Dicovoïd 19-20
Balade
Une idée pour ces temps de confinement : élaborer un mini dictionnaire des mots du moment. Et jouer avec ces mots pour se jouer des maux. Ce sera mon rendez-vous quotidien.
Chausser ses chaussettes sèches et ses chères chaussures usées. Retrouver son bermuda et sa chemisette de coton. Préparer une salade de lentilles aux oranges, carottes et échalotes, emballer pélardon et banon, empocher les fruits secs, abreuver gourde et topette, charger le sac. Consulter son topo guide, parcourir les chemins proposés en laissant affleurer les souvenirs et choisir une destination. Ne pas oublier maillot de bain, gants et masque. Faire quelques pas, franchir une marche et atteindre… le balcon. Caler une chaise, allonger les jambes contre la rambarde et regarder le ciel. Fermer les yeux. Tendre nez et oreilles. Humer l’odeur des pins et s’installer dans la mémoire de la pine plate des dimanches d’enfance. Entrouvrir les paupières. S’emplir de lumière. Sentir le vent sur les mollets. Se pencher en arrière et partir. Partir.
Se laisser guider au fil de ses pensées (sans balcon et fenêtre ouverte c’est jouable aussi). Remonter d’un bon pas l’autoroute pédestre de Luminy aujourd’hui déserte. Atteindre le col puis le promontoire. Croquer quelques mendiants et retourner son regard vers les Baumettes en se remémorant les statues des sept péchés capitaux et leur répartition entre quartiers (la luxure c’est masculin ou féminin ? Et la gourmandise, plutôt femme non ?). Progresser dans le maquis, parmi les piquants protecteurs, les coronilles jaunes émergeant des fissures de rocailles, le fenouil sauvage, les bosquets de cistes mauves et cotonneux, les bouquets élancés d’euphorbes ensoleillées, les genêts et les pistachiers. Observer les goélands se laissant porter par le vent, disparaissant au gré de leur inclinaison puis réapparaissant en pleine lumière. Longer le puissant mont Puget, repérer la grande Candelle et la côte escarpée vers Cassis, falaises calcaires basculant en éboulis, jeter un œil vers la calanque de Sugiton, le torpilleur et les îles proches, Plane, Riou, Meyre, les cabanons de Morgiou, les pins isolés, les forêts de chênes et les rochers…Tout se mêle quand on ferme les yeux.
Laisser le chemin sur la gauche, emprunter la piste, se diriger vers le Sud, continuer la montée, redescendre, bifurquer juste avant la borne, poursuivre tout droit. S’arrêter à la calanque de Marseilleveyre et déguster l’assiette de frites du belge avant de prendre un bain. Glisser en apnée, remonter, frissonner, émerger, s’immerger, entrer et sortir pour le plaisir. Se laisser dorer face aux risées de la mer ridée. Puis aller en direction de la grotte Cosquer et ses peintures rupestres curieusement accessibles ce jour. Enfourcher les chevaux de son imagination et partir, partir. Au plus loin de ses rêves et de ses souvenirs. Filer à l’infinitif, ce temps qui ne se conjugue pas mais s’impose et ouvre vers l’infini.
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