Habiter et vivre pleinement la ville

Réinventer l’urbanisme à Marseille

Billet de blog
le 6 Août 2016
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Retrouvons, pour Marseille, une nouvelle raison urbaine : une nouvelle façon d'articuler l'espace urbain, la vie sociale et l'habiter

Pour faire revivre la ville à Marseille et pour mieux l’inscrire dans l’espace et dans le paysage, sans doute est-il nécessaire de repenser l’urbanisme dans cette ville, d’y imaginer une nouvelle façon d’aménager la ville et de la peupler, en reconnaissant de nouvelles contraintes et de nouveaux impératifs pour l’aménagement urbain et en élaborant pour lui de nouvelles contraintes et de nouvelles orientations. Il va bientôt s’agir d’un débat particulièrement vivant et exigeant à l’approche des élections municipales qui auront lieu en 2020 : dans seulement quatre ans, autant dire demain.

 

Cinq exigences nous semblent s’imposer pour imaginer ce nouvel urbanisme marseillais.

 

Repenser les relations entre le centre et les périphéries

 

Le problème majeur de la ville, à Marseille, a toujours été la relation entre le centre et les périphéries, mais sans doute faut-il voir les choses de plus loin et se demander s’il y a même un centre, dans cette ville. C’est que l’identité marseillaise ne s’exprime pas, comme dans d’autres villes, par l’aménagement d’un centre et par l’ouverture de ce centre à des rencontres et à des échanges entre les habitants de tous les lieux de la ville. Tout se passe, à Marseille, comme s’il ne s’agissait pas d’une ville mais d’une agglomération de petites villes, comme si les quartiers, à Marseille, n’étaient pas réunis dans une identité urbaine partagée, mais coexistaient les uns à côté des autres sans se rencontrer et sans habiter ensemble la même ville. C’est sans doute la première exigence d’un urbanisme pour Marseille : repense la centralité et l’ouvrir aux habitants de toute la ville, afin que les quartiers de cette ville ne soient pas des ghettos, afin que tous ceux qui habitent Marseille se l’approprient et deviennent, ainsi, porteurs d’une identité urbaine partagée.

 

L’espace, l’environnement, la pollution

 

Une deuxième exigence à Marseille semble être la reconnaissance de l’environnement comme une préoccupation de la ville et de l’urbanisme. On a l’impression, à Marseille,  que le développement de la ville s’est fait au fur et à mesure de son histoire et de l’invention de nouvelles contraintes géographiques, économiques, sociales et politiques, sans que l’espace ait été un souci majeur, sans que la question de la pollution atmosphérique et de la pollution par les désordres urbains ait été une préoccupation majeure des élus et des pouvoirs. Si cette ville est à ce point dégradé et si ceux qui y habitent ont si peu le souci de leur environnement, sans doute est-ce parce qu’ils ne se l’approprient pas pleinement. C’est pourquoi nous sommes, aujourd’hui, devant une véritable urgence de la question de l’environnement urbain et que cette question s’articule, avec la même urgence, avec la question des façons d’habiter la ville.

 

Repenser les transports et les circulations

 

Parmi les exigences de cette nouvelle politique environnementale à élaborer pour cette ville, la question des transports et des modes de déplacement occupe une place majeure. La voiture particulière prend trop de place à Marseille et les transports en commun n’y sont pas assez présents, pas assez développés, pas assez efficaces. Il n’y a que deux lignes de métro pour la deuxième ville de France, alors qu’il y en a quatre à Lyon, et le réseau d’autobus ne dessert pas assez de lieux dans cette ville et ne circule pas assez fréquemment. Cela entraine une dégradation de l’espace en raison de la pollution causée par les voitures particulières et cela témoigne du manque de souci de la ville pour l’urgence écologique d’une nouvelle logique de transports et de déplacements.

 

Imaginer une nouvelle esthétique de la ville

 

Mais s’il importe de repenser l’urbanisme, ce n’est pas seulement dans une logique d’efficacité et de fonctionnalité, c’est aussi pour inscrire l’esthétique et le paysage urbain au cœur des exigences de l’urbanisme marseillais. Les immeubles haussmanniens du centre sont sales alors qu’ils pourraient embellir la ville, les rues ne sont pas bien entretenues et leur aménagement ne répond pas à des préoccupations d’ordre esthétique, la ville n’est qu’un ensemble de lieux ayant des fonctions et de territoires de pouvoirs, au lieu de figurer, dans sa globalité, un paysage urbain que l’on prenne plaisir à regarder et où l’on se plaise à circuler. Sans doute importe-t-il de se rappeler qu’habiter une ville est aussi y reconnaître un paysage.

 

Un urbanisme pour habiter la ville

 

C’est que l’urbanisme, à Marseille, doit impérativement faire en sorte que cette ville soit pleinement habitée par ceux qui y vivent. Habiter une ville, ce n’est pas seulement y passer du temps, c’est y retrouver une part de son identité, c’est pouvoir s’y retrouver en y parcourant des lieux qui nous parlent et en y regardant des constructions qui nous plaisent. Un urbanisme pour habiter la ville est un urbanisme qui rende cette dernière à ses habitants, qui leur permette de s’y reconnaître. Au-delà des lieux de travail, d’échanges et de loisirs, dont, au passage, je ne suis pas sûr qu’ils soient en assez grand nombre (deux exemples : il n’y a pas assez de salles de cinéma de qualité pour une ville de cette importance et le M.U.C.E.M. est le seul équipement culturel qui nous reste de la « Ville européenne de ;a culture »), une ville pleinement habitée est une ville où l’on ne se contente pas de vivre et de passer du temps, mais où l’on retrouve l’expression de son identité – et cela passe par l’existence d’un véritable espace public, fait de lieux de culture, de lieux de politique et de lieux d’imagination. C’est un peu ce que nous dit Bruno Maquart, président de la Cité des Sciences et de l’Industrie, à la Villette, à propos d’une exposition qui vient d’ouvrir sur « les mutations urbaines » : « Les villes », dit-il, dans Le Monde Magazine, du 6 août, « sont ce qu'en font leurs habitants, il ne faut pas croire qu'elles nous ont échappé ».

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