[Mazargues, un village dans la campagne] Place du Christ ou du diable ?
La rue Émile-Zola et l'église de Mazargues (Photo : CV)
Jeudi soir, 18 heures. Dans la grande salle de la maison de quartier de Mazargues, ils sont une soixantaine, bien mis et souvent retraités, ils se connaissant bien. Le président Bouze, crinière blanche, préside entouré des autres responsables du comité d’intérêt de quartier (CIQ). La réunion mensuelle du CIQ aborde maints problèmes de Mazargues-village, discute avec les élus présents, mais pas un mot de ce qu’on appelle, ici comme ailleurs, “la politique” ; c’est-à-dire les élections en cours. Jean-Pierre Bouze annonce l’ordre du jour qui sera respecté et à peine bousculé.
À propos de construction, ça commence avec un rappel des succès obtenus devant le tribunal administratif contre un permis de construire chemin de la chaîner. Vient le moment le plus long de la soirée, et thème majeur : la propreté. Georges Maniscalco évoque “les incivilités, les déjections canines, les encombrants”, problèmes actuellement très délicats : le déplacement des conteneurs près des écoles est rendu nécessaire par le plan Vigie-Pirate. Quatre seront installés rue Magdelon, rue Raoux… L’orateur, qui a été applaudi, remercie encore tous ces habitants qui lui ont ouvert leur porte quand il enquêtait “sur le terrain” –“et même le dimanche matin” lui lance une dame qui l’en félicite. La question des ordures ménagères réglée, il évoque alors “les nuisances sonores, Place du Christ : des jeunes viennent avec leur scooter, boire, fumer s’exhiber. Ils ont 14 ou 18 ans, ils dérangent les mamans en les chassant des quatre bancs… Et le soir, c’est une plate-forme du commerce de la drogue”. Grognements et approbations dans une assemblée manifestement hostile à cette présence, on passe à autre chose.
Est arrivé Jean-Michel Muraciole, adjoint LR à la vie commerçante, voirie, circulation et stationnement, de la mairie des 9/10. Ce jeune élu, “né à Saint-Anne” quartier voisin – et actif filloniste -, explique combien la mairie tient “aux noyaux villageois dans la deuxième ville de France” qu’il faut “revivifier. En donnant aux gens envie de consommer à Mazargues, en créant des animations, comme au Cabot”. Il rappelle que la mairie a “obtenu qu’Intermarché ne puisse ouvrir un nouveau magasin” (applaudissements spontanés…). À propos de la “place du Diable… euuh”, rires de la salle, “de la place du Christ, excusez-moi, j’arrive d’une réunion avec les gens de la traverse du Diable”, il redit comment le joindre, demande au CIQ d’établir des listes précises des demandes ou des problèmes du quartier.
Vincent Vidal, conseiller d’arrondissement – et dissident du FN -, prend la parole pour redire ce qu’il a dit au conseil d’arrondissements : “Que jamais la rue Emile-Zola ne devienne comme la rue de la Belle-de-Mai, où tous les commerces sont fermés”.“Il n’y a plus un magasin, hormis pour les téléphones et les kebabs”, explique-t-il ensuite à un interlocuteur qui l’avait deviné … D’ailleurs une dame demande à Muraciole si une loi peut “empêcher que ce ne soit pas les mêmes commerces qui s’installent dans un local vendu”. Elle énumère alors : “Rue Zola il y a trois restaurant chinois, deux kebabs, ça apporte rien pour la bouffe, trois lunetiers, et il y a huit pizzerias à Mazargues…”. Léger et court brouhaha, le dernier point concerne “l’arrêt Gaudibert” que la RTM a déplacé, “c’est devenu une affaire d’Etat”, souligne Jean-Pierre Bouze qui parle de l’article avec photo paru dans La Provence. À ce sujet, le rendez-vous avec le maire Lionel Royer-Perrault, évoqué lors du dernier conseil par Vincent Vidal qui le rappelle, aura lieu “le 18 avril”. 19h45, la réunion est levée, ça bavarde, les gens rentrent chez eux.
Samedi 10 heures, les militants FN du secteur se retrouvent comme chaque samedi autour d’Eleonore Bez, conseillère régionale qui sera leur candidate aux législatives dans la circonscription. Tractage, visites de quartier, ces infatigables n’arrêtent pas, même si leurs affiches sont “systématiquement recouvertes”. Future directrice de campagne de la candidate, Jocelyne, “qui connaît Marseille comme sa poche”, était au meeting de Jean-Marie Le Pen au stade Vélodrome le 17 avril 1988. Elle en garde un souvenir ému –”Vous vous rappelez qu’il y avait les harkis ?”, comme la quarantenaire Eleonore Bez, dont les parents appartenaient au même courant pied-noir.
“Très disponibles, super”, deux jeunes gens sont aussi de la journée : l’un est étudiant “pour être prof’ d’anglais”, l’autre paysagiste. Les deux autres sont un peu plus âgés, l’un est un ex-taximan, actuellement sans emploi, l’autre travaille “dans les faux plafonds”. Selon eux, “le terrain, c’est fondamental” : il faut écouter les gens “ce qu’ils disent, ce qu’ils veulent”, d’autant plus que “les élites sont déconnectées du peuple”, comme Macron “l’ancien banquier Rothschild qui ne connaît même pas la géographie du pays. Pour lui la Guyane c’est une île et Villeurbanne est dans le Nord !”.
Quartier après quartier, ils auront visité tous les noyaux villageois, toujours bien accueillis. En particulier par les commerçants. Ceux de Mazargues, qu’ils ont rencontrés il y a trois semaines et qu’ils disent particulièrement favorables, déplorant “les fermetures, la disparition des petits commerces”. “Ils nous accueillent toujours bien, ‘Ah, c’est pour Marine !’, et ils disent immédiatement que c’est leur premier souci”, , m’explique Eléonore Bez. “Un, parce qu’ils risquent la faillite, deux, parce que leur quartier devient désert”. Eleonore Bez visite d’ailleurs le plus possible les CIQ, s’y présentant toujours comme conseillère régionale. En attendant mieux, “j’adore le contact avec les gens…”
10 heures/16 heures Avec une courte pause repas, la longue journée militante se poursuit à Pont de Vivaux…
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