Stars, paillettes et dépôt de bilan pour l’Athlético Marseille
L'Athlético Marseille, ex-GS Consolat, vient de déposer le bilan après quasiment soixante ans d'existence. Une fin qui n'étonne pas, tant les instances de contrôle ont alerté sur la gestion du club depuis sa reprise par l'ancien joueur de l'OM Souleymane Diawara et son conseiller Karim Aklil, associés à Cyril Hanouna.
Stade de l'Athletico Marseille de La Martine. (Source : Malost via Wikimédia, CC)
Habitué des pelouses des clubs de foot des divisions amateurs, Jean-Luc Mingallon joue le dernier match de “son” équipe sur un tout autre terrain. Celui du tribunal judiciaire de Marseille. Le suspense sur l’avenir de l’Athlético Marseille, ex-GS Consolat, n’a rien à voir avec celui d’une rencontre de foot. Depuis plusieurs mois, le président historique annonce pour bientôt le dépôt de bilan du club du stade de la Martine (15e arrondissement). La justice a finalement liquidé l’association vendredi 1er juillet.
Début juin, le club fondé en 1964 profite déjà de la fin du championnat de son équipe première pour déclarer qu’il s’agit du “dernier match de Consolat (…) avant la fermeture définitive”. Une fin qui concerne la section adulte, mais aussi les catégories jeunes qui réunissent 700 enfants. Preuve que le scénario était inéluctable les comptes de l’association pour la saison dernière, donc d’août 2020 à juin 2021, mais validés début 2022, n’ont même pas été déposés. Dans ceux de la saison précédente, la ligne “dettes” affiche un chiffre cumulé de 407 086 euros.
Le destin de Consolat s’est joué depuis quatre ans, une éternité à l’échelle du football. Dans les instances en charge de contrôle de la santé des clubs, la direction nationale de contrôle de gestion, plus connue sous son sigle DNCG, et son émanation régionale, personne ne semble surpris. On confie avoir vu l’Athlético Marseille foncer dans le mur malgré les avertissements. “Ils ont dépensé plus que ce qu’ils ont encaissé avec beaucoup trop de joueurs sous contrats et leurs recettes prévisionnelles n’étaient pas tenables”, glisse-t-on. Ce qui a conduit à des retards dans les versements des salaires, dans le paiement de certains prestataires et une dette auprès de l’Urssaf d’au moins 234 000 euros selon les derniers comptes publiés. Il y a deux ans, la commission régionale de contrôle des clubs (CRCC) de la ligue de la Méditerranée évoquait déjà un “risque de remise en cause de la continuité d’exploitation de l’association”.
Le temps des promesses
“C’est le fruit d’une mauvaise gestion“, lâche, amer, Jean-Luc Mingallon, qui n’était plus au club entre novembre 2017 et janvier 2022. Il pointe comme responsable l’homme aux rênes à ce moment-là Karim Aklil. Cet ancien agent de joueurs, que Marsactu n’a pas réussi à joindre, n’a été nommé comme président que début 2019. Soit un an et demi après l’arrivée au club de Souleymane Diawara comme actionnaire et Mamadou Niang au sein du staff sportif. Karim Aklil est le conseiller historique de ces deux anciens joueurs de l’OM et il se trouvait déjà régulièrement au stade de la Martine bien que n’occupant aucune place dans l’organigramme. Dès le début du projet, il représentait le club en coulisses.
Il a pu suivre de près la direction alors en place et la voir promettre monts et merveilles pendant 18 mois. L’effectif change alors radicalement, avec notamment l’arrivée surprenante d’un ex-champion de France, Karim Aït-Fana. L’objectif est d’atteindre la ligue 2 pour 2022, de quoi faire de Consolat le deuxième club professionnel de Marseille. Un vieux rêve des amateurs de foot nourri par ce qui existe dans la plupart des championnats étrangers comme à Barcelone, Gênes ou encore Munich.
Comme souvent dans le foot, nous nous sommes retrouvés face à des personnes pleines de projets mais sans argent.
Richard Miron, ex adjoint aux sports
En parallèle, un projet de stade de 20 000 places à l’Estaque symbolise ces envies de grandeurs. Il doit permettre de répondre aux normes de la Ligue 2 et même de la Ligue 1 – alors que le club est en quatrième division – et permettre l’aménagement de tout le quartier pour au moins 40 millions d’euros. Au passage, le GS Consolat devient l’Athlético Marseille et l’animateur télé Cyril Hanouna se présente comme investisseur. Celui-ci ne se prive pas de vanter dans ses émissions son aventure sportive. Arguant d’un manque de soutien à Marseille, le club se rapproche d’Aix-en-Provence dans l’idée de créer une entité métropolitaine. Mais très vite les merveilles promises s’envolent et il ne reste que des monts bien difficiles à grimper. “Comme souvent dans le foot, nous nous sommes retrouvés face à des personnes pleines de projets mais sans argent”, se souvient Richard Miron, adjoint (LR) aux sports à la Ville à l’époque.
Une absence de moyens qui se transforme en problème durant l’été 2019. Le club vient de passer la saison en national 2, quatrième division, où il a été rétrogradé sportivement un an plus tôt. Mais cette fois, la montée ou la descente ne se joue pas sur le rectangle vert mais dans les bureaux des gendarmes financiers du foot qui actent des relégations administratives de plus en plus lourdes. Grâce à des procédures en appels, le club se maintient finalement en national 3 où il a évolué jusqu’à il y a quelques semaines.
Comptes douteux et faux soutiens
Les instances justifient leurs sanctions à cause des doutes sur les comptes de la saison 2018-2019. Celle durant laquelle est arrivée Karim Aklil. Ils ne sont en effet pas certifiés, sans que le club n’en justifie la raison. Les soupçons planent sur les revenus déclarés par le club. En clair, les sommes affichées ne seraient pas réellement touchées. La CRCC parle notamment d’une avance de trésorerie de 100 000 euros réalisée juste avant le passage devant la DNCG, permettant de maintenir le club, puis remboursée le mois suivant.
La provenance des recettes interroge également, à l’image des fameux “socios”. Il s’agirait de 165 supporters qui auraient payé 1000 euros chacun pour soutenir le club en échange d’avantages qui ne sont pas précisés. “Même l’OM n’a pas ça et ces personnes étaient des jeunes qui n’habitaient même pas dans la région”, explique-t-on de façon plus que dubitative du côté des instances.
C’est la “fausse lettre de Renaud Muselier”, révélée par l’Équipe, qui porte l’estocade. Dans un dossier présenté aux instances de contrôle, celles-ci trouvent un courrier daté de juillet 2019 et signé du président région dans lequel il s’engage à apporter au club une subvention de 230 000 euros maximum. Mais le document est un faux. “Après cet épisode, les collectivités se sont retirées”, affirme une source proche du dossier. “Nous étions obligés de prendre nos distances à ce moment-là”, confirme Richard Miron.
Pour la FFF, la rétrogradation en nationale 3 est une “sanction qui peut même apparaître clémente” .
Cet évènement conduit d’ailleurs la commission supérieure d’appel de la Fédération française de football (FFF) à écrire en juillet 2020 que la rétrogradation de l’Athlético Marseille en nationale 3 est une “sanction qui peut même apparaître clémente”. L’organe interdit également à Karim Aklil d’être licencié FFF pour une durée de 10 ans. Elle l’avait déjà dans le collimateur depuis plusieurs années pour exercice illégal de la profession d’agent de joueur, un motif pour lequel il a été renvoyé en correctionnelle dans le cadre du procès sur les comptes de l’OM.
L’équipe, redevenu Consolat, se cherche donc de nouveau un avenir sportif. Un rapprochement devrait se faire avec le club de Septèmes pour les catégories jeunes, mais aussi les adultes. De quoi enfin retrouver son terrain de prédilection, celui du foot.
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