En 2035, la nouvelle gare Saint-Charles s’ouvrira enfin sur la ville

Décryptage
le 20 Jan 2022
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Dans la décennie à venir, la gare Saint-Charles va se doter de voies souterraines, mais aussi se transformer pour mieux s'intégrer aux quartiers qui l'entourent. Un projet d'envergure qui devra convaincre des habitants habitués aux promesses sans lendemain.

En 2035, la nouvelle gare Saint-Charles s’ouvrira enfin sur la ville
En 2035, la nouvelle gare Saint-Charles s’ouvrira enfin sur la ville

En 2035, la nouvelle gare Saint-Charles s’ouvrira enfin sur la ville

“Le projet de transformation de la gare de Marseille est important pour notre quartier, pour le lier aux autres, on a participé à pas mal de réunions. Mais on reste inquiets de ce qui sera réellement réalisé ou pas au final”, confie Serge Pizzo, membre du CIQ de la Belle-de-Mai. Avec l’ouverture ce lundi 17 janvier de l’enquête publique du projet de la Ligne nouvelle Provence-Côte d’Azur (LNPCA), d’importants chantiers sont mis en discussion. Ils ont pour objectif de transformer en profondeur les infrastructures ferroviaires de Marseille, dont la gare Saint-Charles. Et, avec elles, la vie des quartiers alentours.

“C’est un projet assez grandiose qui se met en place, en particulier avec la gare souterraine. L’idée générale est d’ouvrir la gare vers l’extérieur en créant de nouveaux accès, explique un des commissaires-enquêteurs. Actuellement, de ce cul-de-sac ferroviaire partent de nombreuses voies ferrées qui coupent physiquement et socialement le nord et le sud du centre-ville. Et, alors que l’actuelle gare est principalement orientée vers le centre avec son accès par l’escalier monumental, un des objectifs annoncés de ce projet est de mettre en place “un travail de couture urbaine avec les quartiers limitrophes” en coordination avec d’autres initiatives d’aménagements urbains tels que Quartiers Libres, qui porte principalement sur la Belle-de-Mai, côté 3e arrondissement. Pour cela, des murs vont tomber, des bâtiments vont être détruits, de nouvelles entrées vont être construites et des galeries souterraines vont être creusées.

La LNPCA en chiffres
La première phase du projet de la Ligne nouvelle est prévue pour démarrer en 2023 avec une mise en service 2030. À Saint-Charles, elle comprendra le réaménagement du plateau de la gare et des voies des faisceaux est et ouest qui y convergent. La deuxième phase démarrera en 2027 et devrait se terminer en 2035. C’est à ce moment-là que sera réalisée la traversée ferroviaire souterraine de Marseille par les rails. Le coût total global des chantiers de la LNPCA est évalué à 3,5 milliards d’euros, financé à 40% par l’Etat, à 40% par les collectivités et 20% par l’Europe.

À l’Est, la transformation du site des Abeilles

“Ici, ils vont tout transformer pour installer la zone de production de béton temporaire pour toute la durée du chantier, puis faire la nouvelle gare, explique un employé de la SNCF, en regardant, par delà la barrière, les multiples voies ferrées du site dit “des Abeilles”. En longeant la gare Saint-Charles par la droite, sur l’avenue Pierre-Sémard, on arrive vers ce site qui va, à terme, être entièrement “libéré” pour aménager l’ensemble du bloc Est du projet.

Toute une partie du site des Abeilles va être transformé par le projet de LNPCA.

Par un chantier de terrassement gigantesque, le tout sera rabaissé pour se retrouver à la hauteur du boulevard National, dont le tunnel sera raccourci d’une quarantaine de mètres. C’est ici, le long du boulevard Voltaire où s’accumulent aujourd’hui les embouteillages que se trouvera le nouveau parvis Voltaire-National, longue esplanade piétonne agrémentée de verdure (voir ci-dessous). Il est destiné à être un espace ouvert de convergence des différents transports, avec l’accès au tramway, aux bus et mobilités douces (piétons, vélos…). Plus loin, le long du boulevard Camille-Flammarion, sera construit un parking souterrain recouvert de végétation.

Côté sud-est, plusieurs aménagements, dont une esplanade, retisseront du lien avec le quartier. (Visuel tiré du dossier de l’enquête publique)

Autant de projets qui répondent aux aspirations des habitants du quartier Saint-Charles, pour qui la gare forme aujourd’hui un obstacle difficile à contourner dans les trajets du quotidien. Mais des inquiétudes demeurent en attendant de voir ce qui sera réellement construit. “On a assisté aux réunions l’année passée et on soutient le projet en tant que tel, commente Philippe Billion, membre du CIQ de Saint-Charles. On aimerait bien qu’il y ait des places de stationnements en plus, et des espaces verts, mais on a très peur qu’ils soient supprimés ou revus à la baisse, un peu comme cela s’est passé avec le parc prévu à la Porte d’Aix“.

Le nouveau parvis de 10 000 mètres carrés donnera accès à la nouvelle gare traversante de Marseille. Et c’est ici, à 25 mètres sous la surface, que se trouvera le plus grand chantier du projet de LNCPA : la gare souterraine. Avec 4 voies à quai pour les TER et TGV et un bâtiment voyageurs réparti sur quatre niveaux, elle permettra la traversée de Marseille, du nord vers l’est.

La gare actuelle et la nouvelle coexisteront, avec l’arrivée de voies souterraines. (Visuel tiré du dossier d’enquête publique)

Ce bâtiment fera office de “plaque tournante” entre les transports en commun, les zones piétonnes et donnera accès à la galerie de liaison du métro. La gare reliera le nord et le sud avec la création d’un “lien urbain”, une galerie souterraine large d’une douzaine de mètres qui reliera le quartier Saint-Charles et la Belle-de-Mai, en parallèle au boulevard National et débouchera sur la rue Honnorat, de l’autre côté des voies.

Côté Belle-de-Mai, des espoirs prudents

C’est au croisement de cette artère avec la rue de Crimée que se trouvera la Porte Honnorat, nouvelle entrée nord de la gare donnant sur les quartiers du 3e arrondissement. La rue Honnorat sera élargie, permettant un recul de l’immense mur qui la longe et l’assombrit aujourd’hui, pour y installer notamment un dépose-minute et l’amorce d’un piste cyclable reliée à la future voie verte.

La rue Honnorat est aujourd’hui à l’ombre d’un immense mur d’enceinte qui la sépare des voies. (Photo JS)

Pour ce quartier relativement enclavé et à l’écart du centre-ville, le projet est aussi vu comme une aubaine. Les associations de quartiers, au-delà du projet de LNPCA et des ouvertures qu’il offrira, rappellent toutefois que les projets d’aménagement qui s’y articulent en parallèle, sont attendus de très longue date.

s’il n’y a pas de volonté de venir vers nous, de traduire leurs rapports pour que tout le monde les comprenne et puisse se faire un avis éclairé, cela reste un débat d’experts.

Arthur Mayor, CHO3

Pour le collectif des habitants organisés du 3e arrondissement (CHO3), le projet de désenclavement du quartier de la Belle-de-Mai porté depuis longtemps par la métropole est nécessaire pour casser les frontières nord-sud. Mais, selon l’association, quelles que soient les procédures de concertation et d’enquête publique mises en place par les autorités, la réelle participation des habitants ne peut se faire que par une réelle volonté politique. “On veut pouvoir travailler ensemble, mais s’il n’y a pas de volonté de leur part de venir vers nous, de traduire leurs rapports pour que tout le monde les comprenne et puisse se faire un avis éclairé, cela reste un débat d’experts auxquels les habitants du quartier ne peuvent pas participer”, déplore Arthur Mayor, membre de l’association. “Est-ce que des projets importés par des techniciens, que les habitants découvrent quand ils sont aboutis répondent aux besoins des habitants ?”, poursuit-il.

Les futurs aménagemes prévus du côté de la rue Honnorat. (Visuel tiré du dossier d’enquête public)

Cette défiance dans les processus de concertation est forcément liée aux promesses passées non tenues dans ce quartier très paupérisé et en manque d’équipements publics. Un observateur du dossier formule l’équation à tenir : “On a des habitants qui ont tellement à cœur que le quartier s’améliore qu’ils participent et proposent, tout en étant exigeants et très critiques, ce qui est bon signe. Encore faut-il qu’ils aient un interlocuteur clairement défini avec qui communiquer”. Après une première phase de concertation entre 2020 et 2021, l’enquête publique, ouverte jusqu’au 28 février, leur offrira un nouvel espace pour exprimer leurs attentes comme leurs doutes.

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Commentaires

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  1. Bernard Honorat Bernard Honorat

    Pour les non marseillais ou aux heures tardives l’accès à la gare pour aller chercher quelqu’un qui vient d’arriver sera encore plus problématique. Il y aura t il un parking longue durée qui remplacera l’actuel des abeilles? Visiblement non. Un projet coûteux qui repartira sur 4 voix le flux de la vingtaine actuel, ça va être une grande pagaille. La lgv sud est une aberration économique écologique et tout simplement de logique des transports. Les provençaux n’en veulent pas, voyez tous les panneaux des opposante.

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    • fvielfau fvielfau

      le projet n’est pas de répartir les 20 voies de surface par 4 voies en souterrain.
      il s’agit d’ajouter 4 voies en souterrain pour les trains qui ne sont pas terminus Saint-Charles : TGV Paris-Toulon, IC Bordeaux-Nice ou TER Miramas-Aubagne par exemple

      le projet du tunnel permet d’éviter les manœuvres en gare Saint-Charles et le passage par le “triangle” des Chartreux qui constitue actuellement un goulot d’étranglement pour les trains entrant et sortant de Sain-Charles

      le mieux est de regarder les documents sur le site de la concertation publique
      https://www.lignenouvelle-provencecotedazur.fr/page/le-projet-soumis-lenquete-publique

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    • barbapapa barbapapa

      Il m’arrive d’aller chercher des voyageurs à la gare, c’est toujours en métro.

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      Ce qui est aberrant, c’est la gare en tiroir actuelle, qui oblige à des rebroussements et à des cisaillement de voies en permanence, ce qui ne permet de gérer qu’un nombre réduit de trains par heure.

      Pour les trains qui ne font que traverser Marseille, les 4 voies souterraines seront une bénédiction. Elles s’ajouteront aux voies de surface, qui pourront être un peu plus spécialisées (trains terminus et trains régionaux).

      Dans une région zébrée par les autoroutes et qui étouffe sous le trafic automobile, on ne peut pas se plaindre qu’enfin il y ait un projet ferroviaire d’envergure qui permettra de développer l’offre de trains et d’améliorer leur régularité.

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  2. Patafanari Patafanari

    2035, livraison de la nouvelle gare. C’est également à cette date que l’arrêt du moteur thermique est fixé et que les constructeurs devront passer à l’électrique ou à l’hydrogène. Le dépose minute pour les quelques personnes assez aisées pour posséder ce type de véhicule sera donc d’un usage apaisé.

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    • Bibliothécaire Bibliothécaire

      Oui alors, l’arrêt de la vente de voitures thermiques n’entraînera pas le retrait immédiat des voitures existantes.

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    • Pascal L Pascal L

      Et l’hydrogène (qui n’est produit que grâce à de l’électricité et avec environ 50 % de pertes) n’est pas une technologie mature et ne le sera probablement pas en 2035.

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  3. kukulkan kukulkan

    le dossier d’enquête est hyper pénible à lire et pas du tout pédagogique, technique direct, même moi, du métier, ne pense pas du coup donner mon avis…

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  4. vékiya vékiya

    2035… sachant qu’en terme de travaux à Marseille un an = 30 mois, on est pas rendu.

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    • petitvelo petitvelo

      oui, on pourrait commencer par ajouter la marge d’erreur statistiquement constatée ;o)

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  5. petitvelo petitvelo

    Espérons que le tunnel piéton traversant de 12m de large sera peuplé de commerçes pour qu’il ne soit pas trop glauque

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  6. leocara leocara

    Une question qui n’est pas évoquée dans le papier ni dans les visuels : qu’est-ce qui est prévu pour remplacer les actuelles voies de garage de la gare situées côté Bd Voltaire ? Où dormiront les trains ? A Blancarde ?

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