gauche pour un éventuel barrage. Une hypothèse que réfute l’entourage de Patrick de Carolis : “Il ne vous a pas échappé que Mandy Graillon et Martial Alvarez ont dû faire face à un binôme du Rassemblement national très actif et qu’ils ont dû combattre sur le terrain des idées.”
Un adjoint s’affiche dans un déplacement du candidat RN
Au conseil municipal de novembre dernier, la rumeur selon laquelle Patrick de Carolis aurait apporté son soutien au candidat du RN aux régionales a fini par donner lieu à une question orale. “Non, il ne m’a pas soutenu, tranche Thierry Mariani, qui répond au téléphone depuis Strasbourg et son poste de député européen. Je pourrais m’amuser à foutre le bordel, mais je vous assure que non”. L’ancien candidat RN se souvient toutefois d’avoir rencontré un conseiller municipal de la majorité arlésienne chez un riziculteur.
Le 2 juin 2021, Thierry Mariani en campagne débarque à Arles, fait le tour des commerçants en centre-ville et va à Mas-Thibert chez Jean-Louis Limonta, ancien candidat RN aux municipales, aujourd’hui soutien de Zemmour. “Patrick de Carolis ne pouvait pas venir, mais il s’est fait représenter”, assure Jean-Louis Limonta. Et c’est Pierre Raviol, troisième adjoint de la ville d’Arles qui est venu serrer la main au candidat d’extrême-droite et s’asseoir à la table pour parler d’agriculture et d’enjeux électoraux. “C’est à titre purement personnel et monsieur le maire ne lui a jamais confié un quelconque mandat pour le représenter”, assure-t-on dans l’entourage de Patrick de Carolis. “Aucune prise de parole pour afficher un soutien n’a été faite”, admet Jean-Louis Limonta.
C’est pas normal que des hommes politiques puissent se faire la guerre avec l’argent public et les projets d’un territoire.
Une responsable associative
Quoiqu’il en soit, la différence de traitement a eu les conséquences financières que l’on connaît. “C’est pas normal que des hommes politiques puissent se faire la guerre avec l’argent public et les projets d’un territoire”, se désole une responsable associative. “Félicitations, de Carolis devait nous apporter de l’argent avec son réseau et sa diplomatie, en un an, il a réussi à vexer le deuxième partenaire de la ville”, ironise Mohammed Rafaï, conseiller municipal de l’opposition de gauche arlésienne.
De son côté, Renaud Muselier n’en est pas à sa première mesure de rétorsion. Il sanctionne Arles comme Cannes, où David Lisnard le maire LR a eu l’outrecuidance de critiquer ouvertement sa stratégie de rapprochement avec LREM. Dès le lendemain du second tour des régionales, le président réélu a supprimé les subventions au comité régional de tourisme Côte d’Azur. Mais toutes ces sanctions ont une fin, avance Cyril Juglaret : le 25 février prochain, 17 dossiers arlésiens devraient être votés “pour un montant de 2,4 millions d’euros” par la région. Voilà, explique-t-on en mairie qui est “de nature à rassembler les Arlésiens”. Et à faire photo commune à la prochaine Feria ?
Commentaires
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ce n’est plus de la politique, c’est de la magouille entre ex copains.
que pensent les citoyens-électeurs de ces élus qui privilégient leurs alliances et leurs arrangements électoralistes, plutôt que l’intérêt des concitoyens.
à gerber.
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… Et si justement, c’est bien de la politique. Négocier , choisir ses partenaires lors d’une élection est fondamental. Carolis a manqué de flair et de courage politique en prenant ses distances avec Muselier et croyant que Mariani allait l’emporter. Ménager l’extrême droite, c’est pas joli, joli. Il a démontré qu’il n’était pas très bon stratège et manquait d’intuition, rendez-vous aux prochaines élections …
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si c’est ça la politique, elle est complètement hors-sol et oh combien éloignée des problèmes de la population et des programmes présentés par les candidats pour pouvoir les résoudre. C’est complètement affligeant car ces zélus se lamentent ensuite de la désaffection de la population envers les élections.
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Et est ce normal que des associations d’y territoire, qui n ont rien à voir avec la querelle, voient leur subvention régionale baisser ?
Et les personnes derrière qui perdent brutalement leur emploi, vous trouvez ça normal?
Faut être sérieux d’eux minutes!
Après c’est mêmes politiques s étonnent de la montée de l abstention et de la contestation…
Il va falloir peut être sortir de l ère de la maternelle…
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Ce n’est que le fonctionnement de RM depuis qu’il remplace Estrosi à la région .Punir les gens qui le critique et mettre en place ses proches ou ses supporter même si ils sont loin d’avoir les capacités pour leur poste mais on ne se refait pas il a appris avec JCG ,GD et JNG
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Il n’est pas franc du collier de Carolis en voulant ménager le FN pour des raison de basse politique. Où sont les valeurs républicaines ? Décidément quand la « société civile » entre en politique, elle adopte les mêmes travers que les politiciens à l’ancienne. Quant à Mandy Graillon avant d’être élue à Arles elle était directrice adjointe du cabinet Estrosi et Muselier au conseil régional. Elle a sans doute oublié ce qu’elle doit à ses mentors.Épinglée par la Chambre régionale des comptes pour son salaire mirobolant face à sa faible expérience et des diplômes en chocolat. Mais un poste de conseillère départementale vaut bien quelques mamours avec le FN.
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Ils sont impressionnants, ces politiciens de droite qui croient que “ne pas contrarier les électeurs d’extrême-droite” les met en sécurité : au contraire, ils légitiment ainsi les idées de ceux-ci… et les candidats RN qu’ils trouveront face à eux. Pour faire reculer l’extrême-droite, il faut la combattre, et non dupliquer son discours ni se taire.
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