JO 2024 : la carmagnole des phryges…
Le coup d’envoi des Jeux va être donné par la cérémonie d’ouverture. On espère que les phryges sont aussi d’efficaces bonnets de bain. Sur le plan sportif, il est temps de regarder si tout est prêt, à défaut de constater que tout a été fait.
Il y a peu de risques d’être déçu par la cérémonie d’ouverture, qu’on souhaite privée de bérets basques et de baguette de pain : notre pays a souvent montré son inventivité et son talent dans l’exercice. Sont encore dans les mémoires les souvenirs de la célébration du Bicentenaire de la Révolution en 1989 (d’où l’hommage appuyé en 2024 aux bonnets phrygiens) et des spectacles offerts lors des JO d’hiver de 1992 à Albertville (ah, les élastiques et les sphères imaginées par Genty et Decouflé…).
Aucune information n’a été communiquée sur le contenu du spectacle (ouiche…), mais il est toutefois possible de délivrer quand même un scoop irréfutable : on va voir Emmanuel Macron partout. Et cela risque de durer pendant toute la durée des Jeux. Aucun dirigeant politique n’avait jamais pris avant lui une telle place dans le déroulé des Jeux organisés par son pays.
Après avoir fait la fortune du « en même temps », le Président a perfectionné l’idée avec un nouveau produit : le dissolvant-collant. Pourvu qu’il ait pensé à déposer un brevet.
Le sport français a donc maintenant son sparadrap. Après avoir trop tardé à donner l’engagement de l’Etat indispensable pour l’organisation des JO d’hiver 2030 par les Alpes françaises, le Président « Faites-moi-confiance » a arraché un accord du Comité international olympique pour attribuer cette organisation au prétendant, succès plutôt facilité par l’absence de concurrent. Le CIO s’est abstenu prudemment de signer ce contrat. C’est une première, donc un beau succès. Manu a donc du temps libre pour sauver les Girondins de Bordeaux, et trouver un avant-centre à l’OM.
Comme il ne fera probablement pas attention aux sifflets qu’il va recueillir dans les stades, un de ses proches aura peut-être le courage de lui faire remarquer qu’il lui faut remonter sa moyenne dans les résultats de ses multiples interventions. Par exemple, Kylian Mbappé n’est pas resté au Paris SG, et il ne participe pas aux JO. Le basketteur de NBA Joel Embid, qui dispose de trois passeports, n’a pas choisi le français pour venir à Paris. Pourquoi appeler Embid, si c’est pour toucher un bide ? Un président, ça ose tout et c’est à ça qu’on le reconnait ?
Il semble évident désormais qu’Emmanuel Macron attire la scoumoune sur les dossiers dont il s’occupe (on ne parle que de sport, hein), comme son prédécesseur était un chaman de la pluie. On espère pour nos deux grands espoirs que Teddy Riner et Léon Marchand ne lui ont pas communiqué leur 06.
En attendant, on compte sur ses doigts, sur ses côtes, sur ses vertèbres, sur ses cheveux (non, pas les miens…) les possibilités de succès émouvants. La France s’est mise à briller dans les disciplines collectives, ce qui provoque la stupéfaction du monde entier. Le bilan extraordinaire des sélections à l’issue des Jeux de Tokyo, il y a seulement trois ans, ne devrait pas instantanément s’effacer.
Les équipes de handball sont favorites, celles de basket (à 5 ou à 3) gardent de belles perspectives, le volley-ball masculin a retrouvé la clé de son jeu, et le rugby à VII a su attirer dans ses rangs le meilleur joueur de XV, quand les filles de ce beau sport se débrouillent toutes seules.
Le water-polo et le hockey sur gazon ont fait des progrès intéressants chez les hommes, et on a trouvé un nombre suffisant de pratiquantes qui savent nager. On ne cherchera pas de crosses aux hockeyeuses, ni de grain de sable chez les beach-volleyeurs.
Les promesses sont alléchantes, mais pour chacune de ces compétitions, il n’y a qu’une médaille à convoiter.
Sept ans après la désignation de Paris, et quatre ans avant les JO de Los Angeles, il est déjà trop tard… Il est stupéfiant de découvrir qu’alors que le succès est exigé partout par nos plus hautes autorités, un gros effort n’ait pas été appuyé pour alimenter le compteur dans des disciplines qui offrent de nombreuses médailles : aviron (qui devrait pourtant en toucher quelques-unes), canoë-kayak en ligne, boxe, lutte, haltérophilie…
La boxe devrait avoir du mal à égaler le bilan de Rio, mais n’en aura pas pour améliorer celui de Tokyo. De toute manière, les boxeurs savent qu’ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Et ne perdent plus leur temps à envier le judo et ses sponsors. Est-il permis de comparer le coût moyen d’une médaille en boxe (dix catégories, trente possibilités) et à celle convoitée pour le football masculin (dix-huit joueurs, trois possibilités) ?
L’escrime, le cyclisme, la voile et l’équitation suivent leur bonhomme de chemin et ne devraient pas rester bredouilles. Pour le pentathlon moderne, le triathlon, le tir à l’arc, la tradition reste vivace. Il faut espérer le coup de pouce d’un public qui pourra enfin découvrir au plus près ces épreuves spectaculaires.
En revanche, plusieurs dossiers restent ouverts dans la préparation purement sportive des compétitions. La situation la plus scandaleuse se constate pour le football. Chez les féminines, la désignation tardive d’un sélectionneur emblématique qui prépare déjà ses valises a pu donner l’impression que les divisions internes (notamment entre Lyonnaises et Parisiennes) allaient s’étouffer. Il est permis d’en douter. L’Etat n’aurait pas dû se contenter de distribuer des bisous, mais bien intervenir puissamment auprès de la Fédération française pour éviter les orages qui s’annoncent, malgré l’accumulation de grands talents.
C’est évidemment pire pour les garçons. Il fallait éviter de reproduire la catastrophe constatée à Tokyo, où la sélection s’est passablement ridiculisée. Or, on constate que la même Fédération a bloqué les joueurs éligibles les plus prometteurs sur le banc de l’Euro dont ils peu ou sont pas sortis (Barcola, Zaire-Emery, Konaté). Ce qui les empêche aujourd’hui de porter nos couleurs aux JO. Si le sélectionneur Thierry Henry arrive néanmoins à obtenir un bon résultat, tout le mérite sera pour lui.
Kylian Mbappé sera peut-être apte et disponible pour participer aux deux ou trois prochaines éditions des Jeux, s’il parvient à faire entendre sa voix au Real. Lionel Messi a été champion olympique en 2008, à 21 ans. Neymar y est aussi parvenu chez lui à Rio, à 24 ans. Cristiano Ronaldo a participé lui aussi aux JO 2008. Si l’action fédérale ne change pas d’ici aux JO de Los Angeles, Mbappé aura du mal à les rejoindre, quel que soit son désir qui parait sincère. Un tel gâchis devient un cas d’étude, avec félicitations du jury.
Puisque la boîte est ouverte, on ne manquera pas de saluer la manière dont l’expertise durement acquise par les entraîneurs français a été mise au tas.
Au tennis, pas moyen de compter sur un seul double, alors qu’ils alimentent trois podiums sur cinq.
En natation, aucun relais ne semble en mesure d’obtenir une récompense, et plusieurs finales se disputeront sans les Français. En athlétisme, il serait miraculeux d’approcher le podium dans les cinq épreuves et cela ne pourrait survenir que chez les filles, puisque les groupes de garçons sont rongés depuis des années par des égos boursouflés. Aucune de ces vedettes virtuelles n’est capable d’obtenir une médaille individuelle, mais les efforts mesurés pour obtenir l’aide olympique les empêchent de participer à un effort collectif. Les réussites nombreuses des relais français par le passé sont parties aux oubliettes. Il faudrait demander un coup de main aux Belges et aux Polonais, quand ils auront fini de se marrer.
Pendant qu’on y est, on saluera également la disparition du savoir-faire technique pour le saut en hauteur, le saut en longueur, les lancers du poids et du disque. Des expertises se maintiennent à grand-peine pour le demi-fond, les haies ou la perche. Il n’est qu’à constater les difficultés rencontrées par les athlètes des épreuves combinées pour obtenir des conseils de spécialistes. Et les meilleurs espoirs ultramarins n’ont toujours pas la possibilité de progresser chez eux, où les possibilités sont énormes.
Les escrimeurs s’embrouillent avec leurs cadres, et les judokas leur emboitent le pas.
Pour adoucir ce panorama rugueux, il faut se féliciter du dynamisme manifesté par les nouveaux sports olympiques, ou par les moins anciens qui n’ont pas eu le temps de s’encroûter au niveau fédéral.
Badminton, BMX, Escalade, Nage marathon, Rugby à VII, Taekwondo, Tennis de table, Triathlon, VTT : toutes ces disciplines accrochent un jeune public, ravissent les anciens par un spectacle échevelé, et portent de belles promesses.
Encore une fois, il ne s’agit pas de militer pour un comptage imbécile des médailles. Mais bien pour ouvrir en grand les fenêtres du sport et profiter du changement d’ère.
VIGNETTES
¤ Deux tournois olympiques sont déjà commencés. Le football masculin a joué d’emblée huit matches, et deux équipes se détachent déjà : le Japon, qui a écrasé 5-0 le Paraguay, et la France, d’abord accrochée puis dominatrice face aux Etats-Unis (3-0). Le tout premier match de ces JO s’est achevé dans la confusion à Saint-Etienne et le Maroc a battu l’Argentine (2-1) après une interruption de près de deux heures, provoquée par les excès de ses supporters et conclue par l’annulation d’un but argentin par l’assistance vidéo, puis une reprise du jeu pendant cinq minutes. Le foot doit se faire expliquer l’esprit olympique, qu’il faudra enseigner aux ultras.
¤ Le rugby à VII a lui aussi démarré en avance. Les favoris fidjiens ont passé deux raclées à l’Uruguay et aux Etats-Unis, que l’équipe de France a difficilement battu (17-12) pour le premier, et rejoints sur le fil (12-12) pour les seconds. Les partenaires d’un Antoine Dupont encourageant sont déjà qualifiés pour les quarts, avant d’affronter les Fidjiens. Dans les autres groupes, l’Argentine, l’Australie, l’Irlande et la Nouvelle-Zélande ont fait bonne impression. Ce sport olympique récent donne une impression de déjà vu.
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