Le parquet de Marseille demande le renvoi en correctionnelle de deux proches de Muselier

Renaud Muselier en 2021. (Photo : Emilio Guzman)

C’est une affaire dans laquelle Renaud Muselier occupe un des rôles principaux tout en ne risquant rien personnellement. L’affaire d’atteintes à la probité au sein de l’office HLM Habitat Marseille Provence se rapproche d’un procès. Selon les informations de Marsactu, le parquet de Marseille a rendu le 10 novembre un réquisitoire dans lequel il demande à voir traduites devant un tribunal correctionnel huit personnes, dont l’ex-femme du président de région, l’avocate Stéphane Clément, et l’ex-directeur général de HMP, Jean-Luc Ivaldi, un des collaborateurs historiques du président (Renaissance) de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Aux yeux du procureur, Jean-Luc Ivaldi serait intervenu afin que “Stéphane Clément, alors épouse de Renaud Muselier, avec lequel il entretenait […] tant une relation professionnelle étroite qu’un lien d’amitié, soit désignée comme avocate de l’établissement public”. Une décision qui lui vaut d’être proposé pour un renvoi pour prise illégale d’intérêts et Stéphane Clément pour le recel de ce délit. En revanche, le parquet recommande d’abandonner les poursuites pour d’autres avocats, choisis sans marchés, dont certains étaient mis en examen pour recel de favoritisme. Les procureurs estiment que l’élément intentionnel n’est pas assez caractérisé.

Un directeur général “redevable”

Le dossier est loin d’être un nouveau-né de la justice marseillaise. Les faits décrits sont concentrés sur les années 2009 à 2011 et elles inquiètent depuis lors les intéressés comme le président de région. Dans un précédent article de Marsactu, Érick Campana, l’avocat de Stéphane Muselier, évoquait même une “épée de Damoclès” planant depuis trop longtemps au-dessus de sa cliente. Face à ce réquisitoire, il estime que “le parquet se raccroche aux branches, il veut accrocher ma cliente. Elle a eu ce marché au regard de ses capacités et de ses connaissances. Le fait qu’elle soit l’ex-femme de M. Muselier et une amie de M. Ivaldi n’est pas entré en ligne de compte. On parle de dossiers qui rapportent 400 euros de l’heure, ce qui n’est pas beaucoup pour un avocat. “

Au cours de l’enquête, l’avocate a défendu avoir mené seule sa carrière : “Je travaille sous mon nom de jeune fille pour éviter l’amalgame. Je suis très indépendante et je n’aimerais pas penser que mes clients viennent me voir parce que je m’appelle Muselier. Si c’était le cas, j’aurais une clientèle très différente et très importante, j’imagine.” Ouverte en 2011, l’enquête a longtemps végété avant de connaître un dernier coup d’accélérateur avec la mise en examen le 12 octobre 2021 de Jean-Luc Ivaldi.

À LIRE

La justice ravive une affaire embarrassante pour Renaud Muselier

Lors de sa comparution devant la juge d’instruction, Jean-Luc Ivaldi avait reconnu avoir donné ordre de confier 60 % des dossiers juridiques du bailleur social à Stéphane Clément. Il précisait alors qu’elle était “la moins chère” des avocats et défendait un choix “de gestion”. Mais, objecte le vice-procureur Mathieu Vernaudon pour le parquet, il aurait dû se déporter du sujet avant toute autre considération. “L’intégralité de la carrière de Jean-Luc Ivaldi, y compris le poste qu’il occupe actuellement, se trouve en relation avec Renaud Muselier, qu’il a suivi au Parlement, au gouvernement ou au sein des collectivités dont ce dernier a été élu ou au sein de leurs satellites. Dans cette mesure, il peut également apparaître redevable à l’élu de sa situation professionnelle. Ces éléments établissent qu’il disposait d’un intérêt moral, direct et indirect dans la décision prise au profit de Stéphane Clément.”

Des marchés passés sans concurrence

C’est désormais à la juge d’instruction Cynthia Fabre de statuer sur leur sort et de décider d’un éventuel procès. Le procureur lui suggère de renvoyer par la même ordonnance six autres anciens acteurs de l’office HLM pour d’autres atteintes à la probité. C’est notamment le cas de l’ancien président Bernard Oliver qui se voit reprocher l’indemnité de départ de plus de 200 000 euros, qualifiée de détournement de fonds publics, accordée à une ancienne directrice générale, elle-même poursuivie pour recel.

Cette dernière, Nicole L’Hernaut, est aussi visée pour des délits de favoritisme après l’octroi de plusieurs marchés publics sans mise en concurrence pour des prestations de conseil, de syndic et de commissariat aux comptes. Pour partie de ces délits, Bernard Oliver et une ancienne directrice générale par intérim devraient eux aussi être traduits devant un tribunal, selon le procureur. Les bénéficiaires de ces faveurs sont aussi visés par le ministère public dont le syndic Foncia.

Les huit personnes morales et physiques bénéficient à ce stade chacune de la présomption d’innocence. Contactés, l’avocat de Jean-Luc Ivaldi, Fabien Pérez, Gilbert Sindrès, conseil de Bernard Oliver et Mario Stasi pour Nicole L’Hernaut n’ont pas fait de commentaires à cette heure.

Actualisation à 17 h : Ajout d’une citation d’Érick Campana, conseil de Stéphane Clément.