La fille d’un cadre de 13 habitat a bénéficié d’un logement social très généreusement rénové

Quelques jours après nos révélations sur l’attribution d’un logement social à la mère de Nora Preziosi, Marsactu révèle que la fille d’un cadre de 13 habitat, M.Z., directeur de territoire, soit le responsable de plusieurs agences locales de l’office, a, elle aussi, obtenu un logement social, cette fois situé avenue de Montredon (8e arrondissement). Là encore, l’appartement a bénéficié de travaux de rénovation particulièrement généreux.

Juste en face de la Campagne Pastré, deux immeubles de quatre étages s’élèvent modestement. À l’entrée de la petite résidence, un panneau 13 habitat accueille le visiteur. À cinq minutes à pied de la plage du Bain des Dames, l’emplacement est idéal. Selon nos informations, Mme Z. y occupe depuis mars 2024 un T3 avec son mari. Mme Z. est la fille de M.Z., directeur de territoire chez 13 habitat et fidèle collaborateur de Nora Preziosi. “Elle, c’est lui et lui, c’est elle”, formule un salarié de 13 habitat au sujet de leur collaboration professionnelle.

Une nouvelle fois, la question de savoir si cet appartement a été obtenu dans les clous de la procédure se pose. Une commission d’attribution de logements et d’examen de l’occupation des logements (CALEOL) s’est-elle par exemple tenue pour valider l’attribution de ce logement à une proche d’un cadre de 13 H ? Contacté par Marsactu sur le cas de ce bien, le service communication de 13 habitat nous a fait la même réponse que pour l’appartement occupé par la mère de Nora Preziosi : “Toute attribution de logement social est nominative et ne peut donc donner lieu à aucune communication dans le souci du respect des informations personnelles de chacun des occupants. Cela étant, nous tenons à vous préciser que notre Office obéit à un cadre légal et réglementaire strict pour l’attribution des logements à travers la CALEOL, dont les débats préservent la confidentialité des dossiers sélectionnés par la commission.” Circulez, il n’y a rien à voir. Par ailleurs, contactés par Marsactu, ni Nora Preziosi, ni M.Z. n’ont répondu à nos sollicitations.

Travaux XXL

Comme chaque logement récupéré par un nouveau locataire, des travaux de remise à niveau, dits “de relocation”, sont commandés afin de remettre le bien en état. Celui-ci n’y a pas échappé. Pour remettre l’appartement à la location, 17 722 euros de travaux sont donc effectués. “Normalement, après ces travaux de relocation, le logement est habitable”, souligne un entrepreneur effectuant ce type de travaux pour plusieurs bailleurs sociaux, dont 13 Habitat.

“Il y avait des malfaçons dans la rénovation du logement… et donc il a été décidé de refaire l’appartement à neuf”

Une source à 13 habitat

Or, là encore, comme pour le logement attribué à la mère de Nora Preziosi, des travaux supplémentaires sont lancés. “Il y avait des malfaçons dans la rénovation du logement… et donc il a été décidé de refaire l’appartement à neuf”, précise une source interne à 13 Habitat. Travaux de maçonnerie, électricité, menuiserie, chauffage, carrelage au sol, peinture… L’appartement a visiblement bénéficié d’un (très gros) coup de propre. Montant de ces travaux additionnels ? 30 000 euros. Des sommes particulièrement élevées qui n’ont pas fait tiquer la direction de l’office HLM qui a validé le lancement des travaux, d’après des documents que Marsactu a pu consulter. En tout, un peu moins de 47 000 euros ont donc été consacrés à la remise en état de cet appartement avant son octroi à Mme Z.

Remis à neuf… après rénovation

Les travaux tiennent en fait d’une restauration et d’une modernisation en profondeur. “On a changé l’évier, on a posé 30 mètres carrés de faïence. On a fait une cuisine ouverte. Il y a aussi eu une demande pour changer les portes. Le sol a été intégralement remplacé, pour poser du carrelage”, confie une source ayant travaillé sur le chantier. “C’est simple, il a été décidé de refaire l’appartement à neuf : peintures, portes, sols, cuisine, salle de bain… Alors que l’appartement venait d’être rénové”, confirme un informateur au sein de 13 habitat qui tient à rester anonyme.

De ce fait, l’enveloppe allouée à cette rénovation complète va bien au-delà des montants habituellement alloués à un bien en voie de relocation. “Normalement, pour un logement rénové après le départ des précédents locataires, on va chiffrer entre 8 000 à 9 000 euros. Allez, jusqu’à 15 000 euros grand max pour des appartements qu’on récupère après 50 ans d’occupation. Mais là, on est à plus de 45 000 euros !”, s’étrangle un ancien salarié de 13 Habitat.

“Changez-moi le WC”

Plusieurs sources chez 13 Habitat nous ont en outre confié les demandes extrêmement précises effectuées par la nouvelle locataire. “Elle nous a clairement dit « les poignées de porte ne me plaisent pas », « changez-moi le WC », « changez-moi la prise de place »… “, précise un salarié de 13 habitat. “Ça fait des années que je travaille à 13 habitat, je n’ai jamais vu ce genre de travaux-là. On ne rentre jamais dans ce niveau de détail, on est un bailleur social, pas un propriétaire”, lâche, dépité, une autre source, au sein de l’office. Même réaction pour un employé d’une entreprise travaillant sur ce type de chantier pour plusieurs sociétés HLM locales, dont 13 H : “Je n’ai jamais vu ça dans aucun logement 13 habitat sur lequel j’ai bossé”, indique-t-il.

Du côté du service de communication de 13 habitat, on évacue : “Ces derniers [ces travaux, ndlr] sont courants à l’entrée des lieux par les nouveaux attributaires et leur ampleur dépend naturellement de la durée d’occupation des précédents locataires et de la vétusté des appartements constatée lors de l’état des lieux.”

“Locataires +++”

Ce genre de traitement spécial accordé à quelques locataires privilégiés serait désigné sous une appellation bien particulière. “Quand on nous envoie faire les travaux chez des « locataires +++ », on comprend très bien ce que ça veut dire et ce qu’on doit faire”, confie une source chez 13 habitat. “Ce sont des locataires qui estiment avoir des passe-droits parce qu’ils connaissent untel ou untel”, ajoute un autre. Et de soupirer : “Pendant ce temps, il y a des gens à qui on refuse de faire des travaux.”

Dans la charte éthique et déontologique interne dont s’est doté 13 habitat en mai 2019, on peut pourtant lire : “Ils [les collaborateurs de 13 habitat] s’interdisent de tirer de leur position professionnelle tout avantage, pour eux ou pour leurs proches”. Une charte que certains semblent avoir oubliée.

Marius Rivière

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