Le centre social Romain-Rolland, victime collatérale du chamboule-tout des Maisons pour tous
Fusionné avec la maison pour tous voisine, le centre social Romain Rolland, dans le 10e arrondissement, a changé d'association gestionnaire. Problème, le repreneur n'a pas prévu de conserver l'activité de centre social dans l'immédiat, ni les neufs salariés concernés.
Le centre social Romain-Rolland, victime collatérale du chamboule-tout des Maisons pour tous
En juillet 2017, il y a moins d’un an, le centre social Romain-Rolland inaugurait des locaux flambants neufs : 700 mètres carrés aménagés de façon moderne, après des années à occuper des locaux exigus et provisoires. En janvier, pour couronner cette évolution, la caisse d’allocations familiales attribuait au centre social un agrément de 4 ans, “une belle reconnaissance”, se souvient-on encore parmi l’équipe. Car quelques mois plus tard, la situation n’est plus du tout la même : le centre social va disparaître, au moins provisoirement, dès ce vendredi.
C’est par un effet de domino apparemment très mal anticipé qu’il se retrouve ainsi sur la sellette, avec neuf salariés sans poste dès aujourd’hui. Début avril se jouait le chamboule-tout des Maisons pour tous : la mairie renouvelait les délégations de service public de ces 27 structures réparties dans la ville. Un renouvellement marqué par un important changement des acteurs, l’arrivée de nouvelles associations et la sortie d’anciennes.
Dans ce grand bouleversement, le centre social se retrouvait impacté : la Ville, propriétaire des locaux, a souhaité sa fusion avec la Maison pour tous voisine de la Pauline. Intégré à cette dernière, le centre social s’est donc retrouvé soumis au renouvellement.
“On a eu vent de la fusion voulue par la ville entre le centre social et la [MPT] Pauline. Dans la mesure où les deux étaient gérés à l’époque par le CCO [l’association Centre de culture ouvrière, ndlr], on ne s’est pas méfiés”, détaille Catherine T., directrice actuelle du centre social. Le projet prévoyait de rassembler les deux équipes dans le centre social flambant neuf, et de faire de l’actuelle Maison pour tous une annexe, en proposant à la fois les activités d’animation habituelles de l’une, et l’accompagnement et les prestations sociales de l’autre. Une fusion déjà opérée à plusieurs reprises dans la ville.
Un repreneur au budget serré
Mais le CCO a été l’un des grands perdants de ce renouvellement : des trois Maisons pour tous dont il avait la gestion, il n’en a conservé aucune. La mairie lui reproche notamment de ne pas rentrer dans les enveloppes budgétaires prévues. C’est l’association Synergie family, nouvelle venue dans le social à Marseille, qui a raflé la gestion de la structure et de ses deux bâtiments situés dans le 10e arrondissement.
“On a joué, on a perdu, soit, mais c’est le centre social lui-même qui est remis en cause, déplore Catherine T.. On doit quitter les lieux, il y a un vide juridique à partir du 31 mai. On est dans un no man’s land. Je ne pensais pas que c’était possible.” Un vide juridique qui concerne tout d’abord la reprise des salariés des deux structures fusionnées. Elle est en théorie automatique, mais dans le cas d’une fusion, rien n’est évident.
Car le cahier des charges de l’association qui a remporté la nouvelle délégation ne prévoit la reprise que… d’une seule structure au poids très allégé. “Il y a eu une fusion, et dans ces cas là, c’est normal de ne pas conserver deux équipes complètes, nous n’avons donc pas un cahier des charges qui nous permet de reprendre la totalité des salariés”, plaide Laurent Choukroun, directeur de Synergie family. Il a donc proposé de reprendre les cinq salariés de l’ex MPT la Pauline. Mais pour les neuf salariés du centre social, il ne promet que de “les rencontrer pour leur proposer de nouveaux contrats de travail, pas forcément sur ce site là, et à des conditions différentes”. Le repreneur, au budget serré, pointe notamment l’ancienneté des salariés, qu’il serait “impossible” de rémunérer aux conditions actuelles.
Le sort des salariés devant la justice
“Pour le moment, les salariés n’ont pas de contact avec Synergie”, assure Charlotte Marini, représentante du syndicat Sud au CCO. Le problème devient juridique et devra se régler devant la justice : qui doit payer les neuf salariés non repris au mois de juin ? “Soit on considère que le transfert doit se faire pour tous les salariés selon le code du travail, avec une reprise aux même conditions qu’avec l’ancien employeur, ainsi que le considère le CCO. Ou alors on considère comme Synergie que le transfert n’est pas valable et que les salariés doivent être maintenus au sein de l’association actuelle, ce qui impliquerait, selon le CCO, des licenciements économiques, avec un coût pour l’association”, résume la représentante syndicale.
Les salariés ont d’ores et déjà déposé un recours devant le juge des référés pour être fixés sur leur sort au plus vite. Une manifestation est aussi prévue ce vendredi matin, à l’appel de la CGT et de Sud. Les salariés prévoyaient aussi de faire constater leur présence à leur poste ce vendredi matin par des huissiers, mais la prise de fonction des nouveaux délégataires a été repoussée d’une semaine. “C’est un bras de fer juridique, reconnaît aussi Jacques Abehssera, directeur général du CCO. Ça risque d’être dramatique. S’il n’en reprennent que quelques uns, qu’est-ce qu’on fait des autres ?”.
L’aide de la CAF suspendue
Au delà de la question de l’équipe, c’est l’appellation même de centre social et les importants financements qui vont avec, qui vont prendre fin. L’agrément centre social attribué par la CAF ne sera en effet pas repris par Synergie family. “Nous avons un projet social, avec une vision innovante, mais c’est extrêmement compliqué de reprendre le projet social porté par le CCO de façon exacte, avec les mêmes salariés comme il le faudrait pour conserver cet agrément”, déclare Laurent Choukroun. Il devra donc déposer une nouvelle demande d’agrément, à partir d’un nouveau projet. Entre temps, la structure ne sera donc plus reconnue comme centre social. “On prive le territoire des services de la CAF”, ne décolère pas Jacques Abehssera du CCO.
Sollicitée, la CAF affirme suivre le dossier, et précise qu’un nouvel agrément pourra être octroyé “très vite” si le dossier déposé remplit les critères. La mairie et l’élue à l’action sociale Sylvie Carrega, qui a planifié la fusion et retenu le projet de reprise de Synergie family n’a pas souhaité répondre aux questions de Marsactu. Si d’autres transferts, se sont passés sans cahots particuliers, Synergie family rencontre aussi des problèmes similaires à la maison pour tous-centre social Les Olives-La Marie, où des conciliations avec les représentants des salariés sont en cours.
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