L’ex-femme et un proche de Renaud Muselier seront jugés pour prise illégale d’intérêts
La juge d’instruction Anna Gabrovsek a signé son ordonnance de renvoi le 14 mars. Elle a décidé de renvoyer devant le tribunal judiciaire de Marseille huit personnes dans l’affaire d’atteintes à la probité au sein du bailleur social Habitat Marseille Provence. Cela concerne notamment deux très proches de Renaud Muselier, son ex-épouse, l’avocate Stéphane Clément et un de ses collaborateurs historiques, Jean-Luc Ivaldi, aujourd’hui directeur général de la société du canal de Provence, un satellite de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur présidée par l’élu Renaissance.
Les faits qui sont examinés remontent au début des années 2010. Renaud Muselier est alors encore l’ambitieux dauphin de Jean-Claude Gaudin à la mairie de Marseille. Habitat Marseille Provence est présidé par un de ses proches, Patrick Padovani et, dès 2009, s’installe à la direction générale celui qui était son directeur de cabinet, Jean-Luc Ivaldi.
Ce dernier s’était investi personnellement pour confier un grand nombre de dossiers judiciaires du bailleur à Stéphane Clément. Quand plusieurs robes noires étaient désignées pour gérer les contentieux locatifs, Jean-Luc Ivaldi avait donné instruction à ses équipes d’en confier six sur dix à Stéphane Clément. “Plusieurs employés attribuaient la désignation de Me Stéphane Clément dans une majorité de dossiers à sa proximité avec “la direction” de l’office”, récapitule la juge d’instruction.
Une ancienne responsable juridique de HMP allait plus loin : rien ne justifiait une externalisation de la gestion de ces procédures, précédemment traitées en interne. “Pour moi, toutes les sommes payées aux avocats au titre de ces dossiers le sont en pure perte pour HMP. Il n’y a aucun intérêt pour HMP”, martelait-elle.
Face à la juge d’instruction qui l’a mis en examen en octobre 2021, Jean-Luc Ivaldi a assumé avoir voulu mettre en concurrence le traitement interne dans le but de comparer les coûts. Quant au recours renforcé aux services de Stéphane Clément, ce qu’il assume, il a précisé : “J’aurais dû choisir un avocat qui facture plus cher parce que je connaissais Me Clément ? C’est une vraie question que je me pose”.
Cette considération n’a rien à voir avec ce délit qui s’intéresse seulement aux liens privés qui pèsent sur un responsable public au moment où il prend une décision : la prise illégale d’intérêts, punie d’un maximum de cinq ans d’emprisonnement et de 500 000 euros d’amende. En l’occurrence, la juge estime que Jean-Luc Ivaldi aurait dû s’abstenir de toute décision ou instruction concernant Stéphane Clément, “au vu du lien qui l’unissait à l’intéressée et plus particulièrement son époux, Jean-Luc Ivaldi disposait d’un “intérêt moral, direct et indirect”, à favoriser Stéphane Clément comme avocate dans la majorité des dossiers”.
Accusée de recel, Stéphane Clément se voit reprocher d’avoir “bénéficié, en connaissance de cause, des sommes versées par HMP en rémunération des prestations qu’elle a pu fournir dans ce cadre”. “”On attend l’audience pour pouvoir plaider et débattre du non-fondé des poursuites. Elle conteste toute implication dans cela”, précise son avocat Érick Campana.
Ce dossier embarrassant pour Renaud Muselier sera dans un premier temps audiencé le 21 juin prochain. Sur le banc des prévenus, s’installeront notamment deux anciens responsables de l’office. L’ex-président Bernard Oliver devra répondre de l’indemnité de départ de plus de 200 000 euros, qualifiée de détournement de fonds publics, octroyée à sa directrice Nicole L’Hernault. Tous deux, plus une ancienne directrice par intérim, sont aussi renvoyés pour des délits de favoritisme dans l’octroi de marchés publics, souvent au bénéfice d’entreprises privées, dont le syndic Foncia Marseille, renvoyé pour recel. Tous sont à ce stade présumés innocents.
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