Dimanche 8 août 2021

Main dans la main

Billet de blog
le 8 Août 2021
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Entre pompe et légèreté, la cérémonie de clôture des Jeux de Tokyo s’est projetée vers la prochaine édition, en 2024 à Paris. Le dernier jour des compétitions s’est terminé avec l’apothéose du handball français, puisque les filles ont obtenu l’or comme les garçons, faisant main basse sur la discipline.    

Créé par les Allemands, le handball est devenu une spécialité française. Le doublé olympique réalisé dans les tournois masculin et féminin est un événement rare, qui n’a été réalisé que par les Américains en basket (à huit reprises, il est vrai, et ici même au Japon), l’URSS en volley (1980, à Moscou), l’URSS encore (1976) et la Yougoslavie (1984) en handball. Les autres sports collectifs (football, hockey, water-polo, rugby à VII) n’ont jamais connu une telle mainmise d’un même pays.

Pour y parvenir, les handballeuses tricolores ont fait preuve d’une maîtrise impressionnante, malgré l’agressivité et le talent des Russes. Elles ont pu s’appuyer sur les exploits de leur gardienne, une grande solidité défensive, et du réalisme dans la transformation des pénalités, dont les autres équipes de France devront s’inspirer à l’avenir.

Le double succès des handballeurs permet d’espérer des suites joyeuses dans trois ans. L’encadrement des sélections a prouvé sa qualité. Guillaume Gille est parvenu à s’installer rapidement et solidement à la conduite d’un effectif masculin composé de personnalités affirmées. A la tête des filles, on peut souhaiter qu’Olivier Krumbholz prolonge sa tache jusqu’à Paris, maintenant que les difficultés vécues dans sa longue mission ont été effacées par le titre olympique. Il sera difficile de déterminer qui pourrait lui succéder.

Pour l’équipe de volley, le problème est réglé : Laurent Tillie s’en va, auréolé d’or, et son successeur, entraîneur brésilien de grand renom, est déjà désigné.

Les sélections de basket posent un problème différent. Valérie Garnier et Vincent Collet sont en poste depuis longtemps, et sont tous deux soutenus par leurs effectifs. Leur rôle dans l’ascension progressive vers les sommets de la discipline est important et indiscutable. Mais tous deux semblent avoir démontré la difficulté à apporter la petite différence nécessaire pour toucher l’or, que ce soit en termes d’inventivité tactique, ou de gestion des remplacements. Eux aussi continuent d’apprendre, et sont capables de progresser. Mais peuvent-ils piquer l’égo de leurs vedettes, qu’ils connaissent depuis si longtemps ? Aucune certitude ne peut exister à ce sujet : les mêmes craintes pesaient sur Laurent Tillie, et il est aujourd’hui champion olympique…

Ces résultats collectifs ne se reproduiront pas tous à Paris, il faut rester réaliste. Il n’est pas interdit en revanche d’espérer une meilleure participation des footballeurs à la fête, ce qui ne sera pas un effort écrasant.

Le ballon rond s’est montré bien aimable d’abandonner un instant l’espace médiatique qu’il accapare tout au long des années. Mais le sport numéro 1 en France ne peut reproduire cette absence dans trois ans. Il faut rappeler aux footeux que leurs revenus dépendent aussi de nos impôts, qui ont permis de construire la majorité des stades où ils évoluent, et qui ont garanti à grands frais la survie de leurs clubs professionnels pendant la pandémie. Les succès des autres sports collectifs sont infiniment moins coûteux…

Le tournoi olympique 2024 sera peut-être la dernière occasion de voir gratuitement du football à la TV. On espère y voir bouger des maillots bleus. C’est à Paris, du reste, qu’ils ont conquis leurs premiers grands succès internationaux, l’Euro en 1984 au Parc des Princes et le Mondial 1998 au Stade de France, futur stade olympique.

Le président de la Fédération, Noël Le Graet, a choisi de déléguer son pouvoir. C’est admissible, si on sait choisir les bons représentants. Les résultats récents n’ont pas été stupéfiants, que ce soit pour l’Euro, pour les JO, ou pour la négociation sur la présence du football dans le nouvel univers médiatique. Pour ne pas aller vers un échec total et retentissant, il est encore temps de décréter une urgence nationale.

Pour les sélections de football, se pose là encore un problème d’encadrement. Malgré toutes ses qualités, et sa patience y figure au premier rang, Sylvain Ripoll ne paraît pas disposer d’assez de charisme auprès des garnements gâtés qui composent l’essentiel de la sélection des Espoirs, base de recrutement de l’équipe olympique.

En 2024, la France est sélectionnée d’office, ce qui retire d’emblée un (gros) problème. Il serait sans doute judicieux de nommer un autre sélectionneur, au renom incontestable, qui pourrait en imposer aux jeunes pousses et aux dirigeants de leurs clubs. Thierry Henry serait l’homme idéal à nos yeux, mais il existe sans doute des alternatives.

Pour la sélection féminine, plus à même sans doute de convoiter une médaille (voire un titre) à Paris, le soutien indéfectible de Noël Le Graet à Corinne Diacre a sans doute atteint ses limites. C’est une personne estimable, et une femme de grand caractère. Mais ses meilleures joueuses le sont également, et leur cohabitation tourne au conflit récurrent, qui complique encore la rivalité exacerbée entre joueuses lyonnaises et parisiennes. Il n’est pas trop tard pour installer une personnalité indiscutable à la tête de la sélection. Pour le coup, il serait peut-être pertinent de recruter un(e) entraîneur étranger(e), afin de passer au-dessus des querelles de clochers. Puisque la Fédération en semble incapable, il faut sans doute une action résolue du Comité d’organisation des JO et du ministère. Le foot français n’a aucun besoin de prendre le risque d’un échec supplémentaire.

Pour revenir sur la dernière journée des compétitions à Tokyo, elle a mis en valeur (à Sapporo, pour le coup) le marathon masculin, remporté avec aisance malgré une chaleur accablante par le tenant du titre et recordman du monde, le Kényan Eliud Kipchoge (36 ans). Il rejoint ainsi, sans le faire oublier, l’Ethiopien Bikila Abebe (vainqueur à Rome en 1960 et lui aussi lors des JO de Tokyo en 1964) au Panthéon de cette épreuve symbolique.

Les Français Nicolas Navarro (30 ans) et Morhad Amdouni (33 ans) se sont classés avec mérite aux 12e et 17e places, assez loin du vainqueur. On espère pour eux, sans y croire tout à fait, qu’ils pourront maintenir la tradition des vainqueurs français de l’épreuve quand elle est courue à Paris (1900 et 1924).

La cérémonie de clôture des Jeux a pris la bonne habitude d’accueillir la célébration des vainqueurs des marathons féminin et masculin, avec un hommage spectaculaire à l’athlétisme kényan, qui s’est imposé sans discussion dans les deux épreuves. Il avait fallu rapatrier dare-dare Kipchoge depuis Sapporo (à plus de 800 km) où il s’était imposé dix heures auparavant.

Pour le reste, la cérémonie a rappelé le rituel d’ouverture, avec de longs tunnels de discours, un défilé joyeux des délégations amincies (de nombreux participants ont été fermement invités à regagner leurs pénates), et des tableaux supposés représentatifs de la culture japonaise. Là encore, on a été ému par les trop brèves évocations de la tradition, et agacé par l’exposition des modes actuelles aux formats mondialisés.

Ce seront peut-être les mêmes remarques dans trois ans à Paris, si les organisateurs ne retrouvent la magie présentée en 1992 à Albertville, ou en 1989 pour la célébration du bicentenaire de la Révolution française. Croisons les doigts… Il est permis d’être optimiste, car la présentation de Paris lors du rituel de transmission du drapeau olympique nous a semblé alléchante, et innovante. Dommage qu’il ne soit pas resté assez de temps pour évoquer la participation de Marseille, pour les épreuves de voile, de Tahiti, pour le surf, et des régions qui accueilleront le tournoi de football.

Rendez-vous dans trois ans.

 

VIGNETTES

¤ En boxe, la catégorie des lourds (plus de 91 kg) a été gagnée par l’Ouzbeck Bakhodir Jalolov. Il a écarté successivement le Britannique Clarke, vainqueur controversé du Français Aliev en quart de finale, puis l’Américain Torrez, qui n’atteindra pas la gloire réservée par son pays aux vainqueurs olympiques de la catégorie reine.

¤ Le cyclisme sur piste a boudé les Français jusqu’au bout, ce qui est passablement inquiétant avant les Jeux de Paris. La jeune Clara Copponi (22 ans) a terminé 8e de l’omnium, après avoir été prise dans une chute collective impressionnante.

¤ En gymnastique rythmique, la Russie a perdu pour la première fois (devant la Bulgarie) l’épreuve des ensembles. Il paraît qu’il s’agit d’un événement sportif, on le mentionnera donc poliment.

¤ La fougue de l’équipe féminine de basket japonaise n’est pas venue à bout de la solidité et du talent des Américaines en finale. Elles obtiennent leur 7e titre olympique consécutif depuis les JO d’Atlanta en 1996. Diana Taurasi et Sue Bird (compagne de la footballeuse Megan Rapinoe, médaille de bronze à Tokyo) ont obtenu ensemble leur 5e médaille d’or d’affilée. Un record sans doute insurpassable. Ce titre permet par ailleurs aux Etats-Unis de passer de justesse devant la Chine au classement des médailles.

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