Le débat sur les vestiges de la Corderie (suite)

LA POLITIQUE ET LES POUVOIRS À MARSEILLE

Billet de blog
le 3 Sep 2017
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Ce jeudi 31 août, avait lieu une réunion à la Préfecture entre les acteurs du projet immobilier prévu par Vinci sur le site des vestiges de la Corderie. Ce débat, qui s’est déroulé sans la présence de la ministre de la Culture, pourtant un acteur culturel majeur de la région, n’a pas fait avancer le débat ni la concertation et s’est conclu par un report, par l’attente d’une décision finale sur l’autorisation de construire qui sera, ou non, donnée par la ministre.

Échec de la concertation

Tout semblant se passer comme si cette réunion n’avait pas eu lieu, c’est l’échec de la concertation qui apparaît pleinement. En ce sens, il importe de lire ce que l’on va bientôt appeler « l’affaire des Vestiges » de deux manières : d’une part, il s’agit, en effet, du débat sur le devenir d’une partie du patrimoine historique et culturel de la ville et sur l’emprise des acteurs de l’immobilier sur les politiques urbaines et l’aménagement de la ville ; mais, d’autre part, il s’agit bien de la mise en évidence de l’absence de démocratie réelle dans notre ville, puisque l’occasion était donnée de montrer que les pouvoirs municipaux écoutaient le peuple, entendaient la « vox populi » et qu’ils n’ont pas saisi l’occasion qui leur aurait permis de prouver leur attachement à la démocratie, leur engagement dans une approche pleinement démocratique de la politique de la ville. Sauf en cas de retournement de la situation après la rédaction de ce billet, ce que nous pouvons toujours espérer, c’est bien le pouvoir de la finance, le pouvoir de l’argent, qui domine la politique urbaine, à Marseille, au lieu que ce soit la démocratie. L’échec de la concertation montre cette absence de démocratie, de reconnaissance du pouvoir du peuple, pourtant réuni, assemblé, à la fois sur les lieux des vestiges et dans l’espace des institutions.

 

Absence de débat public et absence d’orientations politiques des pouvoirs

L’absence de débat public montre ce qu’est devenue la ville de Marseille : un espace politique où la vie politique, justement, n’est pas reconnue, ne sert à rien, un espace dans lequel les acteurs politiques et les engagements ont moins d’importance que les acteurs financiers et ceux de la recherche du profit. Ce qui oriente la politique et l’exercice du pouvoir, à Marseille, ce n’est pas le débat, ce n’est pas la démocratie, c’est la recherche de l’assurance du profit, et c’est, finalement, la vente de l’espace public, sa braderie au profit des puissances de l’argent – en l’occurrence des acteurs de l’immobilier. On peut, dans ces conditions, mieux comprendre la dégradation esthétique et architecturale de l’espace urbain, dont nous avons déjà parlé ici. L’entretien du patrimoine architectural, et même l’entretien de la ville et sa plus élémentaire propreté, ne constituent pas des priorités de la politique des pouvoirs municipaux. À Marseille, l’espace urbain, finalement, n’est pas une préoccupation des autorités de la ville, et l’on peut, dans ces conditions, se demander quelles sont leurs orientations, quels sont leurs choix politiques, quels sont leurs soucis. Livré au marché de l’immobilier et à ses acteurs, l’espace urbain n’est plus, ainsi, l’espace dans lequel s’expriment et se manifestent les choix des décideurs de la ville, peut-être, justement, parce qu’ils n’en ont pas.

 

Les archéologues prennent des positions contraires aux intérêts de la recherche et de la connaissance de l’histoire

C’est, enfin, sur le plan de la politique de la recherche qu’il convient de situer le débat sur les vestiges de la Corderie. Une fois de plus, les chercheurs ont été écartés du débat public, puisque les pouvoirs ont choisi de ne retenir que les propos de chercheurs qui leur étaient soumis, par ailleurs fortement contestés au sein même du monde de la recherche. Peut-être faudrait-il prendre ce débat comme une leçon : il est de plus en plus important que les chercheurs retrouvent une place dans le débat politique urbain et dans la politique de la ville. Et quand il est question, ici, de chercheurs, il s’agit des chercheurs qui travaillent dans tous les domaines, tant des chercheurs dans le domaine de l’urbanisme que des chercheurs dans le domaine de l’histoire, dans le domaine des sciences sociales, dans celui de l’économie et dans celui des sciences politiques. Une ville de l’importance de Marseille ne peut avoir pleinement d’avenir que si elle entend le propos des chercheurs et de ceux qui réfléchissent à l’avenir en donnant du sens au présent grâce à leur étude du passé.

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