Laissez moi être en colère
Jour 40 du confinement
Face aux injonctions d’être zen, efficace, souriante, patiente, solidaire, résiliente, responsable, en forme, exemplaire… Je me donne le droit d’être en colère.
Je ne suis ni déprimée, ni désœuvrée. Juste en colère. Très en colère. Salutairement en colère. La colère n’est pas la rancœur. Elle ne nous dévore pas. Elle peut être un sentiment puissant, un carburant positif. Je crois même qu’elle est le signe d’un état d’esprit sain et lucide. Tant que l’on est capable de colère, on est encore vivant.
D’ailleurs, je crois être née en colère. En colère contre l’injustice, le racisme, la médiocrité, l’hypocrisie, le mensonge, le conformisme, le sexisme… C’est parfois fatiguant mais tellement stimulant.
Et là, vous avouerez, qu’il y a sacrément de quoi être en colère alors que cette crise sanitaire engendre une crise économique (je ne pense pas à la baisse des dividendes ou du PIB mais aux gens qui perdront leur emploi et qui voient leurs revenus fondre), une crise sociale et des répercussions psychologiques dont nous ignorons encore l’étendue.
Je suis en colère devant le renforcement de l’appareil sécuritaire, le laminement des droits sociaux, l’abandon de nos aînés et des plus pauvres, des plus en détresse, le grignotage insidieux de l’état de droit.
Je suis en colère des milliards d’euros d’argent public dépensés en achat de drones et autres dispositifs sécuritaires, en aides aux multinationales alors que les petits entrepreneurs vont crever la gueule ouverte, que certains de mes concitoyens font la queue pour l’aide alimentaire parce qu’ils crèvent de faim, que le service hospitalier demande l’aumône, que des millions de personnes continuent à travailler et à utiliser les transports sans que des protections leur aient été fournies,…
Je suis en colère en lisant la liste qui ne cesse de s’allonger des cagnottes auxquelles on me demande de participer pour soutenir les pauvres, les associations, les producteurs locaux alors que les actionnaires continuent à percevoir leurs dividendes.
Je suis en colère des envolées lyriques et mégalomaniaque d’un Président irresponsable. Des annonces inconséquentes contredites par tant d’incohérences, jour après jour, que cela en est grotesque. Malheureusement si le ridicule ne tue pas, le Covid, si.
Je suis en colère parce que cette situation, qui nous assigne à résidence, nous infantilise, nous culpabilise, est le résultat de l’incompétence, du mépris et de l’arrogance de nos gouvernants et de leurs alliés.
On nous dit que le déconfinement va débuter le 11 mai. Pas de masque. Pas de test. Pas de traitement. Mais de quoi nous parle t’on ? Déconfiner pour envoyer nos enfants en classe pour que nous puissions relever l’économie en allant au charbon et consommer dans la grande distribution ? En revanche, pas de café en terrasse, pas de plage, pas de sorties entre ami.e.s, pas de spectacles ni d’activités culturelles… Une population entière condamnée, en liberté surveillée. Mais de quoi sommes nous coupables ?!
J’ai bien peur que le jour d’après soit bien pire que le jour d’avant.
Alors, s’il vous plaît, laissez moi au moins la liberté d’être en colère et de ne pas vouloir enchanter mon confinement. Quitte à faire acte de désobéissance.
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