Cafés, restaurants, boîtes de nuit veulent “travailler, pas être aidés”
Quelque 3500 personnes ont manifesté jeudi à Marseille. Après les annonces du président, ils demandent la réouverture imminente de leurs commerces. Les aides ne suffisent plus, aujourd'hui tous veulent une chose : travailler.
Mimi Push Up, drag queen, manifeste jeudi 26 novembre à Marseille pour la réouverture des bars, restaurants et boîtes de nuit sans lesquels elle ne peut exercer son métier. (Crédit : Yasmine Sellami)
Visages fermés, sourcils froncés au-dessus des masques et marche déterminée, une foule impressionnante se dirige vers la mairie de Marseille, en ce début d’après-midi du 26 novembre. Le long cortège s’étale de l’imposant bâtiment de la Ville à l’église Saint-Ferréol, au coin du Vieux-Port, regroupe les différentes professions dites “non-essentielles”. Deux jours après les annonces d’Emmanuel Macron qui renvoient leur potentielle réouverture à 2021, cafés, restaurants, monde de la nuit et salles de sports s’ébranlent pour aller crier leur colère devant la préfecture.
Nadia Adou avait entamé des travaux pour réaménager son bar aux Catalans (7e) et l’adapter aux critères de distanciation sociale. Elle espérait le maintenir ouvert. “J’aime mon métier, je tiens à continuer là-dedans, mais ils ne nous ont pas laissés faire nos preuves”, déplore-t-elle. Un sentiment d’injustice partagé par Laetitia Recking, gérante d’un restaurant à Aix-en-Provence. “J’ai fouillé les titres de presse, je me suis renseignée, rien n’indique que c’est chez nous que les clusters se forment, c’est une décision arbitraire”, tranche-t-elle.
Casquette et veste floquées Rhumerie Couleur Café, Mouss, gérant de l’établissement marche en tête de cortège. Son masque chirurgical souligne son regard triste. “Les annonces d’hier m’ont mis le deuxième genoux à terre ! Je n’y arrive plus malgré les aides moi ! J’en suis à mon deuxième crédit, comment je vais faire ?”, se lamente celui qui désormais n’exclut pas une reconversion professionnelle. “Je fais mon métier depuis 23 ans mais là ils ont réussi à me dégoûter, je ne veux plus l’exercer. Je fais des livraisons juste pour ne pas déprimer et garder du lien mais économiquement, c’est pas du tout rentable”, regrette-t-il.
Et il n’est pas le seul à tenir ce discours. De nombreuses pancartes affichent le même slogan écrit en rouge et blanc sur fond noir : “je veux travailler… pas être aidé”. Derrière le nuage rose sorti des fumigènes, une silhouette se démarque. Tignasse bleue agrémentée d’un petit voile blanc, traits du visage fortement marqués par un maquillage multicolore, une longue robe cocktail scintillante et un grand collier de perles sur un décolleté généreux, celle qui se fait appeler Mimi Push Up exprime elle aussi son ras-le-bol. “Je suis drag queen, je fais des shows dans les boîtes de nuit, les bars et les restaurants, tous mes employeurs sont fermés depuis des mois…” soupire-t-elle. L’artiste s’apprêtait à signer un CDI lorsque tout s’est arrêté.
Les “grands oubliés” de la nuit
“Nous, le monde de la nuit, on est les grands oubliés“, complète Christophe Longo, patron d’un club à Aix-en-Provence et président du collectif des discothèques en colère PACA Corse. Il poursuit : “On n’arrive même plus à faire des courses dans les supermarchés à ce stade, on n’a aucune perspective, il faut qu’ils nous autorisent à rouvrir en même temps que les restaurants !”
Le cortège ne cesse de grossir à l’approche de la place Félix-Baret, jusqu’à atteindre quelque 3500 personnes selon la préfecture de police. Parmi, eux, de très nombreux élus locaux de droite sont présents en soutien. À plusieurs reprises, les ténors de la droite ont reproché à la municipalité de gauche de ne pas être présente lors des différentes manifestations de commerçants. De Renaud Muselier à Martine Vassal, les principaux LR sont là tout comme le leader RN Stéphane Ravier. Si des élus de gauche sont là, ils se font plus discrets.
“Sauver Marseille et ses commerces !”
Arrivés en face de la préfecture de région, des acteurs du monde économique local prennent la parole à tour de rôle. Tous martèlent la même demande : une réouverture rapide. “Nous sommes réunis aujourd’hui sans distinction de couleur politique. Ce qui nous intéresse c’est sauver Marseille et ses commerces”, précise, derrière le micro, Bernard Marty, président de l’UMIH 13. Une déclaration qui déclenche une pluie d’applaudissements.
Quelques détonations de pétards et des bruits de sirène rythment le trajet, mais les trois heures de mobilisation se déroulent sans violence. Une forte solidarité plane sur le cortège. Les différents syndicats professionnels ont mobilisé jusque dans les départements voisins, voire même les régions voisines. Sandra Carlos a fait le déplacement depuis Aix-en-Provence, où elle tient un magasin de jouets. Son commerce rouvre samedi prochain mais elle a tout de même décidé de venir soutenir les autres. Couronne sur la tête et larmes dessinées sur son masque chirurgical, elle confie d’une voix fluette : “Nous sommes certes soulagés, mais le soulagement n’est que partiel. Il faut autoriser tout le monde à reprendre son travail.” Reçus, en préfecture, les manifestants sont ressortis déçus. Ils n’obtiendront rien avant les prochaines annonces nationales du 15 décembre et appellent à maintenir la pression sur le gouvernement.
Vous avez un compte ?
Mot de passe oublié ?Ajouter un compte Facebook ?
Nouveau sur Marsactu ?
S'inscrire
Commentaires
0 commentaire(s)
L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.