[Mes châteaux d’If] Chanson anarchiste

Billet de blog
le 22 Sep 2021
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Christophe Goby a longtemps écrit pour la revue Silence, le magazine CQFD, il collabore aujourd'hui au Monde Diplomatique aux pages livres. Il tient ici une chronique littéraire qui embrasse le monde dans toute sa diversité.

Le château d
Le château d'If (Crédit : Milena/Flickr)

Le château d'If (Crédit : Milena/Flickr)

Une poignée de personnes triées sur le volet social sont accueillies dans un garage de la Belle-de-mai pour y écouter le groupe « La corde raide ». Jean-Claude, facétieux interprète dira ce vendredi soir qu’ils se nomment « On est là » Essayez de vous y retrouver, mais avec les anarchistes, ils ont beau être un sur cent, on ne les comprend pas. Alors un nom  extrait d’un slogan des Gilets Jaunes, pourquoi pas pour une soirée.

En préambule, un jeune Guinéen du collectif Saint-Just manque de nous faire chialer en nous racontant son périple en Libye et en nous remerciant d’être venu. On se retient entre gens de bonne compagnie. On passe du rire aux larmes, car il a la verve facile et l’humour des rescapés. Le présentateur offre un sourire merveilleux. Le concert va commencer. Le répertoire est rare pour la chanson française actuelle. Selon mes informations. 

La Semaine sanglante, chant de la Commune de Paris, dont on fête mollement les 150 ans cette année, est interprétée à deux voix par Françoise et Jean-Claude. Ils enchainent avec du Lavilliers, et l’émouvante mélopée Betty dont il rappelle que c’est en mémoire d’Albertine Sarrazin, autrice de l’Astragale et de La Cavale. Mais méfiez-vous de cette rumeur, Bernard a toujours préféré la légende à la vérité. Albertine Sarrazin fut prostituée, délinquante et prisonnière, notamment à la prison du bon pasteur à Marseille. À l’époque où Marseille comptait deux prisons de trop, dont une, boulevard Chave. La vie d’Albertine est une véritable aventure qui s’est mal finie. Si vous connaissez des vies aventureuses qui finissent dans un canapé, prévenez-moi. Les paroles de la chanson font ça :

« Tu es ma frangine, 

juste une féminine 

Que j’avais rimée

Je te donne ma force, mes mots et mes notes

Pour te réchauffer 

Je hais la morale, les prisons centrales

Les maisons d’arrêt »

Françoise, élancée et distinguée, habillée de noir, sorte de Brigitte Fontaine marseillaise chante la chanson de l’Enfermé, Auguste Blanqui, Ni Dieu Ni maitre, que l’on connaît dans la bouche de Léo Ferré. 

« Cet avocat à la serviette 
Cette aube qui met la voilette 
Pour des larmes qui n’ont peut-être… » 

On lira en véritable curieux, Maintenant il faut des armes d’Auguste Blanqui aux éditions La Fabrique qu’on trouvera certainement en fouinant à la librairie l’Hydre aux mille têtes à la Plaine. Les trois musiciens discrets assurent comme des bêtes sauvages mises en cage en accompagnant le chant. Les chants anarchistes succèdent aux airs de liberté. Ainsi passe la soirée en soutien au collectif Saint Just et aux mineurs non accompagnés du département. On aura entendu des chansons carcérales sur des airs de salsa. À se demander si la liberté et la taule ne se rejoignent pas.

Boite Noire comme on dit chez Mediapart : J’ai manqué la seconde partie pour récupérer mon fils au skate park de la Friche. Là bas, en donnant du feu à un jeune homme à qui je montrais l’inscription sur mon briquet : « J’aime la Plaine/ By le St Michel » il me répondit du tac au tac : «  Ben moi, tu vois, j’aurais pas l ‘idée d’un briquet marqué «  J’aime les Rosiers ». Du nom de sa cité dans le 14e. 

Une soirée poétique, j’vous dis. Il paraît que le groupe va encore se produire à l’Après M’  dimanche 26 septembre. À ne pas manquer.

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