Dicovid 19-20
Télétravail
Une idée pour ces temps de confinement : élaborer un mini dictionnaire des mots du moment. Et jouer avec ces mots pour se jouer des maux. Ce sera mon rendez-vous quotidien.
Réveil comme d’hab, douche et ptit dej vite fait, pyjama de jour : c’est peinard d’aller à pied à son boulot surtout quand le bureau est au fond du couloir. Je salue à la cantonade, ouvre mon ordi, pose ma gourde de citronnade et parcourt mes courriels en enfilade. Me vpoici prêt pour la première réunion de la journée. Ecran mosaïque, arrière-plans d’appartements, micro et caméra en place, cadrage du chef, clic sur la petite main pour prendre la parole : c’est parti.
Vous m’avez reconnu, je suis le petit télétravailleur infatigable, le cloîtré laborieux, le workaholic frénétique. Et je télétravaille dans la joie.…Excusez-moi, collègues, je vous laisse un instant car le minot braille. Je vais lui préparer son biberon (quel privilège de pouvoir prendre un temps de respiration en pleine réunion !)…Ca y est, je reviens vers vous. Où en étions-nous ? Oui, oui, en effet, vous avez tout à fait raison, vu les circonstances je n’aurais pas dit mieux (en revanche, on pourrait mieux voir, la bande sature ou quoi ?), le plan est au point et pertinent nant nant, c’est parti ti ti, on y va va va. Et patati et blablabla, ainsi passe la journée de travail confiné. Structurer son activité, fixer des horaires, noter ses rendez-vous sur l’agenda, définir des objectifs précis, limiter les interruptions, établir des rituels, faire une pause café-clop chacun sur sa terrasse : le guide des bonnes pratiques du télétravail est bien utile en ce moment. Le principe général est simple : à la maison comme au travail. Taylor en a rêvé, le corona l’a fait. Et en fin de journée apéro partagé sur skype et envoi de blagounettes sur whatsapp pour entretenir l’esprit community. Toujours garder la corporate attitude. Et prendre le pouls des troupes quand on est n+1.
Il paraît que certains sont en souffrance ! La bonne blague. T’es quand même chez toi (comme un cocon empâté), t’es pas dérangé (excusez-moi, j’ai une alerte), tu varies tes activités (attends, tu vois bien que je travaille), t’es à ton rythme (non, ce n’est pas encore l’heure de l’histoire), t’es cool quoi. D’accord, ça manque un peu de coordination mais cela nous oblige à inventer, on est très sollicités mais c’est la preuve qu’on est appréciés, hyperconnectés mais c’est bon de garder Le lien en ce moment, surchargés mais c’est une question d’organisation, sous pression mais c’est normal, le travail a toujours été ambivalent : t’es laid travail, t’es beau travail. Et quand on bascule en mode home office, il y a forcément des problèmes de conciliation home-office, des difficultés d’intendance (faut que je lui change sa couche, heureusement qu’il y a la touche silence) et une accumulation de fatigues. On dit que la productivité est moindre : où est le problème ? Que l’on regrette les échanges informels autour de la machine à café : c’était vraiment utile ? Que la pression est forte : c’est nouveau ? Que le contrôle s’est accru : c’est un souci quand on est un professionnel engagé ?
Bon, allez, j’ai assez télétravaillé aujourd’hui. Rapport à la saturation et aux yeux collés sur l’écran. Il faut que je débranche et, de toutes façons, c’est l’heure du dessin animé du minot. Décidément, la bulle de confinement, c’est vraiment pas la bulle.
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