"Mener des combats moins populaires que le thon rouge"

À la une
le 23 Août 2012
2
"Mener des combats moins populaires que le thon rouge"
"Mener des combats moins populaires que le thon rouge"

"Mener des combats moins populaires que le thon rouge"

Marsactu : Black Fish est basé à Amterdam, avec des groupes actifs surtout dans le Nord de l'Europe. Avez-vous des relais en France et en Méditerranée pour mener votre campagne ?

Wietse van der Werf : Actuellement, nous n'avons pas de groupe ici. Mais la France a une très longue tradition de défense de l'environnement marin, avec des figures comme Cousteau. Nous sentons beaucoup d'intérêt des Français et nous allons descendre dans les prochains mois préparer le terrain, avant de lancer la campagne au début de l'année 2013.

On a déjà vu ces dernières années en Méditerranées d'autres ONG (Greenpeace et Sea Sherpherd) mener la bataille sur le thon rouge. Comment vous différenciez-vous et que pouvez-vous apporter de plus ?

La différence principale est que nous n'allons pas prendre un bateau, mener des actions, essayer d'amener à une prise de conscience, puis partir. Nous allons rester, pendant au moins trois ans. Bien sûr, nous avons besoin d'argent, pour mener nos campagnes, mais nous sommes une organisation plus petite, avec des bateaux plus petits. Nous sommes tous bénévoles, même si ceux qui sont à plein temps voient leur dépenses couvertes. Autre différence : nous comptons bâtir une communauté, en impliquant beaucoup de gens ordinaires. Outre l'aide (nourriture, dons etc.) dans les ports où nous passerons, les gens peuvent participer depuis leur propre bateau en nous fournissant des informations. Nous allons avoir beaucoup d'yeux en Méditerranée…

Comment allez-vous opérer ? Quand on libère des thons d'une ferme d'engraissement, ce n'est pas aller contre la pêche illégale…

Vous faites référence à l'opération que nous avons menée en Croatie en 2010. Cette année-là, l'ICCAT (l'organisation internationale chargée de contrôler la pêche et le commerce des thons, ndlr) a décidé que les thons rouges devaient faire au moins 30 kilos. Mais en même temps, elle a accordé une dérogation à la Croatie, au nom de sa pêche traditionnelle. Sauf que la mer Adriatique est une des zones où les jeunes poissons sont très présents, et que les fermes d'engraissement ne font pas partie de la « tradition » en Croatie. On va se concentrer sur les pratiques les plus destructrices et illégales, mais lorsque les règles sont tellement injustes, il faut pousser.

Et votre but politique est de faire tomber à zéro le quota de captures légales…

C'est notre objectif. Nous considérons que c'est une espèce tellement menacée qu'il ne devrait plus être autorisé de la pêcher. La seule raison pour laquelle ce n'est pas le cas, c'est que, lorsque les scientifiques émettent un avis, la décision est au final politique. Comme dit une vieille expression, les pêcheurs votent, pas les poissons…

Pourtant ces derniers temps, on a observé des signaux positifs indiquant que les dernières mesures et quotas semblaient faire leurs preuves…

C'est exactement ce que l'industrie du thon rouge veut nous faire croire. Mais parlant d'une population qui a diminué de 90% ces dernières décennies, nous ne pensons pas que même une hausse de 1 ou 2% veut dire qu'on peut augmenter les quotas…

Quel est l'intérêt de rester dans la durée alors que la saison de pêche du thon rouge ne dure qu'un mois ?

La saison ne dure qu'un mois, mais la pêche illégale a lieu avant comme après. Et nous ne sommes pas focalisés que sur le thon rouge, il y a d'autres sujets comme les filets dérivants. La Méditerranée est un lieu unique pour la biodiversité sur Terre, elle a besoin de toute notre attention.

N'avez-vous pas peur que ces autres enjeux soient occultés par le très médiatique thon rouge ?

C'est vrai que c'est un problème que les gens se concentrent sur le thon rouge – ou les dauphins, les baleines – alors qu'il y a d'autres espèces, comme l'espadon, qui sont en danger. Nous devons avoir une vision plus large, la biodiversité est un ensemble de relations. Les requins sont par exemple très importants en Méditerranée. Il faut aussi mener des combats moins populaires.

Cet article vous est offert par Marsactu
Marsactu est un journal local d'investigation indépendant. Nous n'avons pas de propriétaire milliardaire, pas de publicité ni subvention des collectivités locales. Ce sont nos abonné.e.s qui nous financent.

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

  1. titoune titoune

    Petite démarche contre gros intérets,le Poisson noir va avoir du boulot!Bon courage .

    Signaler
  2. Marius Marius

    Je pense que nos anciens n’embellissent pas leurs souvenirs quand ils rappellent que voir sauter des bancs entiers de thons rouges le long du littoral Provence-Côte d’Azur était un spectacle banal.

    C’était avant la surpêche !

    Signaler

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire