Municipales à Aix : avec Perrin, Joissains voit surgir un nouvel adversaire de ses rangs
L’adjoint de Maryse Joissains (LR) ne cachait pas ses ambitions depuis plusieurs mois. Il officialise son désir de briguer l’investiture Les Républicains. Sa dissidence agace au sein de la majorité de la maire sortante.
Photo Emilio Guzman
“J’ai 60 balais, c’est mon tour et je suis prêt.” Dans la salle de séminaire d’un restaurant de la zone d’activité des Milles, Jean-Marc Perrin – bien calé dans sa chaise de plastique beige – n’y va pas par quatre chemins. D’emblée, il annonce : “Je suis candidat aux municipales à Aix.” Élu en mars 2008 au côté de Maryse Joissains (Les Républicains), il est depuis mars 2014 son 9e adjoint en charge de l’archéologie et du quartier de la Duranne.
Le voilà donc désormais qui acte “son divorce” d’avec la maire d’Aix-en-Provence. Au risque de diviser la droite aixoise et de devoir s’opposer à la sortante, qui, le 21 juin dernier, dévoilait à Marsactu son choix de briguer, à 77 ans, un cinquième mandat. En public, la maire Les Républicains ne s’offusque pas de cette sécession. “Je suis une démocrate. Mes adjoints sont libres”, lâche-t-elle. Son premier adjoint Gérard Bramoullé complète : “On a bien travaillé avec lui pendant plusieurs années, à la Duranne. Personne n’ignorait ses velléités. Il a le droit d’avoir une ambition personnelle…”
Investiture LR sollicitée
La courtoisie apparente cache des failles profondes. Si Jean-Marc Perrin renouvelle “son respect” à Maryse Joissains et souligne son “bon bilan”, il pointe néanmoins “l’usure du pouvoir”, “le système autocratique” et “la perte de confiance” qui signent selon lui la fin du quatrième mandat de la sortante. Autant d’arguments qui l’autorisent selon lui à solliciter l’investiture LR. “La lettre est prête, je ne l’ai pas encore envoyée. J’ai fait du lobbying ici et à Paris, aussi”, précise Jean-Marc Perrin.
La fédération LR des Bouches-du-Rhône confirme que l’adjoint de 60 ans a averti les instances départementales de ses ambitions. Jean-Claude Gaudin, le maire de Marseille, est informé lui aussi. Jean-Marc Perrin décrochera-t-il pour autant l’investiture de son parti ? “Je ne crois pas, s’avance un cadre du mouvement. Si Maryse ne voit pas sa peine confirmée par la cour de cassation, il n’y a aucune raison de ne pas la lui accorder, à elle.” Une manière de ne pas choisir : dans le cas contraire, elle n’aurait pas le droit de concourir à nouveau.
Condamnée en mai dernier par la cour d’appel de Montpellier à six mois de prison avec sursis et un an d’inéligibilité pour détournement et prise illégale d’intérêts, Maryse Joissains attend que la juridiction se prononce. Elle hausse les épaules, l’investiture LR lui revient, “cela tombe sous le sens”. Si sa peine est confirmée et que le couperet de l’inéligibilité tombe, elle juge que “d’autres que Jean-Marc Perrin méritent plus que lui” l’intronisation des Républicains. Son favori ? Alexandre Gallese, son adjoint à urbanisme, répond-elle. La commission nationale d’investiture (CNI) des Républicains devrait trancher d’ici à la fin du mois d’octobre.
Fragilité de la majorité
Pour l’heure, au sein de la majorité aixoise, l’annonce de la dissidence crée quelques crispations. “J’ai demandé à Jean-Marc de me recevoir pour qu’il m’explique sa volonté. Il ne l’a pas encore fait”, regrette Gérard Bramoullé qui souffle : “Je suis surpris, mais pas encore déçu.” Comme lui, d’autres aimeraient “comprendre” le réel motif de cette échappée : “À Marseille, entre Bruno Gilles et Martine Vassal, il s’agit d’une césure sur la vieille fracture RPR/UDF. Ici, ce n’est pas le cas. Le clivage n’est pas politique ; il est personnel.” “Je ne comprends pas pourquoi il fait ça, ça tient du suicide politique”, s’étonne encore un élu qui siège dans la majorité municipale.
L’idée d’une droite qui avancerait divisée vers les municipales génère aussi des inquiétudes. “C’est dommage, quand même”, déplore Rémi Capeau, porte-parole des Jeunes Républicains aixois. “Ça fragilise une équipe qui a beaucoup travaillé et a bien marché jusqu’à présent.” Il s’emploie à minimiser la portée de cette probable candidature de Jean-Marc Perrin : “Un épiphénomène”.
Sur la même note, Gérard Bramoullé préfère souligner la sérénité de l’équipe Joissains : “Nous sommes totalement soudés. Il n’y a aucune fissure. Parmi les adjoints qui travaillent… il n’y a aucun problème, en tout cas.” Plusieurs conseillers municipaux de l’actuelle majorité se seraient néanmoins rapprochés du conseiller départemental. “Maryse et son entourage ont un côté autoritaire qui en effraie quelques-uns ; ils en ont marre d’être le doigt sur la couture du pantalon, observe un fin connaisseur du paysage politique aixois. Perrin va lui prendre ces 4 ou 5 élus-là. Mais comme au fond elle veut s’en débarrasser, ce n’est pas forcément une mauvaise affaire pour elle !” L’élu de la Duranne – qui fut le directeur de campagne de Maryse Joissains en 2014 – assure que l’équipe se constitue : “Pour l’instant je la cache volontairement. Je veux laisser mes colistiers à l’abri. Je sais combien la vie politique à Aix est parfois rude.”
Avec ou sans l’appui de Vassal ?
Maire sortante comme adjoint dissident se prévalent de l’appui de la puissante présidente de la métropole et du département, Martine Vassal (LR). Jean-Marc Perrin, par ailleurs conseiller départemental et président de la commission d’appels d’offres des marchés publics du CD13, avance régulièrement sa proximité et son travail avec la candidate marseillaise. Quand Maryse Joissains ne tarit pas d’éloges sur celle qui occupe désormais le fauteuil de Jean-Claude Gaudin à la tête de la métropole d’Aix-Marseille-Provence. Dans le combat à venir, ce soutien-là pèsera lourd. Dans le clan Joissains, on assure avoir reçu des garanties de la part de Martine Vassal : “Si Perrin se présente contre le maire, elle [Martine Vassal] lui retire toutes ses délégations.”
Un Républicain marseillais voit les choses autrement : “Perrin peut aussi être l’arme atomique que Gaudin et Vassal utiliseraient pour se débarrasser enfin des Joissains…” Parce qu’entre l’inlassable guerre des tranchées savamment entretenue pendant des années contre la métropole et les affaires qui l’ont vue condamnée, la “dame d’Aix”, comme dit le maire de Marseille, a fini par irriter jusque dans son camp.
Pas de quoi entamer la quiétude revendiquée par la première magistrate aixoise. L’histoire lui donne raison. “D’autres anciens adjoints avant Jean-Marc ont essayé de faire tomber Maryse. On ne peut pas dire que ça ne leur ait porté chance”, prévient Gérard Bramoullé dans un fin sourire. Bruno Genzana, Stéphane Salord et Jean Chorro, défaits chacun à leur tour, en savent quelque chose.
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